Citation de Hajime Isayama (titre du premier chapitre de "l'Attaque des Titans")
Cette critique est la troisième et dernière partie de ma trilogie d'analyses effectuées entre l’œuvre Sousou no Frieren et le genre de la fantaisie. Il est donc préférable d’avoir lu les deux premières parties au préalable avant de vous attaquer à celle-ci. Vous pouvez la retrouver la partie 1 ici et la partie 2 là.
V. Travail d’adaptation (Bonus)
Même si analyser Sousou no Frieren par le prisme de son rapport avec son genre est selon moi la meilleure option pour expliquer son titre (mérité) de meilleur anime de tous les temps, cela a cependant le défaut d’empêcher une partie dédiée au travail de Keiichirō Saitō (et de son équipe des studios Madhouse) qui a adapté le travail d’écriture de Kanehito Yamada et dessin de Tsukasa Abe. Voici donc une partie dite bonus aux vues de la trame de mon analyse mais qui n’est pas moins importante quand on veut traiter une œuvre dans son ensemble.
Il est aussi important de préciser que même si cette critique existe grâce à la série animée Sousou no Frieren, qui a démocratisé l’œuvre surtout à l’international, le manga n’était cependant pas inconnu du publique japonais. En mars 2023 (donc 6 mois avant le début de l’anime) l’œuvre était à plus de 8 millions d'exemplaires en 9 tomes, et notoirement considéré comme l’œuvre la plus importante de la fantaisie japonaise depuis Berserk. A titre de comparaison, le manga « Gloutons et Dragons » (également fantaisie japonaise) dont les critiques sont unanimes est à 8 millions de tomes en 14 tomes. Et c’est sans compter le fait que Frieren a débuté 2020 et Gloutons et Dragons en 2014. Le manga a donc participé considérablement à la réussite de la série, et a notamment permis la présence de Keiichirō Saitō (qui a réalisé l’immense Bocchi the rock l’année plus tôt et dont on reparlera…un autre jour), la production de Madhouse (entre autres Parasite, Perfect Blue, Death Note ou Hunter x Hunter de 2014) ou même la présence du génialissime Evan Call (compositeur des musique de Violet Evergarden) et du mondialement connu groupe Yoasobi (qui a aussi réalisé la musique de Oshi no Ko et de Beastars, et à qui on doit, entre-autres « : «夜に駆ける») sur le titre d’ouverture. De plus, même si ce ne sera pas traité dans cette critique, Frieren connait une mini-série indépendante dirigée par Toho Animation.
Donc, même si l’œuvre est assez dépendante de son adaptation et inversement, voici une partie bonus qui reviendra sur les qualités et propositions artistiques du médium d’adaptation (manga et série) utilisés par Frieren.
1. Narration
Tout le monde vous le dira, le travail de narration de Sousou no Frieren est extrêmement fidèle est fidèle et diffère très peu du médium d’origine. Les deux médiums étant différents, on a tendance à dire que par son absence de couleur et les images fixes la version papiée est un peu plus calme et triste là où la version animée serait un peu plus joviale. Mais dans les deux cas on retrouvera cette nostalgie et ce fatalisme ombragés par le prisme du bonheur de la découverte. Découverte du soi pour Frieren et du monde pour Fern. Il existe cependant des petites différences. Par exemple Keiichirō Saitō a beaucoup plus appuyé la scène du bal sûrement pour développer d’avantage la relation entre Fern et Stark qui peine un peu dans la première semaine à se trouver des moments ou leur « attirance » mutuelle se montre visible (la réalisation étant conscient que cette relation amour haine pouvait être frustrante un peu et quelle manquait de partie « amour »). J’aime aussi d’autres choix d’adaptation comme le fait de ne pas montrer le roi démon (« son aspect de Sauron Temu dans le manga casse l’effet Sherkan qu’il crée dans l’anime et qui lui réussit beaucoup plus). Il y a aussi des légers changements dans la seconde épreuve pour améliorer le rythme de l’histoire. Mais c’est très minime et globalement je dirai que les choix de narration rendent l’anime meilleur mais c’est assez dur à certifier car aussi lié à la narration par l’animation qu’on va voir juste après.
