Dragon Ball
8.1
Dragon Ball

Manga de Akira Toriyama (1984)

C’est parti pour un article qui va me faire plein de copains. Parce que si Dragonball est un shōnen culte dont il m’est impossible de nier la place et l’influence, il n’est pourtant pas dénué de défauts et c’est ce que nous verrons dans ce billet.


Quiconque s’est approché de près ou de loin des manga/anime (ou a grandi à l’époque du Club Do’) connaît forcément Dragonball ne fut-ce que de nom. D’ailleurs quasi tout le monde connait Dragonball, même ma grand-mère connaissait Goku. C’est sans doute le manga multi-générationnel, le plus connu, plébiscité et diffusé encore actuellement. Sans compter les 1000 suites, films, spin-off’s, jeux vidéos etc.


Donc quasiment tout le monde connait et surtout c’est surement un des titres les plus connus, cités et qui récolte le plus d’avis dithyrambique chez les amateurs de manga/anime. Et c’est aussi généralement le titre qu’on te cite comme étant « un perfect », « le titre avec 0 défauts », « le GOAT y’a pas de débat ». Et quand tu demandes a ces gens qu’est ce qu’il aime le plus dans Dragonball, 8 fois sur 10, la réponse sera ; les combats. Et généralement ils ne parlent que de l’animé Dragonball Z (ou pire, Super) et pas du manga d’Akira Toriyama. Parfois ils ne savent même pas qu’il existe une partie avant Dragonball Z.


Ce billet ne s’adresse pas a eux. Mais ils sont les bienvenus quand même…


Car ici je vais parler du manga Dragonball dans sa globalité, de ses qualités, de son inventivité et des raisons de son succès oui, mais aussi et surtout de ses défauts, de sa redondance, de ses facilités et des raccourcis scénaristiques utilisés, bref des sujets qui ne font pas plaisir mais qui doivent être dit, donc un minimum d’ouverture d’esprit est requis.


Alors j’aime beaucoup la série, comme beaucoup elle occupe une place a part lié à l’enfance, mais faut avouer que des défauts y’en a un paquet quand on prend du recul. En plus je fais partie de ces hérétiques qui préfèrent la partie Goku enfant à la partie Saiyen qui pour moi cristallise tous les défauts de la série.


Autre chose, chuis vieux, j’ai été nourri au Club Do’, donc familièrement j’emploie des termes de l’époque comme Goku, Saiyen etc. que je mélange joyeusement avec des termes originaux tout au long de ce billet. Et j’en ai rien à foutre, donc les puristes ça ne sert à rien de me corriger. J’insiste, CA NE SERT A RIEN.


Et pour finir, si vous n’avez jamais lu ou vu Dragonball, vous risquez de pas comprendre grand chose, car un minimum de connaissance de l’œuvre est requis pour aborder ce billet et surtout vous risquez de vous prendre quelques spoils.


Vous voilà prévenu!


Posons les bases et commençons par le commencement:


Nous sommes en 1984 et Akira Toriyama vient de conclure Dr Slump qui a connu un immense succès et qui a fait de lui une star. Fin 1984 il attaque sa nouvelle série et le premier chapitre de Dragonball parait dans le Weekly Shônen Jump .


Après Dr Slump, Akira Toriyama reste dans la comédie et propose cette fois un titre qui est une parodie d’un classique de la littérature chinoise classique connu dans tout l’Orient : Le voyage en occident/La pérégrination vers l’Ouest. Et Toriyama fait simple et reprend quasiment à la lettre les éléments principaux du roman pour construire sa trame et ses personnages.


