Puisque les Romains sont en Bretagne, allons rigoler en Bretagne

- Il me faut leur tonneau de potion magique ! Ils vont sans doute se réfugier dans une auberge. Fouillez toutes les auberges et confisquez tous les tonneaux... et si vous ne les trouvez pas, je vous ferai bouillir et servir aux lions avec de la sauce à la menthe !!!
- Mais c'est horrible, ça !
- Oui, pauvres bêtes !

Ils sont fous ces Bretons !


« Nous ne pourrons plus tenir bien longtemps contre les romains, il nous faut de l'aide. », s'inquiète Zebigbos, le chef d'un petit village gaulois en Bretagne, qui lutte victorieusement contre l'invasion romaine sur cette grande île désormais sous le joug de César. Cette résistance difficile semble sur le point de toucher à sa fin, jusqu'à ce que le Gaulois Jolitorax fasse une remarque qui change la donne : « J'ai un cousin germain qui habite en Gaule. Son village résiste depuis longtemps aux romains, il paraît que c'est grâce à une potion magique qui leur donne une force surhumaine. » En réaction à cette remarque étonnante, Zebigbos place tout son espoir en son camarade : « Jolitorax ! Va en Gaule voir ton cousin et rapporte-nous de la potion magique. C'est notre dernier espoir. » Voilà le Gaulois breton sur les pas de son cousin germain, qui n'est autre qu'Astérix. Ce dernier est retrouvé dans son village désormais paisible après les nombreuses victoires des Gaulois grâce à la potion magique, ce qui laisse Obélix désœuvré sans Romains à affronter. Malgré les joyeuses retrouvailles, marquées par les maladresses habituelles d'Obélix, le Breton transmet les informations cruciales à Astérix. Celui-ci conduit ensuite son cousin auprès du chef Abraracourcix, qui décide : « Nous vous aiderons ! Je vais demander à Panoramix, notre druide, de préparer de la potion magique. Beaucoup de potion magique. » Seulement, le lourd tonneau de potion magique s'avère difficile à transporter pour Jolitorax, qui doit en faire usage pour le déplacer. Cette utilisation excessive attriste Panoramix, qui y voit un gaspillage regrettable, mais cela inspire Astérix : « Et bien, Jolitorax, si notre chef le permet, nous irons avec toi en Bretagne. », ravissant Obélix qui espère ainsi retrouver des Romains. Abraracourcix répond alors : « Je suis d'accord, Astérix, pour que vous alliez faire un débarquement en Bretagne... il reste si peu de romains dans notre région, que nous pouvons nous passer de vous quelque temps. » Et voilà Astérix et Obélix qui se lancent dans une nouvelle mission pleine de promesses, offrant une aventure palpitante où ils exploreront une nouvelle culture, assurant ainsi des moments comiques et des actions palpitantes. En route vers la conquête de l'Angleterre, pardon, de la Bretagne !


Astérix chez les Bretons représente le huitième tome de la série de bandes dessinées Astérix, concocté par René Goscinny et illustré par Albert Uderzo. Une bande dessinée qui nous transporte à la découverte du peuple breton, non pas celui de la région actuelle de Bretagne en France, mais celui de la Grande-Bretagne, nos chers amis Anglais, avant les nombreuses invasions qui allaient ultérieurement transformer le pays en l'actuelle Grande-Bretagne. Cette exploration révèle une multitude d'idées ingénieuses de la part de Goscinny pour le côté langagier, et d'Uderzo pour le point de vue esthétique, qui, avec une innocence totale et sans aucune intention de dénigrement, se moquent gentiment de nos chers engliches, que l'on appelait aussi autrefois "anglois" ou "brits", ou encore sous Napoléon, "les homards". Un album foisonnant en références britanniques de toutes sortes, nous offrant un aspect culturel devant lequel on se régale. La manière dont le langage breton est abordé est délicieuse, car le récit s'amuse à parodier de façon systématique les expressions anglaises en les traduisant littéralement en français. Ceci procure des instants délicieux grâce à notre cher et naïf Obélix, qui souligne avec une franchise désarmante chaque détail de typiquement breton pour s'en étonner, tandis qu'Astérix le regarde avec une certaine gêne. « Ils sont fous ces Bretons ! » Et les détails cocasses ne manquent jamais, notamment une étrange coutume qui consiste à arrêter une armée entière en plein combat chaque jour à 5 heures pour boire de l'eau chaude. Considérant qu'une pause supplémentaire s'ajoute deux jours sur cinq, il ne faut pas exagérer, les week-ends sont tout de même importants, ce qui conduit inévitablement à la défaite de l'armée bretonne. On découvre également ce qui deviendra plus tard les célèbres pubs proposant ici de la cervoise tiède et le sanglier bouilli à la sauce à la menthe, ce qui laisse Obélix plus que perplexe. « Ils sont fous ces Bretons ! »


- Allez, les deux gros, là !... Allez !... Hips !... Battons-nous !
- Il n'y a pas deux gros, il y en a un seul et il n'est pas gros.

