Frieren
7.3
Frieren

Manga de Kanehito Yamada et Tsukasa Abe (2020)

“...puisqu'un seul moment les efface?”

Citation de Jacques Bénigne Bossuet : “Qu'est-ce que mille ans, puisqu'un seul moment les efface?”


Cette critique est la deuxième partie de ma trilogie d'analyses effectuées entre l’œuvre Sousou no Frieren et le genre de la fantaisie. Il est donc préférable d’avoir lu la première partie au préalable. Vous pouvez la retrouver la partie 1 ici et la partie 3 là.


Notre histoire débute là où celle d’Himmel a commencé (et terminée) : sur les terres centrales, qui servent d’introduction notre histoire, portant entre autres les arcs introductifs de Fern et Stark (et de Frieren dans une moindre mesure avec l’épisode 1). Même si dangereuse par moment (exemple : attaque de dragons), la terre centrale est l’espace connu par les spectateurs ou l’impact du roi démon se fait le moins ressentir. Pour cette raison il concentre certains des moments les plus paisibles (parfois qualifiés d’ennuyeux) de l’intrigue, comme le nettoyage de la baie. C’est aussi dans cette région qu’on trouve la « Capitale Royale » qui a un nom aussi cliché que le roi démon, étant au même titre un piège à cliché du genre. A noter que malgré son titre extravagant le pouvoir de cet état semble limité à la région tout au plus car d’autres villes peuvent se targuer du nom de capital dans les contrées du nord. Cette impression est même visible par la taille de la cité qui est loin d’être la plus impressionnante de l’univers, on pourrait même la qualifier de « village de départ » à la pokémon car pour le groupe d’Himmel s’en est la fonction. Dans la liste des villes qui se la pète on a aussi la “Holy City of Strahl” ou la “Sainte Ville Rayonnante/de Rayon” en Français semble être la ville mère de la religion de la déesse, du peu qu’on en voit la version manga est beaucoup plus impressionnante. C’est dans cette ville qu’Heiter a fait carrière et a élevé Fern dans une maison aux alentours de la cité. On peut lui faire les mêmes reproches qu’à la capitale royale sauf peut-être en ce qui concerne sa taille dans la version manga de l’œuvre. Sans passer village par village on peut dire globalement que la région centrale est celle la plus transformer par les sociétés humaines. On y trouve de grand port marchand avec la ville fortifié de Warm (chaleureux en français) et le canal (sous-entendu artificiel) de Granz. On y trouve également la région Turk qui semble être le lieu de production de nourriture de la région avec ses routes pavées pour le transport on l’imagine plutôt riche. On retrouve aussi l’immense cité de Waal qui marque la limite avec la région nord et aussi l’influence du pouvoir central royal et magique. La forêt de Größe (« taille » mais j’imagine que l’obgectif était de dire « grand ») ainsi que les régions de Bredt et Wille (« Volonté » car il ne faut pas être écraser par les regrets si on veut y sortir vivant) et le canyon de Riegel sont eux supposément plus pauvres et plus sauvages. Enfin la région de Klee semble être le vilan petit canard du groupe avec une région extrêmement pauvre qui n’a pas encore su rebomdir des massacres exercés par l’armée du roi démon 80 ans plus tôt. De par son hétérogénéité de richesse et son architecture encore très locale, on peut voir que la région centrale a profité d’une paix ~Stable d’environ 100 ans pour développer son royaume. Le développement a été privilégié pour les deux capitales politiques et religieuses qui sont relié à la région agricole de Turk et aux villes côtières pour privilégier le commerce. La Foreteresse de Wall semble protéger les attaques du nord là où les relations avec la région sud semble cordial. Ce projet de relance économique semble cependant être limité dans certaines régions non prioritaires qui sont restées sauvages voir dangereuse sans qu’un état fort puisse leur venir en aide.