Son Gokû par exemple est la prononciation japonaise du nom du roi des singes du roman, Sun Wukong. Et si dans le roman, les héros recherchent des écritures sacrés, dans Dragon Ball, ils recherchent sept boules de cristal, les dragonballs. Goku possède d’ailleurs un bâton puis un nuage magique exactement comme Sun Wukong. Dans le roman Sun Wukong accompagne et protège dans sa quête, Xuan Zang un moine bouddhiste, ici Goku accompagne et protège Bulma. Mais c’est pas tout, le rôle du voleur tenu dans le roman par Sha Wujing est ici attribué à Yamcha qui nous est d’abord présenté comme un brigand du désert. Sun Wukong est accompagné dans son périple du général Zhu Wuneng, un cochon anthropomorphe qui possède 36 métamorphoses différentes, rôle tenu dans Dragonball par Oolong…


Plusieurs des premières histoires de Dragonball sont d’ailleurs basées sur le roman, à la limite du copier/coller, comme l’épisode d’Oolong et des villageoises kidnappées, ou l’épisode de l’incendie du château de Gyumao et le passage de l’éventail. Gyumao est d’ailleurs aussi un personnage issu du roman…


Bref, on peut pas dire que Toriyama se soit foulé à ce niveau. Pourtant la sauce prend en grande partie grâce au génie et au talent comique de Toriyama et à l’humour omniprésent mêlé à l’action et au rythme soutenu de la série. Le résultat est frais, c’est marrant et un peu pipi-caca sur les bords, y’a de l’action, de l’aventure, du mystère, un objectif clair, bref, tous les ingrédients d’un bon p’ti shonen. En même temps, Dragonball récupère une bonne partie du lectorat de Dr Slump, car le ton des deux séries est assez similaire. Et les personnages ne sont pas étrangers à l’alchimie du titre car Toriyama à un vrai talent pour créer des personnages attachants, expressifs et les faire interagir entre eux. Il l’a montré et prouvé tout au long des 15 tomes de Dr Slump et dans Dragonball, il se sert de tout ça pour nourrir sa trame et ses personnages. Il introduit la Team Pilaf, des antagonistes plus ridicules que vraiment méchants et la conclusion du 1er arc ressemble dans un premier temps à un gros troll avec cette histoire de culotte. Avant que Bulma, Yamcha et cie se rendent compte que même si le dragon sacré n’a pas exaucé leurs vœux, ils ont dans le fond obtenu ce qu’il souhaitait.


Tout est bien qui fini bien…


Oui et non… Car tout n’est pas rose pour Dragonball. En effet si la série est aujourd’hui un succès indiscutable, au début, et bien ça marche pas super bien, surtout comparé au chiffres de Dr Slump. Le mélange roman classique chinois et arts martiaux à la Jackie Chan, mêlé de personnages tirés de mythes asiatiques ou de la culture populaire largement saupoudré d’une bonne dose d’humour pipi-caca ne prend pas vraiment et ce 1er arc ne déchaine pas les foules. En plus tout retombe d’un coup après l’apparition de Shenron et le public lâche le titre.


Pour relancer la série, Kazuhiko Torishima, le Tantō de Toriyama (et accessoirement celui qui l’a révélé) décide d’utiliser des poncifs du shōnen, très à la mode dans les titres de l’époque; la session d’entrainement et surtout le tournoi. Ça a lancé ou relancé des tas de séries, pas de raisons que ça ne marche pas.


Toriyama découpe cette relance en 2 phases distinctes, en isolant dans un premier temps Goku du reste de l’équipe pour recentrer la série. Goku part donc s’entrainer et le résultat de son entraînement est dévoilé dans ce qui va devenir un pivot et un point de repère du titre; Le tournoi des arts martiaux ou Tenkaichi Budokai. Car cet arc du tournoi est un vrai carton auprès du public et c’est lui qui popularise et installe définitivement la série. Et lui donne une nouvelle direction... En même temps y’a tout ce qu’il faut niveau action et combat, Toriyama insuffle ce qu’il faut d’humour et d’intrigue avec notamment le personnage de Jackie Choun. Bref, ce Tenkaichi Budokai est un succès et le public en redemande. Et ce qu’il veut, clairement, c’est de la baston.


Et si ce tournoi devient le point pivot de la saga, pour moi il va aussi devenir un des défauts majeurs de Dragonball. Pourquoi défaut majeur? Si on analyse froidement la chose, on constate que quasi tous les arcs de la série (et globalement toute la série) sont montés autour du Tenkaichi Budokai, qui va dès sa première apparition installer le schéma narratif perpétuel de DragonBall.