2. Animation
Dire que visuellement la série est différente du manga est le truc le plus inutile que vous lirez aujourd’hui (quoi que si vous la lisez d’une traite vous avez eu une liste de président un peu plus tôt). Il est difficile de comparer des images fixes avec une action en mouvement et de vous dire quel est le meilleur des deux médiums. Comme dit plus tôt, l’adaptation suit scolairement l’œuvre de Kanehito Yamada et Tsukasa Abe mais Keiichirō Saitō et son équipe se sont permis de petites modifications pratiques qui rendent à mon sens l’adaptation meilleure. Déjà forcément, le style de dessin de Tsukasa Abe s’est dans les chapitres un peu cherché. De même, sûrement par manque de temps la version papier manque de fond dans ses cases, ce qui peut être une partie prie, mais qui, comme dans certains animes qui ne montrent que la silhouette des gens autour, peut rapidement perdre le spectateur ou rendre mal à l’aise certains qui ne sont pas habitués au style minimaliste des débuts de l’œuvre. Autre chose dont on ne se rend pas trop compte au début mais qu’on arrive plus à ignorer une fois qu’on s’en rend compte c’est que Tsukasa Abe n’aime trop dessiner ses personnages de trois quarts et esquive ces dessins ce qui rend parfois l’image un peu alambiquée. Ces « défauts » sont s’amenuisent avec le temps car les parutions entre les chapitres se sont grandement espacées. Pour ne pas non plus qu’enfoncer le manga je tiens à dire que quand il prend le temps de dessiner ses paysages ça n’a rien à envier à la version animée. Je pense notamment à la Ville sainte de Strahl qui ressemble à un immense Vatican dans la version manga et à une bête ville fortifiée dans la version anime.
Malgré ça, la version animée surclasse la version papier pour ses combats. Peut-être que je me trompe mais je pense que Kanehito Yamada a voulu avec Frieren faire une œuvre de fantaisie romantique ou les combats servent plus à appuyer l’intensité des combats philosophiques en plus d’étendre le manga à un profil plus masculin plus enclin à bouder une œuvre ou personne ne se tape dessus, laissant Tsukasa Abe improviser un peu graphiquement ces scènes. Au sein du manga les scènes de combats restent (surtout au début un peu brouillon). Ça aurait pu poser problème lors de l’adaptation, si on n’avait pas donné l’œuvre à Keiichirō Saitō qui est sans doute le réalisateur japonais le plus talentueux de sa génération et que ce jeune homme de 32 ans n’avait pas prétexté ces moments brouillons pour nous lâcher les meilleurs combats de la japanime depuis Kill la Kill (ou Gurren Lagann si ça vous parle plus). Ça ne veut pas dire que le bonhomme est partie sous fentanyl dès les premiers épisodes. Au contraire le combat contre Qual est expéditif pour montrer le passage du temps et celui contre Aura est plutôt calme pour montrer la bêtise de cette dernière et surtout pour ne pas entacher le coté émotionnel de la révélation de Frieren et la décapitation froide d’Aura qui aurait été amoindris si Frieren avait commencé par lancer un trou noir sur la colline. Ces deux combats sont tout de même moins brouillons dans une version animée qui sait gérer sont rythme. Le combat entre Fern et Lügner offre lui une vraie belle évolution et ou on voit mieux l’opposition naturelle entre des sangs zigzagants et des Zoltraaks en ligne droite. Les vrais gagnants l’adaptation reste les combats au corps à corps avec Stark contre le dragon puis Linie qui marche beaucoup mieux. Pour ne pas revenir sur tous les combats il faut finir sur le combat final de cette saison 1 qui est...stratosphérique. Les éclaires de partout, le montre rocher sortie de nulle part, Les Frierens qui marchent avec le décore qui prend feu derrière, UN TROU NOIR SUIVI DE L’IMPLOSION MÊME DE LA RÉALITÉ. La chorégraphie est folle, les 30 retournements de situations et cette fin parfaite. On a demandé à Keiichirō Saitō de donner envie aux gens de voir la saison 2 il nous a offert un des plus grands combats de la japanime en 5 minutes. Si Frieren s’impose au sommet de la japanime c’est grâce à l’association de 3 virtuoses au sommet de leurs arts : Kanehito Yamada à l’écriture, Tsukasa Abe au charadesign/graphismes et Keiichirō Saitō à la réalisation/animation.