Au nord de la région centrale se trouve… la région nord. On remarquera que Frieren ne s’attache pas à une sémantique complexe germanique pour le nom de ses régions. Pour autant, ça ne veut pas dire que le nom du lieu n’a pas une signification discrète. La région nord n’est pas la région septentrionale du monde présenté. Techniquement on devrait même l’appeler la région centrale car elle est au centre du monde. La raison derrière ce choix de premier abord douteux est de montrer que le monde est nommé selon la région centrale dont la région nord, et probablement la région sud, sont vassales. Cette influence s’arrêtant au nord de la zone ou il faut être mage de classe 1 pour atteindre les plateaux du nord qui semblent être une zone plus montagneuse séparant ce royaume aux territoires impériaux. Comme le laisse présager la présence du seigneur Orden de la forteresse de Vorig, Il semble que la région centrale a annexé la région nord. Présagée par le passage de Wall, cette unification est cependant limitée par le manque de transport entre les deux zones, donnant plus à la région nord un rôle d’état tampon. Deux routes majeures y sont évoquées : les routes d’Eng (« étroitement ») et de Rohr (« tuyau ») respectivement au nord et au sud de la région. Ce qui est intéressant c’est que malgré leur importance présentée dans l’œuvre, elles sont toutes les deux montrées comme peut favorables au commerce de par leur grandiosité, ou leur impraticabilité. Cette dangerosité est également visible sur les villes croisées qui ont plus tendance à être fortifié à l’instar de la ville de la route d’Eng Road, du domaine de Graf Granat's, de Decke («plafond») ou encore de la forteresse de Vorig («précédent»). On remarque rapidement que la région nord est beaucoup plus montagneuse que la région sud avec par exemple les montagnes de Schwer (« Difficile ») et celles de Offen (« ouvrir ») offrant un climat beaucoup plus froid qu’une simple montée vers le nord pourrait supposer. On retrouve globalement un climat beaucoup plus homogène avec de grandes forêts parsemées de rivières. On va rencontrer ce paysage plus ou moins constamment : au Village de l’épée, dans les régions d’Appetit (« appétit ») et de Raad (« route »), dans les bois Alt (« vieux ») et de Bande (« groupe »). On retrouve aussi des lieux plus praticables comme les collines de Laub (« feuilles ») et de Klar (« Clair »). Bien que donnant une impression de cité état, de par son importance dans le système magique, la région dirigeante des terres du nord semble être Kühl (« cool »), synthèse biophysique des éléments géographiques évoqués plus tôt qui abrite Äußerst. D’autres lieux de la région sont évoqués dans l’œuvre mais pas encore présent dans l’intrigue pour l’instant dans la série j’ai donc décidé d’ignorer Saum Marshes, Great Sanft Forest, Fabel Village, Graf Dach's Domain, Etwas Mountains, Heiß, fortified city et Nachricht Region pour cette analyse. En conclusion, la région nordique des sociétés humaines est donc très homogène sur le plan des paysages avec ses épaisses forêts et ses hautes montagnes qui accentue le climat alpin de la zone. L’administration semble être à l’image de la nature beaucoup plus sauvage. On notera que plus on monte vers le nord plus les aspects fantastiques de l’univers semblent s’accumuler, chose qui est la cause de la complication du voyage.


J’aimerai vous parlez de la suite mais je me suis promis de critiquer la série et non le manga. Je n’aborderai donc pas des particularités du Plateau du nord et des Terres Impériales. Si vous me permettez cependant quelques mots sur l’extrême nord de la carte où se trouve l’Ende (« fin » ou «extrémité » ) qui se trouve être le seul qui n’a pas ne serait-ce que partiellement été contrôlé par les sociétés humaines où se trouve les deux objectifs du voyage de frieren: le chateau du roi démon et l’Aureol


En conclusion le monde de Frieren a été pensé de manière relativement logique (on ne croise pas des biomes très différents qui se suivent). On y trouve un rapport décroissant en matière d’impact des activité humaine et croissant en termes de fantaisie, une philosophie très shinto qui sert au développement progressif de la difficulté au sein de l’univers.


5. La place des gens, des races


On retrouve dans Frieren la base de la fantaisie « Tolkienienne » : Humain, Elfe et Nain a qui sont rajoutés les démons qui oscillent entre une position anthropique et monstrueuse au sein de l’œuvre. On est cependant très loin d’un monde de Zelda ou chacun à son biome sur lequel se construisent leurs civilisations très différenciées. Les actions passées de l’empire se font ressentir et on conserve une relative universalité culturelle et architecturale au sein de l’œuvre. Comme l’explique Frieren, le monde que l’on découvre est en passe de devenir un monde d’humain car les elfes n’ont aucunement le désir de se reproduire ; une idée qu’on doit bien sûr à Tolkien et à sa terre du milieu dont l’arrivée de l’âge des hommes marque la fin du seigneur des anneaux. Le groupe d’Himmel est limite un piège à ce jeu-là car il montre les trois races primordiales de la fantaisie alors qu’elfes et nain en sont presque absents. La raison derrière cette pluralité repose dans la comparaison qui sert à deux idées transmises par l’œuvre. La première, narrative sur la lente fin des race elfiques et naines. La deuxième, intrinsèque à la fantaisie de l’œuvre qui véhicule son message de construction oxymorique au genre dont elle fait partie en tuant ses marqueurs parmi les plus reconnaissables.


La race des elfes est sans doute la plus emblématiques de la fantaisie. La simple forme des oreilles du personnage principal de l’œuvre permet de déterminer son genre. Le traitement des elfes de Frieren est dans la droite lignée des œuvres de Tolkien qui les placent comme des êtres supérieurs aux humains en tous points. Cette supériorité prend dans l’œuvre plusieurs aspects comme spirituel avec le personnage de Kraft, politique avec Serie et savant avec Frieren. Chez Tolkien et ses successeurs, se retrouve également l’idée de l’extinction proche de cette race en faveur du progrès ou de l’hégémonie des humains. Chez Frieren, cette idée est présente à la fois scénaristiquement avec la purge des elfes par le Roi Démons et « scientifiquement » par le désintérêt qu’ont elfes à se reproduire, se rapprochant de l’approche plus scientifique que Sousou no Frieren propose pour expliquer les éléments de son univers. L’idée de supériorité des elfes, qui auraient pu être alimenté par leur grande rareté, est contrebalancer par les défauts propres et « humains » des elfes, les rendant plus attachant. La dernière des caractéristiques spécifiques des elfes et leur longévité, chose qui transcende l’œuvre et est à l’origine du propos artistique et des réflexions de l’œuvre. Vis-à-vis de cette longévité, les 3 elfes connus dans la série (Kraft, Frieren et Serie) explorent chacun une façon différente de vivre une longue vie. Kraft a l’air de multiplier les vies différentes (chose qu’on peut voir avec ses statues), Frieren décide de se lancer dans un sujet/connaissance du monde et de le comprendre dans son entièreté et Serie tente elle de changer la face du monde.