Car on peut vulgairement résumé la construction de tout Dragonball post Tenkaichi Budokai comme suit :


Introduction contexte et ennemi(s)
1er contact, combat et généralement petite défaite (d’un ou de plusieurs des héros)
Entraînement ou assimilé (+Power-Up)
Divers combats et avancé de l’intrigue
Combat final d’abord en mêlé puis en 1 VS 1
Conclusion
Le tout entrecoupé du Tournoi des Arts Martiaux


Et il peut même y avoir un tournoi pendant l’arc, comme dans les arcs Baba la Sorcière ou Cell. Le tournoi sert aussi de point de départ quasi identique pour les arcs Roi Piccolo et Buu.


Les tournois vont donc devenir une récurrence de la série et tout le manga sera construit autour en répétant inlassablement le même schéma. D’ailleurs, sur quoi se conclu le dernier tome? Un tournoi. Et de quoi est composé une bonne partie de Dragonball Super? Un tournoi.


Mais surtout on remarque qu’après l’arc du Ruban Rouge, Dragonball est construit de manière empirique arcs après arcs, autour du tournoi, sans réelle projection dans le futur. Toriyama lie avec le passé au besoin (Dr Gero P.Ex) mais ne projette pas son histoire sur le long terme. Goku n’a plus d’objectif à accomplir, désormais, il « subit » ces aventures plus qu’il ne les vit.


La construction interne des arcs aussi est impactée par cette redondance. Combien de fois on a vu Goku galérer et perdre une première manche avant de revenir? Combien de fois on a vu les potes à Goku gagner du temps avec le boss pour que Goku puisse gagner un power-up ou exécuter une technique quelconque? Alors oui, c’est présenté différemment à chaque fois, mais si on gratte un peu on constate que l’emballage est différent mais que le contenu est le même. Passons sur les classiques du genre comme l’ennemi qui devient un allié fidèle qui ponctuera l’œuvre tout du long, mais qui reste un incontournable du shōnen nekketsu.


Okay, tout ça, c’est pas l’apanage de Dragonball, et pas mal de titres usent de ces schémas, particulièrement dans les années 80-90, mais en regardant de plus près on remarque que TOUT Dragonball est construit de la même façon et que les arcs narratifs reproduisent quasiment tous identiquement le même schéma. Et pourtant ça fonctionne…


Plusieurs facteurs rentrent en ligne de compte pour expliquer cela. En 1er lieu la construction des shōnen nekketsu de 80’s qui malgré leurs qualités, ont presque tous le même défaut: leur construction globale. En effet, c’est généralement dans le ou les 1er gros arc(s) narratif(s) que la série atteint son paroxysme et ou tout est mis en place, une fois que c’est fini, bien souvent la suite n’est que digressions ou resucées avec de nouveaux ennemis/enjeux. Saint Seiya en est un parfait exemple. Tout ou presque est fait dans l’arc de La bataille du Sanctuaire que ce soit en matière de techniques ou d’epicness. La suite n’est grosso merdo qu’une resucée de cet arc avec plus ou moins d’originalité et surtout beaucoup de surenchère niveau ennemis, pouvoirs, power-up. Et pas mal de séries de la même époque comme Dragonball souffrent de ce défaut car cette construction est typique des shōnen nekketsu du Jump dans les années 80.