3. Musique
La partie musique sera divisée en deux, d’abord on parlera des chansons opening et ensuite on parlera des musiques internes à l’œuvre.
Les chansons d’ouverture et de fermeture d’une œuvre sont à la fois très importante et très superflue. Un des rares moments de vraie liberté narrative qui permet aux personnes chargées de l’adaptation de se détourner du travail d’adaptation sans rentrer en contradiction avec celui-ci. On retrouve au final 2 chansons d’ouverture (séparant 2 moitiés d’œuvre) + 3 chansons de fermeture (1 des épisodes 1 à quatre (le premier arc) et les 2 autres ~séparées de la même façon que les deux chansons d’ouverture). Je vais faire une analyse rapide de chacun d’entre eux sinon je vais devoir séparer ma critique en trois <|°_°|>. (j’utilise les traductions de asuna86 réalisées pour le site Nautiljon)
Haru est la deuxième chanson d’ouverture de l’œuvre, interprétée par Yorushika. Il s’ouvre sur des papillons bleus tournoyant autour de Frieren. Ces papillons représentent Himmel, ils ont une vie courte mais libre (ils volen) et choisissent de profiter de leur vie pleinement notamment en butinant des fleurs. On retrouve des bouts de la vie de Frieren comme pour montrer des souvenirs suivis d’une scène ou on imagine voir le groupe d’Himmel partir sans elle. On imagine que c’est le moment où Frieren se rend compte que même si la vie des autres êtres est futile en termes de temps, elle ne l’est pas en termes de sentiment. On retrouve ensuite une statue d’Himmel mort mais représentant un idéal, avec un envol d’oiseaux représentant la liberté. S’en suit une des scènes montrant les personnages pour dire que dorénavant Frieren met de la valeur à leur existence (scènes qui sert également à nous les présenter). Serie est montrée comme ne se rappelant pas des visages des gens, suivant un parcoure autocentrée avec en parallèle le regard de Frieren montrant qu’elle a ouvert les yeux sur ce point ce qui marquera la différence idéologique entre les deux. S’en suit un parallèle entre les deux groupes qui montre que malgré son visage froid Frieren tient à son nouveau groupe comme elle tenait au groupe d’Himmel. Les paroles sont réparties en 4 couplets : les 2 premiers semblent être prononcés par Frieren et les 2 autres par Himmel.
Tes gestes me rappellent le vent...
Lorsqu’au crépuscule, tu fermes les yeux,
Je me demande quelles pensées tu as en tête...
Lorsque tes paupières se sont ouvertes,
Je me suis rendu compte que tes yeux brillaient tel des billes de verre.
Il y avait comme un léger parfum de journée ensoleillée dans l'air.
Quand le ciel s'est éclairci, les fleurs ont commencé à s'épanouir.
Si elles fleurissent, on dira que c'est la faute du printemps.
Quand la pluie s'arrêtera de tomber,
Tu auras comme parure le printemps et brilleras dans la lumière.
Calme les bruits qui agitent ton cœur
Nous sommes le vent amenant le printemps !
Maintenant va ! Au-delà de ces nuages,
Loin, toujours plus loin !