Contrairement aux elfes qui sont représentés relativement en accord avec les codes de la fantaisie, les nains sont ici très discrets et ne montrent pas vraiment plus de différence avec les êtres humains, et notamment la version vieille d’Himmel et à toutes les personnes « vieilles » en général dont la petite taille est caractéristique du style de Tsukasa Abe. Dans toute l’œuvre de Sousou no Frieren, on ne compte que 6 nains dont 2 qui existe à travers la série : Eisen et Voll. L’idée de poser la race de nain à Eisen et Voll est d’ailleurs plus fonctionnelle que conduit par l’idée de créer une véritable race des nains. Ils sont, comme les elfes éparpillés, et ne constitue en aucun cas une société avec une culture propre. Pire encore que les elfes, ils ne sont jamais vraiment reconnus pour être des nains. L’objectif de faire d’Eisen un nain est surtout d’accentuer l’aspect « fantaisie classique » du groupe d’Himmel qui, à l’instar du premier épisode, est un piège quant aux objectifs narratifs de Frieren. L’idée narrative derrière Voll nécessitait un personnage vivant depuis longtemps, mais moins longtemps que Frieren, et moins noble qu’un elfe. Faire de lui un nain tombait alors sous le sens. Non seulement on ne retrouve pas l’aspect culturel des nains, Eisen vivant dans une maisons plus « elfiques » que tous les personnages de l’œuvre, mais ils sont en plus dans une position de demi-nains. On ne retrouve d’ailleurs pas l’opposition avec les elfes qui a été démocratisé notamment par Tolkien. Encore plus que les elfes, les nains sont le symbole de la mort de la fantaisie au sein de l’univers de Sousou no Frieren.


Chez Tolkien, les récits contés sont décrits comme des événements antérieurs à notre histoire, avant que la fantaisie de notre monde disparaisse. L’histoire de Sousou no Frieren se positionne elle-même comme à la fin du temps de la fantaisie, détruite symboliquement et physiquement par le roi démon, et au début de l’ère des hommes. Les humains sont dans Sousou no Frieren la seule vraie culture et société. Ce choix est intrinsèque à la mort de la fantaisie conté dans l’œuvre quand on sait que le genre a tendance à user (parfois à outrance) de nouveaux peuples pour dynamiser son récit. S’il existe bien un aspect de découverte des nouveaux lieus dans l’œuvre, il reste très discret et s’oriente plus sur la culture, l’architecture et le fonctionnement des sociétés humaines. Ces éléments tissent une toile de fond et ne sont que rarement évoqués frontalement. On ne peut qu’apprécier le choix judicieux de Kanehito Yamada et Tsukasa Abe d’avoir construit une société non uniforme car même si cela avait participé à construire le monde de Frieren en opposition aux codes du genre, ça aurait été au détriment de l’immersion et d’une logique de construction d’univers. Cet entre-deux fonctionne d’autant plus que le monde se construit dans un cadre rigoureux qui, à l’inverse d’une carte de Zelda, ne cherche pas à juxtaposée des biomes nécessitants des conditions pédoclimatiques différentes (marais, désert, plaine enneigée…).


Les humains sont historiquement très représentés au sein du genre de fantaisie, surtout à bonne fin d’identification. C’est également le cas dans l’histoire notamment avec Fern et Stark mais il est intéressant de noter que le personnage central de l’histoire reste Frieren qui est l’un des rares personnages non humains de l’intrigue. Cela participe au travail d’écriture effectué pour casser son rôle de héros présumés en début de l’œuvre. Un autre élément servant à différencier les sociétés humaines est la « classe » de spécialisation majoritaire au sein des royaumes. L’exemple le plus parlant que je connaisse est Fire Emblem ou souvent, une nation possède des chevaliers pégases, une autre des archer etc… mais ça marche aussi avec Tolkien. Cette idée n’est pas présente chez Frieren. L’idée de classe existe peu. On la retrouve surtout au sein de l’équipe d’Himmel qui est je le répète très stéréotypée pour mettre en relief la manière dont les auteurs ont choisi de construire le monde. On le retrouve également avec le personnage de Sein qui sert à mettre en relief le fait que selon les codes du genre le groupe de Frieren n’est pas fonctionnel (2 mages et un guerrier). Si on excepte Äußerst (qui est lié au personnage de Serie), on ne retrouve pas une ville avec un type de classe. De plus de classes comme celles du voleur ou de l’aventurier sont inexistantes car peu réalistes dans le vrai monde, même si certains personnages comme Übel embrassent certains codes (dans son cas ceux de l’assassin) pour faciliter la construction de personnage.


