Francès est couturière dans un atelier parisien. Un jour, une cliente se présente avec une demande particulière : elle souhaite une robe affreuse qui la ferait « ressembler à la servante du diable », pour la porter lors de la fête d’anniversaire du Prince Sébastien. Francès s’exécute, pour le plus grand effroi de son patron. Pourtant, cette robe horrible, choquante pour bien des conservateurs.rices, va taper dans l’œil d’une nouvelle cliente qui voudra Francès à ses côtés comme couturière officielle. Une nouvelle cliente en la personne…
… du prince Sébastien lui-même.
Commence alors une belle histoire d’amitié entre ces deux adolescents, l’une qui crée des robes, l’autre qui aime en porter, en secret.
Cette BD se présente comme un conte, à l’exception près qu’elle ne commence pas par il était une fois. Mais tous les autres ingrédients sont là : un prince, sa famille, un château, des réceptions, une petite couturière (pauvre, bien entendu), un mariage à venir, des secrets… sauf que dans ce conte-là, ce n’est pas la princesse qui porte des robes, mais bien le prince !
Le prince et la couturière est porté par deux personnages très attachants. Francès tout d’abord, dont le rêve est d’être couturière et de vivre de ses créations. C’est une jeune fille posée, douée, intelligente et loyale. À aucun moment elle ne va le juger, ce prince, et elle sera rapidement prête à tout pour l’aider. Au risque d’ailleurs de s’oublier elle-même.
Vient ensuite Sébastien, ce prince coincé dans ses fonctions, maladroit, peu à l’aise. Il ne se sent lui-même, confiant, libre, que vêtu de robes chatoyantes. Hélas, la pression sociale est telle qu’il ne peut publiquement se « rabaisser » à porter ce genre d’attributs féminins. Qui pourrait comprendre son amour pour la haute couture ? Il craint cette facette de sa personnalité qui risque à tout moment de lui faire perdre toute crédibilité. Et pourtant, il ne peut la refréner puisqu’elle fait partie de qui il est…
Cette BD parle avant tout de la quête d’identité. Comment s’assumer lorsque l’on prend un chemin hors des sentiers battus ? Comment faire face au jugement, au regard des gens, à leur malveillance (parfois involontaire, parfois clairement calculée), etc. ? L’autrice aborde la question des stéréotypes de genres de manière très fine, sans jugement, sans tomber ni dans la facilité, ni dans le grotesque. C’est un vrai soulagement de lire une BD aussi bienveillante sur un thème actuellement aussi sensible. Le prince et la couturière fait réfléchir sans avoir besoin de choquer, provoquer ou juger. L’histoire se déroule sous nos yeux, on est témoins de la douleur de Sébastien, de la fraîcheur de Francès, de la pureté de leur relation. Et plus les cases passent, plus on souhaite les aider, les soutenir, les protéger.
Le graphisme simple et épuré permet de rentrer rapidement dans l’histoire. Là encore, on sent un trait plein de douceur, très coloré, frais. Les couleurs joyeuses et le trait rond appuient la bienveillance qui émane de la BD.
Une BD à découvrir de toute urgence.
https://leschroniquesviennentdemars.wordpress.com/2018/06/13/bd-le-prince-et-la-couturiere/

DameDePique
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le 13 juin 2018

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