Les paroles rappellent que Frieren a du mal à comprendre Himmel mais qu’elle en retire une véritable joie. Elle utilise le regard, reflet de l’âme, pour sa métaphore. Il y a une opposition entre le printemps ramené par le héros et nom de Frieren, le froid. Est-ce pour symboliser le bonheur, l’amour où le changement je ne sais pas. Les fleurs sont un symbole d’Himmel, de sa marque ou du cœur de Frieren. Les lignes 9 et 13 semblent référées la tristesse liée à la mort d’Himmel. Le vent est rapide soudain et parfois violent et résument bien le rapport entre Frieren et Himmel. En clair, Yorushika parle du changement offert par la rencontre en Frieren et le groupe d’Himmel qui l’a changé en bien (lui a apporté le printemps), mais que tel le vent ils ont ésté bref et que le temps oblige Frieren à s’éloigner toujours plus loin d’eux. Cependant Frieren ne devrait pas être triste car une fois la tristesse (le mauvais temps passé) il lui restera tous ses souvenirs et ses enseignements acquis durant son périple (les fleurs). Ce parallèle peut aussi être réalisé pour la relation entre Frieren et Flamme.
Bliss est le premier ending de la série et couvre le premier arc. Par son style aquarelle il donne une impression qu’il se déroule dans les souvenirs de Frieren. On y dessine un parallèle entre la relation Fern/Frieren et Frieren Flamme. Ce rapport s’effrite sur la fin de l’œuvre ou on voit Fern et Frieren plus amie de maître/apprentie et Flamme élève de Serie. La musique est réalisée par la chanteuse Milet et le compositeur Evan Call, les deux personnes ayant pris le plus à cœur la musique de la série.
Ce nom qui me protège
La douceur de ta voix l'appelant avec tendresse
Me revient, quand je ferme les yeux, seule et silencieuse
Comme pour te couvrir de tout mon être
Ta main, si douce
Je veux l'attacher à la mienne pour qu'elle ne s'efface jamais
Lorsque la nuit s'efface et que les fleurs s'ouvrent
Peut-être que je retrouverai le chemin jusqu'à toi
Rêvons, que les ténèbres se délient comme des rubans
Car dans le rêve, tout reste limpide
Et le chemin bleu s'étire, sans fin
Si les paroles jouent sur un double parallèle, à ce moment de l’histoire les paroles concernent beaucoup plus la relation Frieren/Flamme, Fern étant trop jeune et aux balbutiements de sa rencontre avec Frieren. Le texte laisse supposer que Frieren est en train de rêver de Flamme du moment où elle la protégeait. La scène ou Frieren dort laisse supposée que maintenant, Fern protège (émotionnellement) Frieren. Le chemin bleu peut être une référence à Himmel.
Yūsha (ou The Brave) est le premier opening de la série et est chanté par Yoasobi. Il semble y avoir un esprit de continuité entre Bliss et Yūsha. On commence dans les pensées de Frieren qui se réveillerai au contact d’Himmel dans une scène ou le bleu (sa couleur) prédomine. Ça correspond au lâché des cœurs de la musique comme si ce réveil avait quelque chose de saint. Frieren est ensuite montrée dans un monde ou l’on ne voit que le reflet des gens, comme si elle évoluait en inadéquation avec le monde autour d’elle, avec un effet de pluie signifiant une certaine forme de tristesse qui en émane. On retrouve une scène à la trueman show ou Frieren semble bloqué dans un cadre lui-même bloqué dans un cadre ect… et qu’elle essayait d’en sortir (moment accentué par l’arrivé du refrain et d’une musique plus fanfare). Pour finir on y voit un plan de fin ou l’on relit les deux groupes autour d’elle, à l’arrière d’Himmel et à l’avant de Fern. L’objectif étant de montré la posture différente entre les deux voyages mais aussi leur connexion évidente. Frieren fait le choix d’avancer et c’est ce choix de ne pas rester dans le passer qui la poussera à réussir sa transformation.
Comme dans un conte de fées,
C'est le signe que l'histoire touche à sa fin.
Je vais vous raconter un extrait
D'une épopée un peu trop longue.
Ce sont les souvenirs d'un court voyage
Aux côtés du héros qui a vaincu
Un mal qui jadis
A jeté une ombre sur cette terre.
