Solanin
7.8
Solanin

Manga de Inio Asano (2005)

Quelle coïncidence: il y a une semaine, je demandais aux internets quoi faire avec mes pommes de terre germées - oui je sais - et là, je vois apparaitre le terme Solanine, une substance potentiellement toxique à haute dose qui se développe lorsque la pomme de terre moisit. Ça ne fait pas tilt tout de suite mais très rapidement en ouvrant ce manga, les connexions se font et c'est parti, du grain à moudre pour une intro comme je les affectionne, une tranche de racontage de vie sans grand rapport avec le livre ou son contenu !


Et pourtant ce manga d'Inio Asano, il y a de quoi en dire !


J'ai vite été touché par la justesse des rapports d'une jeunesse sortie des études qui affronte le monde naissant des adultes. Qui se pose des questions sur sa place dans ce monde et sur ses motivations. Qui se sent effacée face à ses choix et enfermée dans un fatalisme dans lequel elle se trouve engluée. Et quand vient la porte de sortie vers une liberté retrouvée, celle-ci arrive avec son lot de doutes et de remises en question.


J’ai été bluffé par la façon qu’a eue l’auteur de retranscrire les moments de réflexion, les moments de flou aussi, ou ceux de liberté. Et que dire de la construction des personnages et de leurs relations ? C’est juste trop fort. Bizarrement, on ne sent pas trop le côté japonais : on a vraiment l’impression que cela parle d’une jeunesse "internationale". C'est marrant, cette justesse dans le ton des relations, je l’ai rapidement mise à côté de ce qu’on avait pu trouver dans Shin Zero de Babelet et Singelin. Preuve, ou signe, d’une culture de la jeunesse contemporaine plus que d’une culture française ou japonaise.


Et comment ne pas parler de la beauté de certains moments qui font parler la poésie de la fragilité, et qui parviennent à nous mettre face à nos propres incertitudes, passées, ou redevenues présentes ?


Le tout est porté par un trait lumineux et rempli de caractère. Les dessins d’Asano sont même parfois très réalistes. On sent que, sur certains décors, il part de photos qu’il retravaille, ce qui donne une base très concrète à l’univers, presque figée dans le temps. Et en même temps, les visages restent simples, doux, expressifs. Il joue beaucoup sur les regards, les petits gestes. Ça ne crie jamais, et ce n’est pas en mode manga ultra expressif qui en rajoute des tonnes – ce qui renforce paradoxalement le côté comique de certains dialogues.


Si j'ai moins été emballé par la fin du livre, que j'ai sentie un poil trop convenue et moins réaliste que la première partie, je l'ai néanmoins trouvée touchante et toujours aussi fine.


A noter que la version intégrale contient une conclusion non présente dans le second et dernier tome de la duologie originale. Mais à y réfléchir, la fin du tome 1 aurait pu être quasi parfaite, et on aurait tenu là un petit chef d'œuvre tragique.


Chef-d’œuvre ou pas, Solanin reste une franche réussite. Un manga touchant et sincère, qui m’a donné envie d’aller plus loin avec l’auteur. Et ça tombe bien, Errance m’attend déjà quelque part sur les étagères de ma bibliothèque.

Ben-Hardo
9
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le 22 juil. 2025

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Ben Hardo

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