Pourtant comme le 1er arc de Dragonball, n’est pas un carton, c’est clairement le 2e arc avec l’entraînement et le tournoi qui pose la série, l’arc Pilaf prenant la fonction de prélude, de test. Et c’est a partir de ce 2e arc ou Toriyama s’éloigne sensiblement de l’histoire du roman et qu’il crée ce schéma narratif et cette construction des arcs autour du Tenkaichi Budokai qu’il finira par user jusqu’à la corde…


En effet, dans les années 80-90, on est en plein age d’or du Jump, les hits sortent à la pelle. Et on est en pleine mutation du Jump et en plein « formatage » des séries du magazine pour en faire des hits calqués sur le même modèle a succès. Dragonball n’y échappe pas et le truc qui a propulsé la série, c’est le tournoi des arts martiaux et en particulier les combats de celui-ci. Les retours des lecteurs via les sondages sont clairs. Et le Jump livre toujours a ses lecteurs ce qu’ils ont plébiscité et ce qu’ils veulent lire (et surtout acheter). La série et Toriyama mettent le doigt dans un engrenage qui va les marquer durablement…


Car Toriyama n’est pas seul aux commandes et il doit rendre des comptes, surtout avec un titre qui marchotte. Dans un entretien, Kazuhiko Torishima le 1er Tanto de Toriyama sur Dragonball, reconnaît que pour relancer la série qui ne décollait pas vraiment après l’arc Pilaf, il a décidé de faire de Dragonball « une œuvre sans substance » et de simplifier la série au maximum. C’est lui qui a l’idée de la session d’entraînement et surtout du tournoi qui sera un carton et qui imposera le titre. Et dans cet entretient, il reconnait aussi s’être inspiré de Hokuto no Ken (la série la plus populaire à l’époque) et sous son influence, on constate que Toriyama, introduit des personnages plus durs et sombres, comme l’armée du Ruban Rouge et ses généraux, Tao Pai Pai le tueur, qu’il axe de plus en plus la série sur les combats et surtout qu’il gomme petit à petit, le coté loufoque voir ridicule du début. Et les sondages de popularité de la série lui donnent raison. Mais c’est clairement l’arc du Roi Piccolo qui marque un vrai tournant dans l’œuvre, avec la première mort emblématique d’un personnage principal et l’arrivée d’un antagoniste réellement puissant, cruel, sadique et sans scrupules, bien loin de Pilaf ou du Ruban Rouge. Et Toriyama continuera sur cette voie tout au long de la série, quitte a basculer dans la surenchère. On y reviendra.


Il y a aussi une autre raison qui pourrait expliquer en partie cette répétition des arcs narratifs et de certains éléments de l’intrigue. Car il faut savoir que Toriyama a conclu plusieurs fois la série. Ou plutôt voulu conclure la série. Tous les fans de Dragonball savent que Toriyama voulait conclure après l’arc Cell. Et ca se tient, on bouclait la boucle avec le Ruban Rouge, il y avait un magnifique passage de relai entre Goku et Gohan, le futur était sauvé. Mais sous la pression de ses éditeurs et de la Shueisha (et sûrement un gros chèque) Toriyama poursuit la série. Mais ce qu’ont sait moins ce que la série avait déjà eu une conclusion à la fin de l’arc Roi Piccolo, plus précisément à la fin du tournoi quand Goku part avec Chi-chi pour respecter sa promesse de l’épouser. Ce qui faisait le lien avec le 1er arc et concluait la série de belle manière. Mais pression éditoriale oblige, dans les deux cas, Toriyama continue. Donc pourquoi se casser le cul quand on fait un truc sans réelle envie ou motivation? Autant recycler des schémas éprouvés…


Tous ces élément mis ensemble peuvent expliquer cette redondance permanente et cette facilité scénaristique dans la construction des intrigues, avec le Tenkaichi Budokai en point pivot de tout.


Pourtant malgré ou à cause justement de cette redondance et surtout de cette simplification du récit en l’axant principalement sur l’action et les combats, Dragonball devient un succès dès le 1er Tenkaichi Budokai. Et la série n’a pas fini de faire parler d’elle…


Nous sommes désormais en 1989 et Toriyama va attaquer la seconde partie de son manga, la partie Goku adulte et père et ce qui va devenir la marque de fabrique de la série: les saiyens. Mais comme on l’a vu plus haut Toriyama n’avait pas vraiment prévu d’aller aussi loin, et pour faire basculer son récit dans la SF et lui donner une nouvelle direction, il va devoir justifier un paquet de trucs qu’il a mis en place dans la première partie. On va donc tomber dans les facilités scénaristique, car Toriyama respecte toujours la simplification des intrigues au service de l’action et de l’avancée de l’histoire. Donc on va faire simple, c’est des extra-terrestres. Goku, Piccolo, le Tout Puissant, tous ces personnages aux pouvoirs extraordinaire passent de terriens ou démons a extra-terrestre. La queue de singe de Goku ne vient plus du roman chinois mais devient un attribut de sa race, les saiyens. Sa force et sa facilité au combat sont aussi liés a ses origines, son tempérament pareil.