L'histoire s'est terminée
Et le héros s'est endormi,
Laissant sur cette terre
Des jours de paix et de tranquillité.
Le temps s'écoule sans pitié
Et les gens oublient...
Même les traces laissées par sa vie
Commencent à rouiller.
Cependant,
Tes mots, tes souhaits et ton courage
Vivent toujours en moi
Sans jamais me quitter.
"Nous avons choisi le même chemin"
C'est tout ce que c'était censé rester !
Pourtant, je ne sais pas pourquoi, à un moment donné,
J'ai voulu comprendre
Pourquoi des larmes coulaient sur mes joues.
Je sais que c'est trop tard, mais aujourd'hui encore, je veux savoir.
Je pense que si je refais le chemin que nous avons parcouru ensemble,
Même si tu n'es pas là,
Je suis sûre que je pourrai trouver pourquoi.
Pour les nippophones, le retournement de cette chanson est que celle qui incarne la narratrice est Frieren depuis le début. Pas besoin d’analyser le début pour comprendre que Frieren parle de son périple avec Himmel. Les deux derniers couplets sont plus étranges on a l’impression que Frieren parle à Himmel au-delà de la mort, du voyage initiatique qu’elle souhaite entreprendre après celui-ci. Ce premier opening ne rajoute en réalité pas de réelle plus-value, se contentant de suivre l’épisode 1. Peut-être pour ne pas divulgâcher le reste de l’intrigue. Peut-être aussi que Yoasobi ont plus comptés sur la rythmique et la renommée du groupe (réussite car c’est l’œuvre la plus connue des 5) pour ne pas réellement proposer d’avancée artistique.
Heureusement, Milet s’est beaucoup investi dans son travail sur la série et nous offre un réel travail de fond, déjà par Bliss, mais aussi et surtout pour les deux autres chansons de fermeture : les deux parties de la chanson « Anytime Anywhere »
Visuellement je ne comprends pas tout du premier des deux ending. Je vois une idée de cycle, de croit à l’erreur dans les premières scènes. L’omniprésence des fleurs représente surement le fait que Frieren a embrassé la philosophie d’Himmel. Et le fait qu’elle avance ramène à l’idée d’avancée évoquée précédemment. Globalement j’ai l’impression qu’on reste dans l’univers des rêves de Frieren mais cette fois-ci dans un rêve ou notre elfe rêve de son future une fois qu’elle aura revu Himmel ou attend son objectif. Même si Milet n’a pas le timbre de voix de Yaosobi, elle bénéficie cependant des 3 openings avec la meilleure pate artistique.
Et toi, oui, toi qui
Traîne le long des voies ferrées désertes,
Peux-tu m'entendre ?
Te voyant pleurer excessivement,
Et désirant que tu souries,
Je garde précieusement des souvenirs que j'aimerais conserver intacts.
Il y a quelque chose que je souhaiterais te dire.
Des mots banals, mais spéciaux ;
Des mots plus précieux qu'un adieu.
Je vois des choses qui n'auraient pas pu être vues
Si ces yeux n'avaient pas été là.
Mais soudain, pourquoi ? Ils commencent à déborder...
Alors, si je devais naître à nouveau,
Je choisirais sûrement cet endroit une fois de plus.
Alors, si nous devions nous rencontrer à nouveau,
Je ne te laisserais jamais partir, je choisirai le présent.
Même si aucune promesse n'est faite...
Même si je suis perdue dans des jours de solitude...
Ces larmes s'arrangeront. L'aube se lèvera assurément.
Je murmure notre berceuse pour que tu rentres à la maison.
Les paroles de la chanson semblent être les mots que Frieren souhaiterai entendre d’Himmel. Ce sont pour moi des mots d’amours et la première véritable preuve des sentiments de Frieren pour Himmel. Avec cette chanson Milet comprends parfaitement l’ambiance de l’œuvre très nostalgique voir triste mais qui s’effacent derrière les sentiments des personnages : l’amour et surtout l’espoir.
