Petits cauchemars entre amis

Avec un concept qui évoque Les Griffes de la Nuit et une écriture pilotée par l’un des maîtres du polar français, La Brigade des cauchemars avait tout pour me séduire. Et le pari est plutôt réussi. L’intrigue repose sur un père ayant mis au point une machine capable de projeter physiquement ses enfants dans les rêves de ses patients afin de les libérer de leurs cauchemars. Forcément, l’ombre de Nolan et de son Inception plane, même si ici le récit adopte clairement un ton jeunesse, totalement pensé pour un lectorat ciblé.

Dès la quatrième de couverture et les premières pages qui mettent intelligemment en place l'histoire, difficile de ne pas sentir son imagination s’emballer devant une telle proposition. Qui aime l’univers du rêve, les enquêtes et une petite louche d’horreur trouvera largement son compte dans cette BD sans prétention. Les dessins de Yomgui Dumont, pas tout à fait dans mon goût, mais toutefois précis, proposant de jolies cases et un découpage assez inventif pour garder nos sens en alerte.

Le vrai bémol vient du format : une quarantaine de pages, forcément trop serrées pour développer pleinement les personnages ou installer une véritable empathie à leur côté. Le trio (qui se transformera bien vite en quatuor) est pourtant prometteur. Chacun semble définit par un objectif précis et une fêlure qui lui est propre et auquel, à n'en pas douter, le royaume des rêves viendra les confronter. Alors oui, le temps dans les rêves s'écoule plus rapidement (1h = 24h, ici) ; d'accord, mais quand même, certaines scènes sont sacrément expéditives et notre suspension d'incrédulité en prend pour son grade.

Evidemment, on sent bien que ce n’est qu’un premier tome, pensé comme l'amorce d’une saga, mais le récit reste très linéaire et didactique, au point de reprendre presque tous les clichés liés au rêve comme espace « psychanalytique » bas du front. On aurait souhaité un peu plus de folie et d'audace. Le lectorat adolescent n'est pas si bête que certains s'adultes se complaisent à le croire. Dès lors, pour un récit qui tente de rendre un tel hommage à l'imagination débridée des enfants et des horreurs qu'ils peuvent s'auto infliger, cela en devient presque paradoxal.

En l’état, je reste curieux de découvrir la suite, avec l’espoir que Franck Thilliez affinera son écriture pour un médium aussi différent que celui qui a fait sa réputation.