Un Disney noir.
BlackSad - Quelque part entre les ombres, c'est avant tout un dessin absolument superbe. Cadrage, expressions, mouvements, détails foisonnants. Une réussite. Surtout, la patte graphique sert...
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le 23 avr. 2012
61 j'aime
20
BD franco-belge de Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido (2000)
Petit à petit, j'ai envi de me replonger dans quelques BDs que j'avais beaucoup apprécié et bien entendu... Après ma découverte tardives des Indes fourbes, qui est pour moi un véritable monument. Je n'ai pas pu ne pas repenser à ce dessinateur de génie et je me suis donc lancé dans une relecture un peu machinale, sans trop rien attendre.
Je me souviens encore du premier regard que j’ai posé sur Blacksad. Pas forcément celui d’un lecteur, mais celui d’un curieux dans une librairie, stoppé net par une couverture saturée d’ombres et ce félin au regard grave, presque las. Sans oublier ce titre, “Quelque part entre les ombres”, comme une promesse de récit noir, d’ambiance poisseuse, de dialogues secs et de ruelles pleines de non-dits.
Je n’ai pas été déçu et cette redécouverte n'a fait que confirmer le génie de ces planches!
Ce premier tome, c’est une démonstration de style. On y découvre John Blacksad, détective privé à l’ancienne, gueule cassée, cœur cabossé. Il vit dans un monde peuplé d’animaux anthropomorphes, mais très vite on comprend que ce n’est pas une coquetterie graphique, c’est un vrai langage. Chaque animal semble avoir été choisi pour dire quelque chose de son personnage, le flic-chien loyal, le politicien-requin, la vipère manipulatrice… Ce n’est pas un gimmick, c’est une écriture visuelle et ça marche diablement bien.
Graphiquement, on frôle l’insolence. Guarnido, ancien animateur chez Disney, livre des planches d’une richesse hallucinante. Tout suinte la maîtrise. Les jeux d’ombres, les cadrages dignes du meilleur polar, les expressions subtiles et parfois glaçantes des personnages… C’est d’un niveau qui, encore aujourd’hui, rend la majorité des BD contemporaines un peu fades à côté. Il y a une densité dans chaque case, une générosité dans chaque décor. Et bon sang cette ville, ce monde rétro des années 50, gangrené par la corruption et la violence, prend littéralement vie.
Mais ce serait injuste de ne retenir que l’enrobage. Le scénario de Diaz Canales tient la route, et même s’il suit les codes très balisés du polar hard-boiled (meurtre d’une ancienne amante, mafia, flics corrompus, vengeance), il le fait avec élégance. L’écriture est sobre, jamais pompeuse, et parvient à insuffler une vraie mélancolie au récit. Il y a quelque chose de résigné dans cette enquête. Pas de twist spectaculaire, pas de retournement fracassant. Juste une chute amère, et un homme (un chat) qui comprend un peu plus à quel point il est seul au milieu de cette faune.
Cela dit, c’est peut-être là aussi que réside une limite. Ce premier tome est une mise en place. Une belle mise en place, brillante même, mais encore assez sage dans ses ambitions. On est dans l’hommage plus que dans la subversion. On sent que l’univers pourrait aller plus loin, bousculer davantage. Et à la relecture, on voit aussi que l’intrigue est assez simple, presque linéaire. Le plaisir vient autant de l’ambiance que de l’histoire elle-même. Ce n’est pas un défaut, mais c’est à noter. Ce n’est pas The Long Goodbye de Chandler, mais c’est un très bel hommage.
Et pourtant, malgré ces réserves, je l’aime beaucoup, ce premier Blacksad. Il m’a donné envie de lire la suite. Il m’a donné envie de dessiner. Il m’a donné envie de créer des personnages animaliers. Et surtout, il m’a montré que la BD franco-belge pouvait encore sortir des sentiers battus tout en gardant une classe folle. On n’est pas dans la BD “underground”, ni dans le manga ni dans le comics, mais dans un entre-deux parfait, maîtrisé, respectueux des genres qu’il convoque.
Quelque part entre les ombres reste pour moi un excellent tome d’introduction. Pas un chef-d'œuvre absolu, mais une porte d’entrée somptueuse dans un univers qui ne demande qu’à s’étoffer. Si vous aimez les polars, si vous aimez les belles images, si vous aimez les histoires qui sentent la pluie, la fumée, et les regrets, alors vous ne pouvez pas passer à côté.
Créée
le 14 juin 2025
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C'est dans un monde où les animaux ont pris la place des humains (civilisation, habitude, évolution etc) que nous plonge Blacksad, où l'on suit un chat noir à museau blanc dénommé John Blacksad et...
le 16 août 2015
50 j'aime
15
Le chat qui a du chien, le plus chouette, le plus attachant, le plus badass, le plus mrrraw de tout les détectives privés ! L'esthétique est superbe, les parallèles historiques sont très -très- bien...
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le 16 juin 2010
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J'ai entendu la sortie du derniers chapitre pour pouvoir enfin partager tous l'amour que je porte à cette série. Gintama, que j'ai dans un premier temps connu fin 2006 avec son adaptation animé, que...
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le 1 sept. 2019
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Y'a un truc que je trouve insupportable chez les gens de SensCritique... Je consomme beaucoup de produit culturel, donc je passe beaucoup de temps sur ce site et je lis aussi beaucoup de critique...
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le 19 oct. 2018
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J’ai pas tenu bien longtemps… Seulement 5h… Puis voici l’éternelle question, ais-je le droit de donner un avis car j’ai fait le choix de ne pas perdre encore 35h sur ce jeu? Je suis vraiment désolé,...
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le 3 juin 2020
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