Le cloud du spectacle reste le dernier ending. Il se débute par une Frieren qui semble avoir fait la paix avec la mort de Frieren, qui semble être du notamment à sa rencontre avec Fern qui symbolise le besoin d’avancer de Frieren, son espoir. Frieren reste cependant immensément triste de ne pas avoir vécu son amour avec Himmel. Mais d’une certaine façon cette amour pour Himmel lui donne espoir. Le passage en stop motion est d’une discrétion universitaire et une forme d’évolution, un symbole de l’augmentation de l’effort. La scène suivante montre qu’en suivant sa propre voix mais avec toujours en tête les enseignements d’Himmel, Frieren finira par le retrouver. Mais ce n’est pas le chevalier qui apparaît devant elle mais une version jeune d’elle plus jeune car par ce voyage initiatique Frieren se sauve elle-même. L’ending se finit par un parallèle avec la fin de Bliss ou Fern prend d’une certaine façon la place d’Himmel, présence que Frieren doit chérir.
Et je vais bien (ça va s'arranger) ...
Je t'entends (je me soucie de toi) ...
Je sens le vent taquine mes longs cheveux.
Je me rends maintenant compte, même si c'est un peu trop tard,
Que tout a un sens,
Que même les jours où je pensais rester immobile m'ont permis de te rattraper.
Je vois des choses qui n'auraient pas pu être vues
Si ces yeux n'avaient pas été là.
Mais soudain, pourquoi ? Ils commencent à déborder...
Promis, je ne dirai jamais que je veux te revoir.
Alors juste pour aujourd'hui, laisse-moi me souvenir de toi, d'accord ?
Alors, si nous devions nous rencontrer à nouveau,
Je n'hésiterai pas, je choisirai le présent.
N'importe quand, n'importe où (Peu importe où tu es)
N'importe où, n'importe quand (Montre-moi ton sourire)
Je serai là (Quand je fermerai les yeux, toujours)
Même si le concept d'absolu n'existe pas dans ce monde,
Je te jure que tes sentiments me sont bien transmis à chaque fois.
Ces larmes s'arrangeront. L'aube se lèvera assurément.
Je murmure notre berceuse pour que tu rentres à la maison.
Cette deuxième partie sonne comme une réponse au discour imaginaire d’Himmel récité un peu plus tôt. Frieren comprend que la philosophie d’Himmel n’était pas de marché dans ses pas mais de savoir s’en détourner pour suivre ses propres aventures. Frieren assume que le temps passe et qu’ils ne se reverront jamais, mais chéri le souvenir de leur rencontre. Cette paix semble être la promesse d’un nouvel aurore
Ces mini critiques ont pour but d’être concises. Je reparlerai d’Anytime Anywhere un jour car il mérite un traitement plus en profondeur.
S’il y a bien une personne qui n’aura pas le droit à l’espace qu’il mérita au sein de cette critique, c’est bien le compositeur Evan Call. (Je suis trop nul pour faire des analyses approfondies de composition). Celui-ci s’est dépassé et a fourni une bande son qui n’a pas à rougir devant celle de Violet Evergarden. Evan Call ayant parfaitement compris les aspirations de l’œuvre, il a préféré opter pour des thématiques de fantaisie plus occidentale. Cela se remarque par une absence de piano au profit d’instruments à corde, à vent et de chœurs. Journey of a Lifetime ouvre le bal avec des sonorités qui rappellent le seigneur des anneaux mais en plus jovial et solennel, d’une certaine façon le morceau participe au piège tendu au spectateur durant le premier épisode. Time Flows Ever Onward représente plus le thème de l’œuvre où joie et tristesse se mélange dans une beauté nostalgique certaine. La bande son n’hésite pas à verser dans le très triste comme dans For 1000 Years qui signe la fin du voyage des compagnons d’Himmel et la mort de ce dernier. Le thème alloué à Frieren : Frieren The Slayer rappelle celui d’une boss de fin et présage le twist des derniers épisodes mais aussi assume la force démesurée de notre protagoniste. Evan Call a également prévu des thèmes de combat comme Smash the Dragon ou Zoltraak qui font merveilleusement bien les effets escomptés. Mes analyses de compositions sont bien pauvres aussi je ne peux que vous inviter à l’écouter par vous-même pour vous représenter le travail d’orfèvre dont elle a bénéficier. Avec Frieren, Evan Call signe sans doute la meilleure bande originale de sa carrière, qui arrive à représenter une multitude de sentiment tout en gardant une cohérence globale qui renforce l’impression de totale maîtrise avec laquelle l’adaptation série a été mise en place.