Reste enfin la dernière race anthropisé de l’œuvre : les démons. La place des démons dans cette catégorie est cependant discutable, tant on nous les présente comme des animaux doués de paroles. Les débats autour des démons au sein de Frieren s’expliquent par l’histoire du rôle des démons dans le genre de la fantaisie. Historiquement, la fantaisie décrit l’histoire d’un groupe d’humains ou du moins d’un groupe de races anthropisées qui va s’opposer à une race de démons qui sont, par leur race, forcements malfaisants et de ce fait conduit à l’extermination sous le regard de la moralité autant par le lecteur que l’écrivain. Le problème c’est que cet archétype de race mauvaise par essence fait écho à des dérives politiques violente qui font passer le massacre voire le génocide de peuple pour une raison morale, justifiée par leur essence démoniaque. La critique de cet archétype (souvent alloués aux trolls, gobelins ou orques) trouve son apogée avec Rêve de Fer, de Norman Spinrad qui dénonce l’idée fasciste sous-jacente de cette construction raciale de l’univers en faisant d’Adolf Hitler un auteur de fantaisie. D’autres auteurs comme William Blanc ont également mis en lumières des parallèles existant entre des représentations de race de la fantaisie et des stéréotypes de certains peuples existant, comme entre les orques et les peuples africains. Ces différents ouvrages ont permis une remise en question du genre. Aujourd’hui on retrouve plus l’homme dans le rôle du méchant, et les races autrefois stéréotypées sont de plus en plus nuancées et présentées avec le même état moral que les races anthropisées. La question de la déshumanisation d’êtres vivants sous prétexte de la biologie a même été maintes fois embrassées par de grandes œuvres du genre depuis. Si on ne parle que de films on peut parler de la trilogie « Dragons », de l’oscarisé « La forme de l’eau » ou encore de l’ensemble de l’œuvre de Tomm Moore. On trébuche d’exemples en exemples.


Et tout ça…Frieren s’en moque. Une des raisons est sans doute que l’œuvre prend beaucoup à Tolkien dont les ouvrages datent d’avant ces considérations. Mais certains passages comme le flashback d’Himmel montrent que le sujet de la place des démons dans l’œuvre est connu et que le choix de leur position dans l’univers est assumé. Alors, pourquoi ce choix qui semble, d’un premier abord, moralement douteux ? Premièrement, les démons sont une race fonction. Ils servent d’enjeu narratifs à long termes, notamment via le fameux roi démon. Leurs longévités permettent la création de liens entre les différentes temporalités que le narrateur n’ait besoin d’installer des personnages elfes voulus plutôt rares. Enfin les démons ont une fonction de représenter le mal naturel et logique qui se montrera plus redoutable que les combattants humains et nains. Deuxièmement cet élément permet à Frieren de se construire encore plus à contre sens du genre de la fantaisie en refusant les évolutions de celui-ci. Et troisièmement, il y a l’aspect scientifique avec lequel l’œuvre approche son environnement. Ici les démons y sont décrits comme des animaux qui auraient gagné la parole grâce à l’évolution, l’usage de celle-ci offrant un avantage évolutif certains au niveau de la chasse des humains. Paradoxalement et (je suppose) plus par volonté de rendre le récit plus agréable, on retrouve cette idée de non-distinction des races avec les elfes et les nains que l’œuvre a tendance a « humaniser » par leur défaut.


III. Le merveilleux, le surnaturel, la magie


Le monde ne mourra jamais par manque de merveilles mais uniquement par manque d'émerveillement.

Gilbert Keith Chesterton


1. Le merveilleux et le surnaturel


Le surnaturel on en parle un peu en long et en large depuis la partie II donc genre… 6000 mots… et je me répète déjà suffisamment dans cette critique dont la structure impose un style d’écriture « à sauts et à gambades » comme dirait Montaigne, donc on va directement passer sur le merveilleux. La différence entre les deux étant le merveilleux se base sur un rapport au spectateur contrairement au surnaturel. Le rapport au merveilleux d’une œuvre de fantaisie est intrinsèquement lié à son sous genre et donc à sa tonalité. Bien qu’il soit maintenant récurant dans cette analyse que le projet artistique s’inscrit dans la continuité d’un Tolkien, dans toute son oximorie (énallage) Frieren décide de verser dans un sous-genre quasiment opposé à la fantaisie épique : la fantaisie romantique. Romantique comme le roman, comme Hugo, Baudelaire ou Allan Poe pas comme Twilight (pourquoi c’est la première œuvre citée quand on s’intéresse à ce sous genre je suis abattu). Le romantisme se caractérise par la mise en premier plan des émotions des personnages qui s’imposent comme le centre du récit. Le sous-genre est majoritairement composé de récits écrits par des femmes, femmes qui sont les premières sont également les plus grosses lectrices de ce sous-genre. Frieren ne déroge pas à la règle, sa scénariste Kanehito Yamada étant une femme. Deux précisions cependant : déjà comme dit plus tôt Kanehito Yamada a eu l’intelligence de tuer la romance dès le début de l’œuvre par la mort d’Himmel tout en en faisant le moteur de l’histoire. Ensuite l’œuvre verse également dans la fantaisie noire et surtout dans la fantaisie épique (avec ses scènes de combats) qui permet à Frieren d’attirer un public plus mixte les hommes étant plus souvent rebuté par les codes du genre romantique (qui va aux antipodes des codes sociaux qu’on leur instruit dès l’enfance).