D’ailleurs Toriyama emploiera souvent des raccourcis scénaristique pour ne pas ralentir l’intrigue. Goku doit être mis au courant d’une situation, hop il sait lire dans les pensées, il faut un vaisseau spatial, hop il reste celui du Tout Puissant, on est blessé, hop des haricots magiques, il faut une capsule pour s’enfuir de Namek, hop il reste celle du commando Ginyu, les exemples sont nombreux…


Pourtant même s’il s’écarte de la trame du roman chinois, Toriyama continue d’emprunter des éléments à d’autre œuvres pour construire son oeuvre. En effet difficile par exemple de ne pas faire le rapprochement entre l’arrivé sur terre de Goku et celle de Superman. Tous deux a bord d’une capsule et pour chacun la même raison. Superman a été envoyé pour être sauvé de la destruction de sa planète, Goku a été envoyé sur terre pour la même raison. Dans les combats partie Saiyens, on peut aussi trouver des emprunts au cinéma et particulièrement aux Westerns spaghetti de Sergio Leone. Les plans serrés sur les regards ou les actions, suivi de plan large permettant d’avoir une vue d’ensemble de la scène, les faces à faces, les paysages désolés etc. tout ça fait inévitablement penser au cinéma de Sergio Leone. Et en y regardant de plus près on peut trouver de nombreuses références et emprunts tout au long de l’œuvre…


En démarrant cette seconde partie, Toriyama balaie d’un revers de la main, quasi tout ce qu’il a précédemment mis en place. Tout, sauf l’Univers, les personnages, les sept boules de cristal et evidemment le Tenkaichi Budokai.


Pourtant si les boules de cristal étaient le point de départ de l’aventure et le coeur de quelques arcs, elles vont perdre leurs rôles moteur pour devenir au final, une espèce de simple bouton reset de fin d’arc et un peu « la solution à tous les problèmes ». Ca permet évidemment de repartir à zéro pour l’arc suivant et donc de continuer a répéter le même schéma, mais surtout ça pose la question de l’impact et de l’importance de la mort dans Dragonball, car avec les dragons sacrés et leurs pouvoirs, la mort n’est plus définitive et donc la disparition des protagonistes perd clairement en impact. D’ailleurs quelqu’un pour me rappeler combien de fois Goku et Krilin sont morts? Et même si ce n’est pas via les boules de cristal que nos héros reviennent, c’est via une permission spéciale d’Enma qu’ils reviennent du royaume des morts.


Car plus la série avance, moins la mort des protagonistes à d’impact émotionel. Car avouons le, on y a tous pensé durant un combat et on s’est tous dit « bah, au pire y’a les boules de cristal ». Surtout après que celles de Namek soient entrées dans la danse…


Pourtant malgré ce quasi reboot de la série, Toriyama ne sort pas de son schéma narratif établis. Au contraire il persiste et signe et en plus d’utiliser cettre trame répétitive, il nous sert tout au long de la série des antagonistes qui appuierons encore sur cette redondance narrative. Car en réfléchissant 2 minutes on s’aperçoit que tous les méchants de la série ont depuis le début, grosso merdo le même objectif; devenir Maître du Monde/Univers ou le détruire. Avec les boules de cristal et la jeunesse eternelle en bonus pour certains.


Si on résume: Pilaf veux devenir Maître du Monde, le Général Red voulait dominer le Monde pour plus qu’on ne se moque de sa taille, Roi Piccolo désirait la jeunesse éternelle pour imposer son joug sur le Monde, Freezer voulait carrément dominer l’Univers, Cell fini par vouloir le détruire, Buu pareil. Et Goku et ses potes sont là pour les en empêcher.