4. Internet
Internet (et le rapport avec le public en général) est une des parties les plus incontrôlables d’une œuvre. Il peut parfois être compliqué de détailler la plus-value artistique d’une partie indirectement contrôler par les vrais artisans d’un travail artistique. Cette partie peut être négligée par ceux qui tentent de l’analyser. Je pense au contraire qu’il faut implémenter le rapport entre l’œuvre et la foule au moins pour contextualiser l’approche de la critique. Aujourd’hui beaucoup de films (surtout vieux) sont plus regardés pour ce que les gens en disent et la position qu’ils occupent dans l’histoire du cinéma que pour leur qualité propre.
Pour présenter un peu mieux Frieren, en 2025, 5 ans et 14 tomes après le début de l’œuvre, le manga se positionne 89eme manga le plus vendu de tous les temps, devant des œuvres de renommé comme Chainsaw man ou Death Note. Elle est la série de mangas la plus jeune du top 100 et celle avec moins de tomes. Les seuls œuvres de son ère faisant mieux que Frieren sont Spy x Family (débuté en 2019 avec 15 tomes qui cumulent 38 millions de ventes) et Les Carnet de l’apothicaire (débuté en 2017 avec 14 tomes cumulant 40 millions de ventes) qu’on aime justement bien associer à Frieren pour la qualité du traitement de son personnage principale. Loin de moi l’idée de dire que Frieren a autant explosé qu’un Demon Slayer et ses 220 millions de ventes en 4 ans de parutions, mais l’œuvre a réussi par sa qualité à se hisser dans un top surreprésenté par des œuvres qui ont logiquement 20 à 30 années de parution de plus. Le manga comme la série sont de grandes réussites critiques, le premier ayant gagné moulte prix dont le prestigieux grand prix du manga 2021 et le deuxième étant la série la mieux noté de tous les temps sur la plupart des sites spécialisés.
Pour cette raison, La série jouit par les fans d’une vraie présence sur internet. Il y pullule fan art, fan fiction et théorie. Une communauté qui s’est insurgée du titre volé de meilleur animé de l’année donnée (sur Crunchyroll, un des sites majoritaires occidentaux spécialisés en animes) à Solo Leveling. Même si on peut contester ce choix éditorial, les fans devraient se rappeler que 8 ans plus tard, peu se rappelle Moonlight alors que tout le monde acclame encore les idées de La La Land. La vérité est que, malgré tout ce que diront les critiques pompeuses de mon style, le vrai pouvoir est donné à ses mêmes fans, qui par leur amour et le passage sélectif du temps, finiront par sanctifier Frieren.
Le site internet sans doute le plus important de l’œuvre est le site Wiki Frieren qui crée un glossaire des éléments présentés dans l’univers de l’œuvre. Si cela à pour défaut de casser l’idée de Flou et de non-dits de l’œuvre, elle permet cependant de mettre en lumière la consistance de ces informations qui peignent le décore de l’œuvre. De plus ce site comme beaucoup d’autres permet de rassembler les fans de d’une certaine manière de faire vivre l’œuvre hors du manga ou de la série.
Avec du recul, Frieren est même sans doute la critique la plus internet et communautaire que je n’ai jamais faite. Pour étayer mes analyses, je me suis permis d’utiliser le travail des gens du Wiki de Frieren et du site de fantaisie BNF. Ma critique s’organise d’ailleurs dans ce processus de sanctification, ou dans une moindre mesure de partage de l’œuvre. En amenant la discussion sur la série, à mon échelle j’élargis les horizons de l’œuvre.