Le sous-genre limite donc la possibilité de servir dans le merveilleux par son environnement, le centre de son histoire se basant sur ses personnages et ce qu’ils ressentent. De plus, le fait que les races typiques de la fantaisie se meurent marque une forme de mise à mort du merveilleux. Il est vrai que Frieren utilise relativement peu le contemplatif pour participer à son merveilleux. Encore une fois ça ne veut pas dire que Frieren ne verse pas dans une fantaisie traditionnelle pour son merveilleux (revoir les passages sur les monstres, les combats, les races et la construction d’univers) mais que celui-ci se base beaucoup plus sur la relation entre les personnages et surtout l’aspect fantastique de baser ces relations sur un espèce de dialogue se déroulant à près de ~80 ans d’écart. On peut donc remarquer que le rapport oxymorique de Frieren avec son genre est même extradiégétique car il popularisé chez les hommes un genre réservé aux femmes.


2. La magie


Contrairement à beaucoup d’œuvre de fantaisie qui place les mages au même niveau que d’autres classes comme le héros, le voleur/assassin, le barbare ect…, Frieren centre sa fantaisie autour de la magie et de sa pratique. C’est visible par la différence de taux de magiciens entre les deux équipes de Frieren (25% pour le groupe d’Himmel qui on le rappel est un piège Tolkénien pour mettre une comparaison avec le nouveau groupe qui en comporte 66%) mais aussi par le nombre de personnages capables d’utiliser la magie comparé à d’autres œuvres (sources : t’inquiètes mon gars). La magie est tellement importante dans l’histoire contée dans Sousou no Frieren que les narrateurs peuvent s’en servir pour exprimer les différentes philosophies entre des personnages comme Flamme, Serie, Frieren, Fern et dans une moindre mesure les autres mages rencontrés notamment durant l’arc à Äußerst. Par exemple on montre Serie comme une personne accomplie qui vient chercher un sens dans l’idée de former des gens capables de marquer leur temps. A l’inverse de Frieren qui pratique la magie par une curiosité limite scientifique. La magie est d’ailleurs à l’origine de la relation entre Fern et Frieren. On retrouve même cette idée avec les démons qui ont entre autres comme caractéristique de ne pas cacher leur niveau de magie. De ce fait en plus d’être très présente la magie transcende les sous-textes de l’intrigue.


La magie dans Sousou no Frieren ne peut pas être qualifiée de surnaturelle pour les humains qui l’étudie à grande échelle depuis plus de 1000 ans (avancée permise par Flamme) et la pratique depuis supposément plus longtemps encore. Notre histoire se déroule cependant à un point de bascule ou les hommes commencent à réussir malgré leur faible espérance de vie à se positionner à un niveau de compétence aussi élevé que les elfes et les démons. C’est dit textuellement par Frieren à Äußerst mais l’exemple le plus visible est la défaite de Qual par son propre Zoltraak au début de l’œuvre. L’idée derrière serait que les humains sont les seuls à évoluer en société « Sociale » là ou les elfes reste très solitaires et les démons évoluent plus sous la forme d’une meute de loups ou d’une société ULTRA Féodale. La magie représente cependant une autorité à part des sociétés humaines, qui bien que puissante, n’a que des liens indirects avec le pouvoir central (Äußerst et Royal Capital étant à plusieurs années de route d’écart si on se réfère au parcours de Frieren). Même si on ne retrouve pas forcément un lien direct entre la magie et un pouvoir géopolitique (hors Äußerst dont le statut d’indépendance est plutôt flou), on peut cependant dire que la pratique de la magie semble s’accompagner d’un plus haut statut social que ce soit au sein de l’église (dont les différences avec la magie de base seront expliquées plus tard) ou de la société féodale dessinée dans l’œuvre.


