Au début de mon adolescence, je profitais des quelques semaines de vacances passées chez mes cousins pour (re)lire leurs bandes dessinées par séries entières. J’étais encore trop jeune pour remarquer combien les Blake et Mortimer étaient réactionnaires, et à quel point la série des Alix s’accommodait d’une atmosphère homo-érotique. (Que mes cousins appartinssent à la branche catholique de la famille et soient devenus depuis de farouches opposants au « Mariage pour tous » est l’une de ces ironies que le sort réserve à ceux qui ont de la mémoire. Bref.)


En revanche, j’avais très bien compris qu’entre le Sphinx d’or et la Tiare d’Oribal, par exemple, ou entre l’Énigme de l’Atlantide et l’Affaire du collier, ou encore entre Au-delà des ombres et les Archers (oui, il y avait aussi les Thorgal), il se passait quelque chose qui n’était pas raconté. Deux des plaisirs de ces séries consistaient précisément à snober les renvois de bas de page (« Voir tome précédent » : je le savais, ducon, je suis un initié, moi !) et à imaginer les événements passés sous silence.
Or, on est au treizième tome, et Walking Dead n’a pas encore procédé à une telle rupture. (Si mes souvenirs sont bons, cela arrivera au tome 22.) Si on trouve quelques ellipses – notamment le coma fondateur –, elles sont mineures. Il n’y a probablement pas une quinzaine de jours pendant laquelle on ne suit aucun des personnages principaux. Et des albums comme Point de non-retour mettent en lumière ce que le procédé peut avoir de fastidieux.


Non qu’il ne s’y passe rien : l’épisode propose son lot de morts et de retournements de situation, approfondit certaines relations entre personnages, en fait évoluer d’autres. Mais le long cours y est décidément privilégié. Par ailleurs, c’est en vain qu’on y chercherait un parti pris, quelque chose d’un peu plus risqué qu’une liste d’ingrédients – trois cuillerées d’intrigue sentimentale, cinq cents grammes de zombies coupés en dés, un zeste de paranoïa, trois morceaux de réflexion sociale… D’où une forme d’essoufflement, comme si la mécanique tournait à vide : le scénario comme une girouette plutôt que comme un moteur.
Alors, quitte à réécrire la série, je suggère… Pourquoi ne pas avoir marqué une pause plus nette entre la chute de la prison et l’arrivée à Alexandria ? Pourquoi ne pas avoir laissé de côté certains personnages, temporairement si besoin est ? Pourquoi, tant qu’à faire, ne pas proposer une intrigue sentimentale claire et suivie, plutôt que de réduire la dimension psychologique de Walking Dead à une toile de fond ?


Critique du volume 12 ici, du 14 .

Alcofribas
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le 1 mars 2017

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