Reboot cinématographique oblige, l'actualité Superman devient assez chaude au niveau comics V.F., et c'est une bonne chose: conspué, ridiculisé, rendu has-been par la génération actuelle (bande d'ingrats, va !), l'Homme d'Acier a pourtant un potentiel scénaristique assez fort d'après ce que j'ai pu en glaner dans mes diverses lectures DC tels que "Dark Knight Returns" et "Kingdom Come". Personnellement, j'ai toujours ressenti le besoin de me plonger dans un récit des origines pour totalement accepter un personnage, quel qu'il soit. Lorsqu'elles sont bien écrites, de telles aventures permettent toujours une relecture cohérente d'un univers fictionnel qui pourrait sembler sans cela quelque peu bancal. C'est précisément le genre de travail effectué par Mark Waid, encyclopédie vivante de l'univers DC, déjà responsable du culte" Kingdom Come" sus-cité.

Avec ce "Birthright", l'idée est bien entendu de remettre le premier des Super-héros au goût du jour en le recadrant au 21è siècle. Pour cela, Waid propose une présentation de tous les éléments constitutifs de la légende (Smallville, Luthor, la kryptonite, Loïs Lane,...) dans un écrin moderne avant tout basé sur la psychologie des personnages. Les détails les plus ridicules (telles que les célèbres lunettes qui déguisent si parfaitement Superman) sont justifiés au sein d'un processus de recréation crédible et qui a le mérite d'humaniser Clark Kent. Bien sûr, on reste dans une vision malgré tout classique du personnage, le but n'étant pas d'inventer des éléments qui modifieraient complètement le Superman que tout le monde connait, mais ce n'est pas ce qu'on demande à Waid (du moins pas moi, vous je sais pas...).

On pourrait reprocher à Waid d'oublier quelques éléments explicatifs comme la justification "physique" du vol de Superman et de sa quasi-invulnérabilité. La réponse à pourtant déjà été fournie ailleurs: le héros est entouré d'un mince champ télékinésique lui permettant de soulever son corps à l'envi, ce même champ lui servant de bouclier contre toute attaque corporelle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle son collant, pris dans le champ, n'est pas censé être détruit tandis que la cape reste vulnérable... Puisque nous sommes dans la SF, j'apprécie particulièrement ce genre de détails qui consolident le travail effectué sur un univers de fiction, alors traitez-moi de maniaque si vous voulez, je n'en n'ai cure !

Si DC Comics a toujours été embêté par les débuts de l'Homme d'Acier, au point de lui octroyer au moins CINQ récits des origines (là où Batman n'en a que 2, le deuxième étant le "Year One" de Frank Miller, intouchable depuis près de 30 ans), j'ai du mal à comprendre cet acharnement devant la réussite de ce Birthright. Tout y est. La quête intimiste du début se termine dans une bataille épique, les nouvelles technologies et moyens de communication font partie intégrante du récit (Internet est un véritable outil narratif) et la récéption du public vis-à-vis de Superman se veut plus cynique, conformément aux évolutions paranoïaques de la société, traitées intelligemment tout au long de l'histoire... Non vraiment, à part une exposition de sa vie sexuelle (peut-il faire l'amour à une femme sans l'exploser ? Grande question...), je vois pas ce qu'on pourrait ajouter.

Enfin, je tiens à préciser que la partie graphique est bien plus impressionnante que ce que laisse présager la couverture (j'aime beaucoup le jeune Clark de 25 ans que l'on présente ici par exemple) même si Yu a tendance à faire pas mal de faux raccords ou du moins de transitions bizarres entre les vignettes: on a parfois l'impression que plusieurs minutes se sont écoulées entre deux cases mais non, le dialogue continue comme si de rien n'était. Certains combats en deviennent assez difficiles à décrypter... Plus grave, je ne comprends pas comment Yu peut justifier le fait que son jeune Superman, musclé mais élancé, devienne subitement un monstre de bodybuiling. Juste parce que c'est fun ? Mouais... Je suis tout de même prêt à pardonner tout cela, ne serait-ce que pour certaines scènes merveilleuses sur Krypton ou Metropolis qui, pour le coup, donnent vraiment une impression de splendeur et de dépaysement.

Lecture plus que conseillée donc, pierre fondatrice d'un nouvel angle de vue sur une icône d'autant plus méconnue que tout le monde pense la connaitre. Et tant pis si ce "Birthright" n'est plus considéré comme canonique, surtout depuis le (discutable) relaunch. Qu'on se le dise: Superman n'appartient pas au passé mais est bel et bien toujours l'Homme de Demain.

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le 11 mai 2013

Modifiée

le 11 mai 2013

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Amrit

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