Lovecraft passait pour être inadaptable, Gou Tanabe relève le défi, c’est réussi !

Une expédition en Antarctique a été décimée dans des circonstances affreuses, mais inconnues. Le professeur Dyer et son assistant s’envolent à la recherche de l’équipier manquant, le seul en mesure d’expliquer l’inexplicable. Ils franchissent une barrière de hautes montagnes, pour découvrir, sidérés, un monde perdu. Le professeur identifie de troublantes correspondances avec les mythes anciens narrés, entre autres, par le ténébreux Nécronomicon... Les ombres de Cthulhu, des Anciens et des Shoggoths planent sur la ville.


Si le premier tome montrait quelques longueurs et se perdait dans une multitude de personnages, dès les premières pages du second, le lecteur est piégé, comme ensorcelé. Il est submergé par un étrange malaise, des bouffées de fébrilité, de répugnance ou d’angoisse. Impossible de lâcher le livre. Une première lecture trop rapide exigera un second passage, enfin apaisé.


Le scénario reprend fidèlement un ouvrage que l’on estimait inadaptable au cinéma, tant il est riche de descriptions de lieux et d’entités inconcevables. H. P. Lovecraft offrait à l’humanité une mythologie infernale. Jadis, des créatures venues de l’espace ont ensemencé la Terre, alors vierge de toute forme de vie. Elles ont bâti des mondes titanesques, se sont entretuées durant des millions d’années, puis, piégées par la dernière glaciation, ont disparu, nous cédant définitivement la place... Du moins, c’est ce que la plupart des légendes racontent... Certaines, plus rares, prétendent que des entités survivraient au fond des abysses...


Gou Tanabe consacre peu de place à ses héros, pour se consacrer à son extravagante ville. Il travaille ses décors, nous livrant d’extraordinaires vues aériennes en pleines pages, de fascinantes ruines archéennes aux surprenants motifs étoilés, avant de nous convier à la visiter. La peur monte tandis que nous descendons vers les fondations de la cité interdite. Alors même que nous remontons le temps, bruits, odeurs et traces signalent que nous ne sommes plus seuls.


La BD se révèle le médium idéal pour adapter Lovecraft. Elle permet de matérialiser ses hallucinations, sans limitations de budget, ni être tenue à un réalisme parfait. Tanabe met des formes sur l’indicible, tout en gardant une indispensable part de mystère. Il floute certaines de ses visions, rejetant la faute sur la glace, la brume, l’usure ou la distance. Pour ceux qui hésiteraient encore à se le procurer, sachez que l’objet est beau, le format généreux et le prix raisonnable.

Step de Boisse

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