Bref, quand on met tout ça à plat, faut avouer que c’est pas très varié dans le fond comme dans la forme…


Mais dans ce cas comment et pourquoi Dragonball s’est imposé comme un incontournable, plébiscité et adulé depuis plus de 30 ans? Ce qu’il faut comprendre c’est que la vraie force et les qualités de Dragonball ne se trouvent pas dans l’histoire développée qui est somme toute très simple et manichéenne (et qu’on pourrait basiquement résumé à un méchant à stopper) ou dans sa narration qui on l’a vu est linéaire et redondante. Non, la vraie force et le truc qui fera de Dragonball un incontournable et un classique c’est son dessin et surtout la manière dont Toriyama aborde les combats.


Je m’explique:


Comme dit au début du billet, ce que la plupart des gens retiennent de Dragonball ce sont les combats. Et ils ont raison! Car c’est ça la vraie force et la révolution de la série, ses combats et particulièrement comment ils sont racontés, dessinés, retranscrits et construits. En particulier le découpage de l’action qui est vraiment la révolution et la principale qualité de Dragonball. Car Toriyama en plus d’une vraie inventivité à ce niveau, possède une vraie capacité a exploiter l’espace de ses planches de manière tridimensionnelle et pas en plan fixe comme c’est le cas à l’époque. Par moment on a l’impression que les personnages sortent des planches. Il emploie aussi des découpages et des cadrages cinématographiques qui appuient encore cette sensation d’immersion et de fluidité. Le fait, de faire se dérouler les combats dans des paysages désolés et vides permet aussi de centrer tout sur l’action et le déroulé du combat. Toriyama révolutionne clairement la manière de construire et montrer un combat et le déroulement de ceux-ci. Particulièrement dans la seconde partie de la série et ce qu’il avait commencé a mettre en place dans les 2 premiers Tenkaichi Budokai, il le sublime et en fait finalement le cœur et le sel de l’œuvre. Et comme la série se concentre désormais quasiment uniquement sur les combats, un soin particulier est apporté a ceux-ci, a leur lisibilité et a leur fluidité. Car pas question pour Toriyama d’expliquer a posteriori le déroulé d’une action.


Un combat dans Dragonball, ça se regarde, ça s’admire, ça se vit mais ça ne s’explique pas !


Et tout ce génie et toutes ses trouvailles mise en place par Toriyama dans son manga, seront sublimés dans l’anime Dragonball Z avec le succès qu’on lui connait.


Pourtant, certaines des trouvailles les plus originales de Toriyama l’ont été par facilité, limite par fainéantise. Comme les cheveux des saiyens qui ne sont plus noirs quand ils se transforment afin d’économiser du temps d’encrage. Les décors désolés ou les explosions dans les combats ont aussi été utilisés en nombres, pour gagner du temps sur le dessin et l’encrage.


Mais même s’ils sont somptueux et inventif, dire que Dragonball repose uniquement sur ses combats et l’action serait un peu réducteur. L’action pure, pour que ça marche pleinement il faut des personnages charismatiques et bien écrits sur lesquels la faire reposer. Et depuis Dr Slump, Toriyama sait créer des personnages et gérer les interactions entre ceux-ci. Outre le noyau dur de base, depuis le début de la série, il a créer une palette de personnages variés qui sont venus nourrir le récit. Mais son plus beau coup reste surement la rivalité/amitié entre Goku et Végéta qui fera des émules, dont le plus connu reste sûrement le duo Naruto/Sasuke. Sans oublier des antagonistes charismatiques et détestables à souhait comme Freezer et sa clique ou Cell et toute une batterie de personnages secondaires qui viendront nourrir le récit tout du long donnant tantôt la touche de sérieux nécessaire, tantôt la pointe d’humour bienvenue au milieu de tout ces combats.