Si comme dit précédemment la fantaisie intrinsèque à l’œuvre semble décliner avec le temps qui passe la magie semble ne pas suivre un même chemin. A l’instar de « La légende de Kora », des œuvres de fantaisie justifie e déclin de la fantaisie et de la magie par l’arrivée d’avancées scientifiques et technologiques majeur dans le monde. J’ai toujours trouvé que cette vision du monde était désagréable car elle opposait en quelque sorte l’âme (la magie, la religion) de l’esprit (la science, la philosophie). Si Frieren conserve une idée que, plus l’impact de l’homme est visible, plus les aspects fantastiques de l’œuvre se font discrets, couvrant le sous-texte écologique récurant qu’on retrouve notamment chez Miyazaki, la magie ne suit pas ce même chemin. La raison à cela est encore une fois expliquée durant le bref combat contra Qual. Bien que présente dans les sociétés humaines et conscientisé depuis Flamme, Frieren a, après le combat contre le roi démon, amené les sociétés humaines à conscientiser la magie comme une discipline scientifique avec ses règles immuables, ses possibilités et ses manières d’évoluer. Ce choix de présenter la magie sous un aspect scientifique peut sembler plutôt étrange quand on sait que Sousou no Frieren ne choisit pas de nous perdre dans des explications très complexe sur les la magie. On ne connait en réalité pas grand-chose du fonctionnement précis de la magie ni des codes qui la font fonctionner. On part donc du principe que la magie peut tout faire (voler, soigner attaquer, transformer son élément, ect…), sauf quand elle ne le peut pas. Cela permet une liberté créative plus grande pour le futur de l’œuvre. Frieren verse donc une fois de plus du coté de Tolkien avec ses mages aux pouvoirs flous et non du coté de n’importe quel jeu de rôle qui se voit souvent obligé de poser des limites aux possibilités de ces magiciens qui ruineraient la campagne en 2 minutes. La plus belle des preuves est l’idée de ne pas nommer tous les sorts et ainsi faire d’un calvaire l’idée de tous les retracer. Pour l’instant sur les 105 sorts vu dans l’œuvre (mangas), seuls une trentaine sont nommés et souvent l’utilisation d’un sort ne laisse pas les autres personnages hébétés. Comme si la spécialisation et la créativité des sors amenaient un peut tout le monde à être un artiste de sa maîtrise de la magie. Cette vision de rendre les sorts peu spectaculaires est en accord avec l’idée de Frieren selon laquelle dans cette ère, les sorts de basent sont suffisant pour défaire n’importe quel mage car les sociétés humaines n’ont pas suffisamment de connaissance sur la maîtrise de la magie pour avoir besoin de plus. Ainsi le rapport avec la magie qu’à Frieren est celui d’un enfant content de découvrir les petites bizarreries de sa passion. Outre le combat contre la fausse Frieren, c’est le choix de Fern de choisir un sort un peu nul mais rigolo qui lui permet de se positionner un peu plus sur un pied d’égalité avec sa maîtresse. Ainsi en choisissant un sort qui a pour but non la puissance mais juste augmenter l’envie de Frieren de lui faire un câlin qu’elle se positionne dans de bonnes conditions pour apprendre la magie. La magie dans Frieren est pour moi une des plus étranges jamais construites. Elle est très mystérieuse mais semble codifier de manière scientifique, tout en demandant un certain artistique ou tout du monde pour la perfectionner. On comprend parfaitement pourquoi notre protagoniste fait le choix ici d’en faire la passion de sa vie. On comprend également pourquoi elle est tant utilisée pour transmettre les sous textes de l’œuvre.


Si le linguiste en moi a fortement envie de vous expliquer pourquoi les noms des sorts sont rigoureusement bien choisis, il se coince cependant rapidement à un problème…de linguistique. En effet, les sorts utilisent des mots et des références plus complexes que les noms des gens ou des lieus ce qui amène à essayer de comprendre un mot allemand traduit en japonais puis retraduit en anglais. Et c’est le bordel. Je ne me décourage pas pour autant mais retenez que ce qui va suivre sera beaucoup plus abstrait que le reste de ma critique. Ce bordel a l’air d’avoir été conscientisé car chaque sort nommé à dans son nom sa fonction. Pour moi on retrouve 3 types de sorts. Déjà on a les sorts qui ne veulent rien dire (ou qui ont une référence complexe à aller chercher à cause des traductions) mais qui ont une consonance allemande comme le Zoltraak ou le Judradjim. Ensuite on a les sorts qui ont l’aire de faire référence à mais c’est compliqué de donnée une réponse exacte. C’est le cas par exemple du sort de contrôle de sang « Balterie » utilisé par Lügner. Il peut être une double traduction de « Barthiens » qui caractérise les idées liées à Karl Barth, un théologien allemand/suisse à l’origine du mouvement décrivant Dieu comme le seul capable de parler de théologie et que toute parole qui n’est pas de lui est une prise de risque. Si c’est le cas c’est peut-être lié au fait que Lügner attaque aussi avec ses mots par ses mensonges ou alors qu’il retranscrit les mots d’Aura…fin c’est compliqué. Enfin on retrouve les sorts qui veulent dire quelque chose, avec par exemple le sort qui transforme des pétales de fleurs en lame acérées Jubelade (=Jubilation) dont la signification est dure à trouver. Un de mes noms préférés est le sort d’Aura : Auserlese qui signifie « Choisie » et qui est un indice comme quoi l’arrogance d’Aura la poussera elle-même à mourir dans une ironie des plus crasses. En clair même si la magie est, à l’instar des gens et des lieus, un outil d’insertion de l’œuvre dans un univers européen, de part des barrières linguistiques et/ou des choix de nomination plus abstrait et/ou un choix délibéré, elle y participe de manière beaucoup plus esthétique que scénaristique.


