Un aveugle manchot devenu immortel, des cadavres de dragons réanimés, deux milliards d’Olfs et … un pélican toxico.


Si j’apprécie tout particulièrement la branche Donjon Crépuscule, c’est pour cette ambiance lourde de fin du monde, mâtinée d’humour et de mélancolie, qui est particulièrement réussie. Aussi cet album ne peut que combler le fan que je suis car cette ambiance apocalyptique atteint dans Armaggedon son paroxysme avec la destruction complète de la planète Terra Amata ! Un bonheur ne venant jamais seul, on notera que l’exploitation des conséquences de ce cataclysme est peut-être la meilleure idée scénaristique de toute la série : la formation d’un monde nouveau en perpétuelle mutation, formé d’îlots de terrains en mouvement aléatoire et incessant autour du cœur incandescent de la planète. Non seulement ce nouvel univers est sacrément cool, mais en plus il ouvre énormément le champ des possibles pour la suite des aventures du Roi-Poussière, de Marvin Rouge and co.


Ce qui fait aussi qu’Armaggedon est album crucial dans la série, c’est qu’il est inclus dans un cycle avec deux albums de la série Donjon Monsters (La carte majeure (DM3) et Le noir seigneur (DM4)), chaque album présentant les mêmes événements (ici la destruction de la planète) mais du point de vue de trois personnages différents (le Roi-Poussière dans Armaggedon, Marvin Rouge dans La carte majeure et le Grand Khan dans Le noir seigneur). Certes, le procédé – bien que rare – n’est pas nouveau en bande dessinée (on pense instantanément à l’excellente série Berceuse assassine en lisant ce postulat), mais il est particulièrement bien géré dans Donjon. Ainsi, les trois albums se recoupent parfaitement et comblent les trous scénaristiques présents dans chacun des tomes, permettant de bien saisir l’ensemble du scénario. Bref, Armaggedon est un album totalement indispensable de la série.


Au rayon des bons points, on notera aussi l’apparition d’un nouveau personnage hilarant et très attachant : le shaman toxico et gaffeur Gilberto, qui remplace dans cet épisode Marvin Rouge en tant que compagnon lourdeau du héros, qui l’handicape dans sa quête. Le tandem Roi-Poussière / Gilberto est très drôle et apporte beaucoup d’humour dans cet épisode très sombre en soit. Ajoutons que comme tout bon Donjon, l’album apporte son lot de révélations (notamment sur les passés du Roi-Poussière et de Pipistrelle, totalement bouleversants) et d’interrogations (comment et pourquoi la planète a-t-elle explosé ? Comment le roi Olf Bouboulou a-t-il pu revenir d’entre les morts ?) qui en fait un épisode essentiel en terme de background.


Si Armaggedon ne fait toutefois pas partie pour moi des meilleurs albums de Donjon Crépuscule, c’est peut-être parce que le dessin de Sfar est très inégal et beaucoup trop fouilli pour m’être agréable. Certes, c’est dans Armaggedon que Sfar livre son dessin le plus personnel, avec un trait branlant limite foutage de gueule sur certaines cases. L’artiste se lâche complètement dans cet album, avec des cases aux contours ramollis et une alternance de cases hyper chiadées et d’autres très sobres, à peine esquissées (comparez la gueule du Roi-Poussière p.8, c.6 et p.39, c.1 pour rigoler). Mais ce dessin de névrosé a un côté « too much » pour moi qui fait que j’ai du mal à l’apprécier. J’aime bien le côté punk du dessin de Sfar en général, mais là c’est parfois très borderline.


En résumé, un album incontournable en terme de scénario pour suivre la grande trame narrative de Donjon Crépuscule, mais illustré par un dessin très débridé qui peut ne pas plaire.

_minot_
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le 13 avr. 2021

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