Le cycle des Complots

Cette critique porte sur les albums 9 à 12, ceux faisant partie du cycle des Complots.

Mes critiques sur le cycle de la Mère et le cycle de l'Épouse.

Après deux premiers excellents cycles, force est de constater qu'on perd sensiblement en qualité avec celui sur les Complots. Un défaut néanmoins tristement compréhensible quand on sait que Philippe Delaby, dessinateur de la saga jusqu'au tome 9, est brutalement décédé moins d'un an après la publication de ce dernier*.

Du coup, c'est le dessin qui pèche avec les tomes 10, 11 et 12 ? Eh bien même pas. À vrai dire, son remplaçant, Theo Caneschi, s'en tire très bien. Certes, son style fait plus américain, comics, on s'éloigne des formes plus « réalistes » (notez les guillemets) de son prédécesseur, mais il n'a à aucun moment fait l'erreur de chercher à faire comme Delaby. Il a réussi à imposer son style, à apposer son empreinte sur la saga, tout en détaillant minutieusement chacune des planches présentes dans les trois albums sur lesquels il a travaillé. En fait, il n'y a que concernant le visage de Néron que j'aurais à redire tant ce dernier s'éloigne un peu trop à mon goût de celui dessiné par Delaby.

Donc, c'est le scénario qui pèche, c'est bien ça ? Malheureusement oui. Encore une fois, il faut remettre le décès de Delaby dans la balance… et il suffit de toute façon de lire la note introductive au tome 10 pour s'en convaincre, cet album ayant été, sans surprise, le plus difficile à terminer pour lui : un album bien plus noir que les précédents, pour un cycle qui, il me semble bien, n'a jamais autant fait tuer de ses personnages.

Malheureusement, les tomes 10 et 11 sonneraient presque comme des albums de transition : il ne s'agit pas des plus fournis, ni des plus complexes. On imagine que Dufaux souhaitait en garder pour le tome final, nous teasant la conjuration de Pison dès le tome 10… et finalement, bah autant le tome 12 est meilleur que les deux derniers, autant il n'y a pas de quoi sauter au plafond non plus. On reste loin de ce que l'auteur a pu nous présenter par le passé. Le coup du personnage principal qui perd la mémoire, même temporairement, c'est un grand non, ç'a déjà été fait des tonnes de fois, et Murena ne propose rien de plus à ce niveau-là ; à vrai dire, le fait que le personnage éponyme regagne subitement la mémoire aurait tendance à me faire croire que Dufaux se soit rendu compte que c'était une mauvaise idée. Le tome 11 a Lemuria pour titre, on pourrait donc s'attendre à ce que ce soit un personnage central du récit en question… et finalement, elle n'est pas tant exploitée que ça. Toujours concernant les titres des albums, autant le douzième pourrait nous faire penser à ce que la mort du philosophe soit des plus tragiques, des plus marquantes, autant celle-ci m'a bien moins touchée que celle de l'apôtre Pierre dans le neuvième tome, tragiquement brillante. Enfin, les réactions de Néron sont incompréhensibles, tantôt présentés comme un fou, tantôt raisonné ; il s'éloigne de Murena autant qu'il se rapproche de lui… une manière d'appuyer sur la bipolarité/folie du personnage ? Peut-être, mais force est de constater que c'est très mal amené, qu'on a davantage l'impression de lire des cases mal agencées, que c'est plus incohérent qu'autre chose.

Bref, un cycle assez mal rythmé, malheureusement et logiquement décevant.

*À noter que les auteurs souhaitaient déjà opérer une certaine transition dans la saga dès le tome 9, ce dernier disposant d'un nouveau lettrage et Sébastien Gérard ayant remplacé Jérémy Petiqueux pour les couleurs.