Le postulat de départ de Spectregraph est aussi audacieux que dérangeant : une femme, agent immobilier, laisse son bébé seul sur une chaise haute pour conclure une vente décisive. Ce choix, aussi difficile à concevoir soit-il, est présenté comme une nécessité désespérée, dictée par une situation financière critique. Si cette décision peut heurter, elle sert surtout de déclencheur à une atmosphère pesante et troublante qui s’installe dès les premières pages.
James Tynion IV excelle ici dans ce qu’il sait faire de mieux : bâtir une ambiance intrigante, presque malsaine, où l’étrange se mêle à l’intime. L’histoire est servie par les dessins envoûtants de Christian Ward, dont les couleurs et les compositions renforcent cette sensation d’étrangeté. Quelques planches paraissent parfois un peu brouillonnes, mais l’ensemble reste cohérent et visuellement fort. Le bébé, seul à la maison, devient un élément symbolique fort, accentuant la tension et le malaise.
Sur le fond, le récit aborde des thématiques intéressantes : la quête d’immortalité, le besoin de prendre sa vie en main et que les coups dures font partie de la vie. Malheureusement, la dernière partie du récit devient plus confuse, et il est parfois difficile de suivre où Tynion veut réellement nous emmener.
Malgré cela, Spectregraph reste une lecture intéressante, portée par une ambiance unique et des personnages auxquels on finit par s’attacher, même si cela n’allait pas de soi au départ. Une expérience imparfaite, mais sympathique.
P.S. : Superbe édition de la part de Delcourt !