Orange
7.4
Orange

Manga de Ichigo Takano (2012)

Vous aussi, passez à l’Orange…

(Les lignes qui suivent contiennent quelques spoilers réduits au minimum.)


Avant Orange était un terme qui m’évoquait, outre la couleur, un fruit, un opérateur téléphonique et une équipe de foot. Et en ajoutant quelques mots : une chanson, une série télé et un film. Désormais il y aura Orange, le manga de Ichigo Takano. J’ai lu d’une traite les cinq tomes, en sautant les postfaces et Un Printemps dans les étoiles parce que… j’avais trop envie de connaître la suite. Je plains donc celles et ceux qui ont suivi la série tome après tome. Pouvoir découvrir la série en lisant tout d’un coup s’est révélé être un luxe précieux.


Mon intérêt pour la série est récent. Il est né via les annonces de Akata concernant les réimpressions de certains tomes ainsi que l’arrivée du dernier. Comme je n’ai jamais été déçu par les séries proposées par cet éditeur (et je croise les doigts pour que ça n’arrive pas), je me suis laissé tenter par Orange. Cinq tomes en plus, ce n’était pas un investissement phénoménal. Surtout que le « retour sur investissement » fut énorme. J'ai aimé Orange, un vrai coup de cœur.


Pourquoi ? Pour tout un tas de raisons dont l'addition fait de la série un plaisir vrai, parfaitement exécuté en cinq tomes.


Orange c’est d’abord une bande d’amis : Naho, Azu, Takako, Suwa, Hagita forment un quintet solide qui va accueillir un sixième membre : Kakeru. De quoi équilibrer les genres (3 garçons et 3 filles) mais aussi perturber le quintet : alors que Suwa tient à Naho, celle-ci n’est pas indifférente à Kakeru. Un triangle amoureux se forme oui - encore un diront certains -, mais ici il va connaître une trajectoire bien particulière. Surtout, chaque personnage se distingue des autres, a sa propre couleur : Naho est une jeune fille aux petits soins pour ses amis, toujours prête à rendre service (d’où une certaine naïveté) et qui manque de confiance en elle – évolution à venir ! – ; Azu et Takako sont les deux amies de Naho, toujours prêtes à l’aider et à se moquer (gentiment) des garçons ; Suwa est le footballeur beau gosse et toujours attentionné envers Naho ; Hagita est un jeune homme à lunettes qui apporte sa touche d’humour bien à lui (et se révèlera éminemment précieux à un moment donné…). Kakeru ? C’est un peu le facteur X, dont le sourire quasi-permanent n’aide pas à décoder le personnage.


A partir de là, nos six compères vont vivre différents moments ensemble, qui rythment la vie des jeunes de leur âge : sorties, fêtes, compétitions sportives à l’école, différends avec d’autres (Ueda, sale peste !)… Certains moments concerneront plus spécifiquement certains personnages. Mais dans l’ensemble aucun n’est sacrifié par rapport aux autres. Certes c’est surtout Naho qui est sur le devant de la scène, mais les autres personnages ne sont jamais loin. La vie est faite d’interactions, Orange ne déroge pas à cette règle. D’ailleurs le personnage de Hagita est sans doute mon préféré : ce râleur à lunettes, à l’humour pince sans rire, est attachant. Pour un peu, il me ferait penser à Tsukishima (Haikyu!!)…


Surtout, Orange se signale par cette fameuse lettre reçue par Naho. Une lettre lui venant de la Naho du futur, de dix ans plus âgée. Pour faire simple (et éviter de trop en dire), la lettre lui apprend qu’un événement terrible va se passer. La lettre l’invite alors à agir pour éviter que cela n’arrive et lui indique ce qu’il faut faire, en indiquant ce qui va se passer tel jour, ce que Naho doit faire…


Cette incursion du futur est un plus pour différents points :



  • Déjà parce que le récit de Orange oscille entre présent et futur, avec des moments nous conduisant dix ans plus tard, avec Naho et les autres, pour nous permettre de mieux comprendre ce qui s’est passé, comment ils vivent, ce qu’ils regrettent… Cela permet de structurer le récit et de faciliter quelques ellipses dans le présent. Ces va-et-vient se repèrent aisément et ne porte pas du tout atteinte à la compréhension du récit.

  • Ensuite, le fait que Naho s’adresse à celle qu’elle était dix ans auparavant ouvre la porte à pas mal d’interrogations : est-il possible de modifier le passé (pour changer l’avenir) ? Si oui alors les informations contenues dans la lettre conservent-elles toute leur pertinence ? Ou alors les changements ne sont que marginaux et ne sauraient infléchir la direction générale ? Cette question est moins triviale qu’il n’y paraît ; Naho aura l’occasion de s’en rendre compte. Il ne suffit pas de faire un acte pour que tout soit résolu. Il faudra bien des gestes et des paroles pour espérer éviter que les regrets n’apparaissent, surtout que la lettre ne détaille pas ce qu'il faut faire de a à z mais donne de grandes indications.

  • Enfin, en lien avec le point qui précède, cette présence du futur donne du poids à nombre de petits détails, qui pourraient sembler anodins, mais qui prendront une importance décisive par la suite.


Le manga aborde alors plusieurs thèmes sérieux, en rapport avec la mort, sans jamais être ni simpliste ni donneur de leçons. Je me censure pour ne pas en dire plus mais Orange montre bien comment le mal-être ne se résout pas d’un coup de baguette magique. Il faut du temps, tout un travail pour espérer sortir de cette spirale… sans garantie d’une sortie définitive.


Dans le mot de l’auteur du premier tome, Ichigo Takano nous dit qu’elle n’est « pas douée en dessin » mais que cela la pousse à continuer à s’améliorer. Je n’ai pas du tout été rebuté par son coup de crayon. J’ai aimé le dessin et la manière dont il se marie avec le récit et les dialogues. A cet égard, outre l’auteur il faut aussi saluer le travail de traduction, d’adaptation, de corrections, de lettrage… car le rendu est parfait pour moi. Merci à toutes ces petites mains ! Idem pour les jaquettes (les couleurs et leurs associations sont superbes) et le jeu entre le devant et le derrière, les illustrations présentes sur le tome sont aussi jolies à voir.


Avec Orange on rit, on s’interroge, on a la gorge qui se serre et les yeux qui s’humidifient lors de certains passages. C’est un très beau manga sur l’amitié, surtout, sur l’amour, aussi, sur les bentôs… Sans jamais se précipiter l’auteur nous offre une belle histoire qu'on aime lire et... relire ! Un très grand merci à Ichigo Takano et à Akata pour ces moments de lecture.

Anvil
9
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Créée

le 3 avr. 2016

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2 commentaires

Anvil

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