Le mode de vie particulier des Bretons offre à nos deux Gaulois préférés l'occasion de découvrir d'autres aspects étranges, tels que la circulation inversée des chars, la mesure des distances en pieds qui est incompréhensible, les quartiers résidentiels uniformes avec un sens de la communauté du voisinage très particulier, ainsi que l'attention méticuleuse portée à l'entretien des pelouses à l'anglaise, exigeant une certaine rigueur. « Ils sont fous ces Bretons ! » En explorant davantage, ils découvrent des bâtiments qui ont aujourd'hui une grande importance, comme la Tour de Londinium, utilisée ici comme prison où les Romains en prennent pour leur grade, ainsi que le tunnel sous la Manche. Ils sont également confrontés à d'autres éléments caractéristiques de la région, tels que le temps brumeux et pluvieux, qui mettent en valeur les fameux parapluies. Toutefois, ce qui surprend le plus nos deux amis est le célèbre flegme britannique, qui se manifeste à travers des réactions calmes et stoïques, agrémentées d'un humour très étrange. Quoique les femmes se révèlent beaucoup moins impassibles, allant même jusqu'à déclencher des émeutes lorsqu'elles sont confrontées à des bardes caricaturant les Beatles. « Ils sont fous ces Bretons ! » En bref, Goscinny et Uderzo nous régale ! L'humour est constant à travers une approche aussi subtile que d'autrefois bien plus gras. L'action est généreuse, à travers des séquences que l'on a déjà eu l'occasion de voir dans les tomes précédents mais qui ont le mérite de nous maintenir en halaine. La quête des tonneaux de vins pour la récupération du tonneau contenant la fameuse potion magique est bien menée. Deux passages me plaisent particulièrement dans ce huitième tome. Tout d'abord, le célèbre match qui préfigure le rugby, opposant les équipes de Camulodunum et de Durovernum, dévoilant un sport où presque toutes les tactiques sont permises, et où nos malheureux Romains vont rencontrer de sérieuses difficultés. Un sport qui enchante Obélix : « Il faut introduire ce joli jeu en Gaule ! » En parlant des Romains, mon autre chapitre préféré de loin est celui où ils doivent goûter tous les tonneaux de vin pour trouver celui contenant la potion magique. Cette scène est garantie de fous rires en voyant les Romains complètement ivres faire n'importe quoi, d'autant plus que même Obélix, habituellement sobre et buvant du lait de chèvre, devient incontrôlable sous l'effet de l'alcool, qui se révèle être sa véritable kryptonite.


Les illustrations d'Albert Uderzo démontrent une qualité indiscutable dans cet ouvrage, à la fois au niveau du trait et de la colorisation. Les scènes nocturnes sont particulièrement bien mises en valeur, avec des contrastes qui accentuent la noirceur mystérieuse de manière très efficace. De plus, les dessins regorgent de détails en arrière-plan, bien plus que d'ordinaire. Ces petits éléments sont très appréciables, d'autant plus qu'ils peuvent avoir une signification, comme en témoigne la découverte de l'intérieur de la maison d'Astérix, où l'on peut apercevoir sur une étagère des objets servant de rappels aux tomes précédents. Du côté des personnages, Astérix reste fidèle à lui-même, faisant preuve une fois de plus d'un esprit vif et ingénieux. Il mettra habilement ces qualités à l'épreuve pour résoudre le problème de l'invasion du village breton par les Romains, malgré l'absence de potion magique. Astérix réussit à convaincre à la fois les Romains et les Bretons qu'ils ont consommé de la potion magique, alors que ce n'est pas le cas. De plus, cette ruse entraînera involontairement la création du thé, qui remplacera l'eau chaude habituelle. Trop fort, Astérix ! Obélix reste une fois de plus extrêmement attachant, se manifestant comme toujours en tant qu'élément perturbateur qui me divertit énormément. Sa personnalité se développe davantage pour mon plus grand plaisir. Il ne se limite plus à jouer le rôle secondaire d'Astérix, mais atteint un statut équivalent à celui-ci. Il est surprenant de constater que son loyal compagnon, Idéfix, ne prend pas part à l'aventure et reste au village gaulois aux côtés de Panoramix. Jolitorax joue le rôle d'un compagnon divertissant, aidant nos héros à découvrir le monde breton. Du côté des antagonistes, les Romains occupent une fois de plus une place importante avec des personnages très comiques, en commençant par le duo Tullius Stratocumulus et le capitaine de sa galère romaine. Bien que comique, ce duo n'est pas à sous-estimer, car ils sont responsables d'une des rares victoires romaines contre les Gaulois en détruisant le fameux tonneau contenant la potion magique. Le gouverneur romain Caius Roideprus s'avère également amusant, tout comme le malheureux Décurion qui passe un mauvais moment lors du fameux match de rugby. Les pirates, nos compagnons éternellement malchanceux, sont de retour, pour mon plus grand plaisir.


CONCLUSION :


Astérix chez les Bretons, concocté par René Goscinny et illustré par Albert Uderzo, présente une aventure rafraîchissante très plaisante à lire. À travers un humour teinté de british, parsemé de nombreux clins d'œil amusants, le récit est ponctué de rebondissements captivants. On s'amuse et on se délecte de cet album, qui se distingue par son approche ironique des caractéristiques de nos chers amis anglais. L'ingéniosité de Goscinny et le talent artistique d'Uderzo se combinent pour créer un album divertissant et mémorable, où l'humour et l'aventure se mêlent harmonieusement.


Moralité : Pour connaître l'origine et la qualité d'un vin, il n'est pas nécessaire de boire le tonneau entier.


- C'est ça le rieur sanglier ?... Il n'y a pas de quoi rire !
- Obélix, mange et ne fais pas de commentaires ! En Bretagne, il faut faire comme les Bretons !
- Mais, bouilli avec de la sauce à la menthe, Astérix !... Pauvre bête !...
B_Jérémy
9
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le 17 févr. 2024

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Ugly
10

A very good album, n'est-il pas ?

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