En clair la magie de Sousou no Frieren est un outil. Un outil qu’on apprend avec Fern et qu’on découvre avec Frieren qui lui enseigne. Mais un outil limité par la présence de la barre de « mana » qui est plus issue de la fantaisie nippone et des jeux vidéo en général. Cette barre n’est cependant pas physique ; elle est plus organique. On pourrait la comparer à un taux d’hémoglobine. Cela permet à la fois de limiter le pouvoir des mages, de ne pas donner une impression de jeu vidéo ou encore de créer des différences naturelles de niveaux sans limiter la capacité de faire de la magie (comme on pourrait le voir dans un jeu de rôle ou seuls les magiciens peuvent en faire) ou la progression de chacun. La magie étant un outil, elle n’est pas positive ou négative. On ne retrouve pas de classification comme magie noire/blanche ou de sorts interdits et la magie. La magie de plus n’appartient qu’à un groupe moral et est pratiqué autant par les protagonistes que les antagonistes. Les mages de Frieren distinguent cependant 3 types de sortilèges. Les malédictions créant des effets de statuts (paralysie, sommeil, ect…) (un sort d’état dans les jeux vidéo). La magie de la déesse présentée comme un contre aux malédictions et qui s’intéresse plus globalement à la santé des gens (un sort de soin/support dans les jeux vidéo). Enfin la magie qui caractérise tout le reste (vol, feu, télékinésie, fleur, lavage/repassage, réparage de parebrise et installation du saint communisme dans tous les cœurs des hommes) qu’on appelle…bah magie dans les jeux vidéo. La magie du monde de Frieren qui surplante toute autre forme de force n’est pourtant vu que comme une possibilité, un outil sans bien ni mal avec un aspect religieux limité.


IV. Le sacré, la spiritualité, la religion


Le mouvement darwinien n'a rien changé dans l'humanité sauf, peut-être, qu'au lieu de parler philosophie sans esprit philosophique, les hommes parlent maintenant science sans esprit scientifique.

Gilbert Keith Chesterton


Le sacré, la spiritualité et la religion sont un passage obligatoire dans un travail de cosmologie. Ces éléments que je raccourcirai dès à présent au simple mot de religion amènent à des idées de concepts inviolables dont la légitimité et la supériorité ne peuvent être remises en question. Ils sont donc fondamentaux car ils posent les limites nécessaires à un travail de construction d’univers crédible. Ils sont aussi souvent utilisés comme critiques car facile d’en faire une critique de dogmatismes. L’exemple le plus connu étant sûrement Berserk. Ce n’est pas le cas de Frieren qui a une vision très nuancée de la religion qui opte finalement pour une vision très nuancée et complexe de la spiritualité qui semble au premier abord être simplement un petit détail de fond.


Que ce soit fait de manière consciente ou non, une œuvre s’imprègne systématiquement de la culture dans lequel elle a été conçue. C’est le cas de Frieren qui, même si elle souhaite parle de fantaisie occidentale, ne peut pas se défaire de l’influence du Shintoïsme dans sa construction. Le shintoïsme est la religion majoritaire au Japon, c’est une religion animiste. Ce n’est donc pas normal de retrouver au sein de la série une vision de la nature proche d’un film de Miyazaki par exemple. La vision shinto transparaît à mon sens beaucoup plus dans sa vision du monothéisme qui ne place pas Dieu et l’Homme au centre de la religion mais place l’Homme comme élément comme un autre d’un tout plus vaste. Le mythe de la création se mélange alors avec la science et notamment la théorie de l’évolution. Il est décrit dans Shouzou no Frieren une utopie d’évolution des mœurs et d’un recul philosophique sur la religion. Cette coévolution est également permise par le peu de contes religieux qui permet de ne pas créer de réelles contradictions entre ces deux mondes. Si on reviendra plus tard plus tard sur l’ordre religieux, on s’y appuyer pour commencer par dire que la religion est beaucoup plus concrète que ne le serait le judaisme/le christianisme/l’islam (sans offense). Outre la magie, c’est visible notamment par sa déesse créatrice qui évoluait dans le monde qu’elle a créé et qui est considéré notamment par Frieren comme un être vivant dont l’existence appartient plus à l’histoire qu’aux contes et légendes. De plus l’utilisation d’une magie divine différente de ma magie traditionnelle vient ancrer un peu plus la réalité des dieux dans le monde réel. La religion n’est pas un aspect majeur des sociétés humaines de l’univers et se pose plus en retrait à l’instar de l’architecture ou la culture d’un lieu. Le monothéisme et l’absence de personnes divines ayant un autre rôle supérieur permet à d’autres personnes d’être vénérée au même titre qu’un dieu. Cette vénération différant en fonction des lieux : Flamme au domaine de Graf Granat, Serie à Äußerst, Himmel sur les villes de sa quête initiatique, le roi un peu partout, Kraft qui est en partie oublié, l’épée sacrée au village de l’épée, le roi démon parmi les démons ect…. Dans un monde baigné par le surnaturel, l’origine d’événements peu explicables ne peut passer sous le jalon du divin. La religion a donc besoin de se raisonner de manière scientifique au sein de cet univers.


Ce n’est pas le cas de tous les éléments spirituels parus dans l’œuvre, mais en ce qui concerne la religion on peut dire que Frieren l’utilise pour l’instant comme très très secondaire. Sa présence pourrait limite être justifiée par le fait que son absence ferait tache si l’oeuvre ne s’en servait pas un peu dans son rapport au spirituel notamment avec les représentants de l’église : Kraft, Heiter et Sein. Inscrire la partie la plus manichéenne de l’œuvre dans un contexte religieux (combat contre le roi démon dans une ambiance du bien contre le mal) permet d’atténuer ce manichéisme car intrinsèque à l’idée de religion. On ne retrouve en effet qu’une seule religion dont les pratiques sont plutôt discrètes (beaucoup de villages visités ne possèdent même pas de bâtiments religieux). On n’a l’impression que la déesse de la création n’a pas laissé de dogmes sur sa façon d’être vénérée et la gestion de la religion est gérée en macro par un organisme qui n’est que cité une fois au début de l’œuvre, laissant les prêtres faire à peu près ce qu’ils veulent.