Conclusion
Je tiens à préciser que malgré sa longueur cette petite critique ne prétend pas être une analyse complète de l’œuvre Sousou no Frieren. Pour ceux non fâchés avec l’anglais je ne peux que vous conseiller la chaîne YouTube de PeyTalksAnime qui est un bon complément aux éléments évoqués ici.
En conclusion, si l’introduction laissait sous-entendre que Frieren s’était construit en opposition des codes de la fantaisie, l’évocation des grands thèmes du genre montre un constat plus nuancé. La vérité est que Kanehito Yamada démontre avec Sousou ne Frieren un vrai travail de recul dans son rapport au genre de la fantaisie. Il faut reconnaître que le manga est arrivé avec de grandes thématiques à gérer et qu’il a minutieusement choisi s’il fallait ou non suivre le moule, créant une vision artistique originale mais tout de même cohérente.
Je ne sais plus qui a dit que chaque film parlait en un sens de cinéma ; mais c’est une idée qu’on retrouve chez Sousou no Frieren qui a, peut être sans le vouloir, un vrai propos sur le monde de la fantaisie et plus particulièrement au sein du pays du soleil levant. Déjà elle fait le choix de refuser de s’inscrire dans le sous-genre de l’Isekai. Elle refuse donc de vendre un rêve de non-changements à ses spectateurs qui ne devraient pas s’inquiéter d’être malheureux car à leur mort ils auraient accès à un monde où ils sont par défaut et sans travail préalable des êtres exceptionnels. En un sens Sousou no Frieren se base même sur un propose complètement inverse. Quoi que vous fassiez le temps passera, quoi qu’il arrive il créera des regrets. Mais cette nostalgie, ces regrets et cette tristesse qui s’installent et s’accumulent au fil des années ne sont pas une fatalité. On peut les amoindrir, voir les oublié grâce à la découverte, la curiosité, l’expérimentation, la passion. L’idée ne sera jamais de combattre le temps, le personnage de Frieren est même un rappel de notre insignifiance temporelle au sein de l’univers. Elle est plus subtile et délicate. Pour moi le message de l’œuvre est donné par Himmel : La curiosité et l’émerveillement comme épée face à la nostalgie et aux regrets.
Frieren dispose également d’un féminisme discret et bienvenue dans une société qui ne l’est finalement pas tant que ça. Cela se remarque par la non-sexualisation des corps mais aussi par Fern n’a pas une corp conventionnelle au sein de la japanime. C’est aussi un anime qui met en avant le désir des femmes (scène de voyeurisme de Fern ou de Stark regardant les nuages) sans pour autant le stigmatiser.
Sousou no Frieren est l’œuvre de la vie de Kanehito Yamada et Tsukasa Abe et sera sans aucun doute l’œuvre majeure de toutes les personnes ayant eu l’immense honneur de travailler au sein de l’univers, en un sens de participer à une fraction du voyage de Frieren. En l’attente d’une vraie adaptation réussie de Berserk et surtout de son âge d’or, il est inutile de débattre sur le statut de Sousou no Frieren qui s’impose par sa qualité comme la plus grande série de fantaisie du Japon et même une des meilleures séries jamais réalisées.
Sousou no Frieren est à l’image de son personnage principal, il est mystérieux, solitaire, érudit et dur au premier abord, mais il s’est découvert un objectif qu’il poursuit inlassablement : redéfinir les codes d’un genre fatigué car façonné par une société s’étant abandonné à la tristesse, offrir une lumière à ceux ayant même abandonnés l’espoir.
Vous pouvez penser que le voyage de Frieren est insignifiant ou qu’il ne mènera à rien. Je reste moi persuadé que c’est grâce à l'existence de ce genre de voyage que la Déesse s’est tachée à créer l’univers.
"C'était seulement 1/100 de ma vie"
"C'est intéressant, non ? Que ce 1/100 t'a changé".