Infernales Poursuites de Poisses Electrisantes


Voilà du revival gore plein d'humour et de talent !



DoggyBags est un projet porté par Run au sein de l'excellent Label 619 et qui se propose de redonner ses heures de gloire aux mythiques Contes de la Crypte et autres terreurs visuelles pour adultes avertis qui apprécient les ambiances glauques, borderline, et où l'humour macabre se taille la part du loup. Au programme de chaque numéro, trois histoires courtes autant qu'intenses, chargées de sang et d'angoisses tendues comme une corde de pendu. Et pour ce premier numéro, Run appelle à ses côtés les talentueux Guillaume Singelin et Florent Maudoux.


C'est Guillaume Singelin qui ouvre les hostilités avec Fresh Flesh & Hot Chrome au cours d'une



saisissante poursuite nocturne :



une explosive et encore invisible menace pousse une jeune fille à fuir les festivités où elle tentait de s'oublier. Bientôt le clan des Lupus Bikers est à ses trousses, une meute de motards sauvages façon Sons Of Anarchy constituée de lycanthropes pour qui la propriété et l'appartenance ne sont pas de vains maux.



Mieux vaut vivre un jour comme un loup que cent comme un chien.



L'artiste fait preuve d'un sens du détail impressionnant sous le trait fin qui s'exprime dans la densité.
Les grands espaces naturels et boisés de l'Oregon bruissent magnifiquement sous la lueur de la pleine lune, et le jeu des contrastes imprime dans sa trace un dynamisme rare où filent les lumières des phares lancées dans la nuit. Si le scénario parait un poil léger, le montage impeccable embarque le lecteur sans répit dans l'élan bestial de la formidable course poursuite qui nous est offerte là à croquer.


Suit alors Masiko de Florent Maudoux, claque féministe d'émotions où les références cinématographiques foisonnent sous le tranchant des lames de l'héroïne.



Profite bien de l'enfance, Petit-Panda. Maman t'a préparé une vie
bien craignos...



Nombreux clins d'oeil aux mangas dans l'exagération des expressions autant que dans le montage serré, dense et, encore une fois, extrêmement dynamique. Des triades urbaines impitoyables, une tueuse professionnelle décidée à protéger sa progéniture, une touche de fantastique animal, la détermination d'une mère et les implications sanglantes d'une vendetta prise à revers, une parenthèse de séduisante passion, Florent Maudoux déploie là l'étendue de ses talents graphiques avec un dessin léché au coeur de superbes ambiances aux néons colorés pour dresser sur le vif



le portrait d'une héroïne forte



dont on espère, à la clôture du récit, avoir d'autres nouvelles rapidement !


Run boucle le show sous le soleil lourd du désert frontalier d'un Arizona peuplé de vautours : Mort ou Vif c'est



l'ultime course poursuite de l'erreur et de l'ordre



où l'on ne sait plus très bien distinguer l'un de l'autre. Une patrouille se fait défoncer à l'entrée d'une station service paumée par un braqueur quasiment pris en flagrant délit. Si l'un des deux flics reste sur le carreau, l'autre en fait une affaire personnelle :



L'odeur du sang a réveillé mes instincts de prédateur.



Au-delà du scénario et des personnages entiers, caricatures vibrantes et suantes de réalité glauque, le dessin de Run ne peut que séduire : méticuleux dans les déformations de gueules sordides, pointilleux dans la sécheresse des décors, et idéalement cinégénique grâce à l'alternance riche des valeurs de cadre. Le désert américain assèche les papilles et le gore gicle ses sanglantes soifs autour de la descente aux enfers d'un petit nazillon qui ne peut échapper à la surveillance des charognards : superbe saillie de Run qui éructe là son amour du comics, de l'ouest et des pires caricatures du rêve américain !


Si vous ne l'avez pas compris, j'ai tout grignoté jusqu'à l'os !



DoggyBags c'est pas pour les chiens mais bien pour les coyotes :



concentré d'hémoglobine lancé à cent à l'heure à travers la désolation lugubre d'un monde gangréné, baisers monstrueux d'haleines fétides, l'enfer de courses poursuites suintant d'adrénaline où les suées conduisent l'électricité poisseuse d'angoisses sous les désirs illusoires de liberté...
Jetez-vous dessus, ce sera toujours ça que les galeux n'auront pas !

Matthieu_Marsan-Bach
8

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Zombies, Label 619, Les meilleures BD éditées par Ankama et Bestiaires Diaboliques et Enragés

Créée

le 22 janv. 2018

Critique lue 169 fois

Critique lue 169 fois

D'autres avis sur DoggyBags, tome 1

DoggyBags, tome 1
jerome60
7

Born to be wild

Doggy Bags est inspiré des Double Feature, ces séances de cinéma typiques des années 70 où l'on pouvait voir deux films de série B pour le prix d'un. Les références plus récentes sont apparemment à...

le 16 févr. 2011

11 j'aime

2

DoggyBags, tome 1
Bastenix
8

Critique de DoggyBags, tome 1 par Bastenix

Trois nouvelles, "à l'ancienne", trash, sombre, qui sentent la sueur, la poudre et l'huile de moteur : Une première nouvelle toute en rythme, très contemplative, qui m'a un peu laissé sur ma...

le 11 mars 2011

6 j'aime

1

DoggyBags, tome 1
Ouaicestpasfaux
7

Courts mais bons ?

Si la qualité des 3 récits proposés est indéniable, le format court ne m'a pas forcément convaincu. La maestria de la mise en scène de Singelin est quelque peu gâchée par une fin abrupte légèrement...

le 13 mai 2013

4 j'aime

Du même critique

Gervaise
Matthieu_Marsan-Bach
6

L'Assommée

Adapté de L’Assommoir d’Émile Zola, ce film de René Clément s’éloigne du sujet principal de l’œuvre, l’alcool et ses ravages sur le monde ouvrier, pour se consacrer au destin de Gervaise, miséreuse...

le 26 nov. 2015

6 j'aime

1