Pour cette raison en absence de grandes figures religieuses, les gens se sont mis à sanctifier les gens. C’est le cas d’Himmel qui par la simple fait d’outre-passer sa temporalité en conservant sa légende à titre posthume, il arrive d’une certaine manière par sa légende à faire pied de nez à la religion. Il y a en effet quelque chose de très christique dans l’épopée d’Himmel. Un homme qui a vaincu le destin même au cours d’une aventure initiatique présentée au départ comme bancale. De plus, si on excepte le passage sur les démons, Himmel ne donne pas une impression d’évoluer et malgré ses défauts apparents et expliqués mais mineurs se laisse peindre une image de personne parfaite, à l’image de sa légende. On le retrouve même à faire découvrir à Frieren un pan de la vie qu’elle ignorait alors qu’elle est infiniment plus vieille que lui. La fin de l’histoire d’Himmel a cependant plus tendance à verser dans les récits arthuriens avec une fin en demi-teinte, Frieren découvrant que, malgré tous ces pouvoirs elle n’a pas été capable de percer à jour le cœur d’Himmel. D’une certaine façon l’œuvre impose à Frieren de refaire cette route initiatique mais cette fois-ci en prenant en considérations les enjeux spirituels et philosophiques qu’elle implique.


Himmel n’est pas le seul personnage à s’inscrire dans le divin. Les elfes et dans une moindre mesure les démons et les nains versent également dans le sacré car leur longévité leur permet une certaine forme d’omniscience et d’omnipotence. On permet donc de liés les humais à des semi-dieux et lier leur destin. Ce contraste amène les mortels à se poser la question de leur liberté et de leur destin. Elle y montre des personnages comme Himmel outrepasser les prophéties celle de l’épée du héros guidant d’une certaine façon sa propre intrigue en dehors du chemin tracé. Ce fonctionnement religieux ambigu rend la mort du personnage d’Himmel floue d’un point de vue du récit. Par les flashbacks il accompagne Frieren dans son second voyage et se pose en apothéose du parcours pour après le combat contre le roi démons.


Comme dans beaucoup d’autres œuvres du genre, La religion est dans Frieren relativement limité aux personnages qui s’y dévouent entièrement, comme les 3 moines de notre histoire qui sont en quelques sorte le pont entre le monde réel et la religion. Le premier d’entre eux que l’on rencontre est Heiter. Surnommé le prêtre corrompu. Malgré son amour pour la fois manifesté depuis son jeune âge il est décrit comme menteur, moqueur, défaitiste, cynique, alcoolique et jaloux (pendant un temps) d’Himmel. Après l’ellipse il s’assagira et adoptera Fern suite à une grande carrière d’évêque au saint de la ville sainte de Strahl. Sein est un prêtre talentueux mais qui donne l’impression de se reposer sur ses ressources magiques innés. Il est peureux, fumeur, colérique, bornés et aime les femmes plus agées. Il démontre cependant une grande intelligence émotionnelle par ses interactions avec le groupe de Frieren. Si Kraft est montré comme beaucoup plus droit moralement que les deux précédents hommes d’église, il est sous-entendu que Kraft avait déjà ce comportement avant de devenir un homme de la déesse. Son approche est même égoïste quand on y pense car son endoctrinement est poussé par la peur d’être oublié et non pas de faire le bien. Je ne pense pas que la « perversion » des hommes d’église présentés dans l’histoire ait pour volonté de critiquer la droiture morale de vraies religions. Seule l’idée que la religion est par définition stable dans un monde en mouvement est évoqué. Je pense que briser la droiture morale de ces personnages visent à mettre en exergue l’idée de la philosophie et plus généralement la spiritualité personnelle est plus importante que la religion dans la construction d’un individu et que les dogmes de l’église seuls en sont incapables.


C’est une idée attendue pour une œuvre mêlant héroïque et romantique fantaisie de voir que beaucoup de personnages ont une philosophie propre qui se détache de la religion. Dans une œuvre qui met en avant les émotions de ces personnages les amener à tous avoir un même code moral limiterai les interactions possibles. Ainsi nos personnages dans l’expression de leur penser ne font pas appel à la religion ou à ses préceptes. En conclusion la religion est un incontournable du travail de cosmologie qui ne fait pas exception chez Frieren. Le récit se voit doté d’un mythe de création sur la base d’une religion monothéiste et certains personnages ou objet qui ont soit marqué les esprits comme Himmel ou Flamme soit vécu suffisamment de temps comme Frieren ou l’épée du héros remplissent le vide de la mythologie de l’œuvre. Cependant la religion reste une toile de fond de l’œuvre et se fait masquer par la philosophie et la spiritualité intrinsèque des personnages qui nourrissent le genre de la fantaisie romantique. Ce choix artistique permet aux spectateurs de participer au débat.

Lordlyonor
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le 21 juil. 2025

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