Et c’est sur cette alchimie subtile entre combats et personnages, bien plus que sur l’histoire ou la construction de celle-ci que repose vraiment Dragonball. Et qui en a fait un succès.


Néanmoins le tempérament guerrier, entier et égoïste qu’il donne a Goku avec ce coté « je veux affronter des adversaire forts à tout prix » quitte a mettre tout le monde en péril, même si ca à un coté cool, ça va dans un sens bloquer Toriyama et contribuer à la surenchère permanente de la seconde partie de la série…


Car cette deuxième partie en particulier, quand on gratte, c’est juste une surenchère et du power up permanent d’arc en arc et de combat en combat. C’est de l’action pure très bien menée, inventive et super efficace oui, mais dans le fond c’est creux. C’est là, qu’on se rend bien compte que la partie Saiyen par rapport a la partie Goku enfant est objectivement beaucoup moins riche narrativement parlant. Là où on suivais Goku a travers 1000 paysages dans des aventures folles (Pilaf, Baba la sorcière, Le Ruban Rouge etc.) on se retrouve a suivre une succession de combats dans des paysages désolés où qui vont rapidement le devenir… Paradoxalement c’est pourtant cette seconde partie qui a le plus de succès. Mais je pense perso que l’arc qui a poussé le bouchon le plus loin niveau surenchère, c’est l’arc Buu. Entre les fusions diverses avec ou sans Potalas, le M, les Kaios, le retour du monde des morts, etc. Toriyama savait plus quoi inventé pour justifier les power-up’s et se dépatouiller du « monstre » qu’il avait créé. Car cet arc c’est la quintessence de la surenchère de la puissance mais surtout un parfait exemple des limites de cette réutilisation permanentes des mêmes ingrédients et la surenchère inévitable qui lui est lié..


Résultat; Cet arc est brouillon et mal fichu au possible et entre les fusions et les absorptions par Buu et ses modifications, il faut limite un tableau pour suivre qui est quoi et dans qui? En plus -et en trollant à peine-, au fil des arcs et de ses power up’s permanents, Goku en devient presque le perso le plus cheaté de l’histoire du shônen nekketsu.


Comme j’ai dit, impossible de nier les qualités et l’inventivité de Toriyama dans la gestion des personnages et des combats de la seconde partie de Dragonball mais c’est quasiment tout. Niveau histoire, y’a rien dans le fond. Ce que je retiens surtout de cette partie à part les combats qui restent objectivement somptueux pour la plupart, c’est la rivalité Goku/Vegeta et quelques personnages qui sortent du lot comme le commando Ginyu avec les poses super Sentai, ou les quiproquos récurrents avec Mr Satan, histoire de rire un peu et de retrouver l’esprit des débuts. Mais on est très (trop) loin du Dragonball riche et inventif des débuts, même si Toriyama nous gratifie encore de quelques touches d’humour comme à l’époque…


Alors pourquoi Dragonball a encore une telle aura à l’heure actuelle?


Plusieurs raisons a cela. Déjà, la série a été multi-reddifusé, y’a 1000 suites et spin-off’s encore actuellement sans oublier des jeux-vidéos, des figurines etc, ce qui fait que la série a quasiment toujours bénéficié d’une actualité quelconque qui la remettait en avant et tout ça, ajouté à ce que j’ai déjà cité plus haut (et d’autres trucs plus bas) et bien ça aide vachement a garder une œuvre au top et lui permettre de conquérir sans cesse une nouvelle audience.


Sans oublier, les qualités intrinsèques de la série et les innovations apportées par Toriyama évoquées plus haut et son influence durable dans le paysage shōnen. Le tout servi par des personnages inoubliables. Nombreux sont les titres, héritiers de Dragonball et malgré ses défauts, on ne peut nier son importance, son influence et sa place dans la culture manga et la Pop culture de manière globale.


Comme je l’ai dit, la plupart des gens connaissent d’abord Dragonball via son animé et Dragonball Z en particulier. L’animé est un hit du Club Dorothée ultra-populaire et multi-rediffusé et en plus d’avoir eu un impact considérable, il a bercé un nombre incalculable de gamins dans les années 90-2000 et pour beaucoup a été le déclencheur d’une passion. Ces gamins sont aujourd’hui devenus adultes et parents et comme mon père m’a fait lire ses bd’s, ces enfants bercés à Dragonball Z font découvrir cette série qui a bercé et rythmé leur enfance a leur propres enfants. Suite logique qui explique en grande partie ce succès multigénérationnel, les parents font lire/voir à leur enfants ce morceau de leur propre enfance. Et comme justement c’est un récit simple centré sur l’action et les combats, avec des enjeux clairs, des personnages aux rôles clairement définis et que le tout est placé dans un univers imaginaire mais similaire au notre, et qu’en plus c’est intemporel, forcément tout est en place pour que ça marche encore aujourd’hui…


Dans le même ordre d’idée, pour beaucoup Dragonball, c’est leur premier manga, le titre qui a donné gout et ouvert la porte d’un truc. Il occupe une place particulière, plus sentimentale et affective que réélement objective. Et qui souvent occulte les défauts car il renvoie -tel une madeleine de Proust- a une époque bénie ou on se calait devant le Club Do’ ou Mangas, Club RTL, AB1, MCM, RTL9, Game One etc. pour une vingtaine de minutes de bonheur. Et tout ça, ça joue sur la perception qu’on a d’une œuvre…


Attention, je ne dit pas que Dragonball est mauvais, je dis juste qu’il n’est pas dénué de défauts et qu’objectivement le plus gros de la série n’est dans le fond qu’un enchainement non stop de magnifiques combats servis par une palette de personnages charismatiques et bien écrit. Et qu’il y a des raisons logiques a son succès intemporel qui ne sont pas liés qu’à ses qualités.


Car paradoxalement, avec Dragonball, ses défauts en deviennent ses forces. Parce que c’est simple, manichéen et pas prise de tête, ça parle à tous le monde et c’est intergénérationnel pour les mêmes raisons… Et surtout, comme exposé plus haut, grâce a son inventivité, son génie et ses trouvailles graphiques, Akira Toriyama, à partir d’ingrédients très basiques a su sublimer le shōnen et le nekketsu en particulier au point d’en devenir une référence et un classique du genre.


Et le faire avec un titre qui a autant de défauts, c’est un coup de Maitre qui mérite de passer à la postérité!


En conclusion, Dragonball est et reste un excellent divertissement, une claque visuelle, des combats sublimes et de folies qui se sont imposés -a juste titre- comme des références, une révolution dans la manière de montrer un combat, mais à part ça et bien même en cherchant bien y’a rien ou presque. L’histoire tient sur un timbre poste, y’a zéro subtilité scénaristique, c’est manichéen au possible, en gros Dragonball c’est juste un manga de baston simple et bien bourrin, ultra bien foutu.


Et a un moment faut le dire, car voir passer éternellement les mêmes débats avec les même arguments à propos de Dragonball c’est soulant et bien souvent infondés (au moins en partie). Car après tout, comme le dit très justement Kazuhiko Torishima :



"there’s nothing you can learn by reading DragonBall. It’s not a lesson in life, it’s useless in our lives; it’s just a funny comic. And that’s fine! "



"il n’y a rien a apprendre en lisant DragonBall. Ce n’est pas une leçon de vie, c’est inutile dans nos vies; c’est juste une bande dessinée drôle. Et c’est déjà très bien!"



Et désolé, mais pour moi un très bon manga, un perfect, le GOAT, c’est pas que ça…


Sources: Dragonball 1 à 42, 9eme art, Wikipedia, Dragonballwiki, thedaoofdragonball.com, Akira Toriyama et Dragon Ball – L’homme derrière le manga.

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le 23 août 2020

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Vous avez aimé GTO et/ou Young GTO, Racailles Blues & consorts et en particulier les "racailles" qui en peuplent les pages ? Les loubards décolorés et leurs imposante motos ont toujours exercés...

le 20 juil. 2016

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