J’ai découvert cette bande dessinée, Sur le front de Corée, un peu par hasard, en m’intéressant à Henri de Turenne (1921-2016) à travers la série Les Grandes Batailles. Curieux d’en savoir plus sur ce journaliste et son parcours, je me suis plongé dans cet ouvrage et ce fut une belle surprise !
Parue le 18 octobre 2024 aux éditions Dupuis, cette bande dessinée de 120 pages en couleurs se concentre principalement sur la guerre de Corée (25 juin 1950 - 27 juillet 1953). Henri de Turenne y a été envoyé en tant que reporter de guerre, couvrant le conflit entre juillet 1950 et mars 1951. À travers un scénario signé Stéphane Marchetti, le récit nous plonge dans l’enfer de cette guerre souvent méconnue, en adoptant un point de vue assez original : celui du journaliste de terrain, témoin des atrocités et des absurdités du conflit. L’album retranscrit parfaitement la tension et le danger constants auxquels étaient confrontés les reporters de guerre, prêts à risquer leur vie pour témoigner.
L’une des forces du scénario est sa capacité à retranscrire toute l’absurdité de cette guerre, qui s’achève sans vainqueur, sur un simple statu quo, avec le maintien de la frontière au 38ᵉ parallèle. À travers les yeux d'Henri de Turenne, on perçoit l’incompréhension face à un conflit sanglant où aucune des deux parties ne parvient à réellement prendre l’avantage. L’œuvre ne cherche pas à glorifier la guerre, bien au contraire : il met en avant la brutalité des combats, l’impact sur les populations civiles, mais aussi la manière dont les journalistes doivent composer avec la censure et la propagande des différentes parties en présence.
Mais la bande dessinée ne se limite pas au conflit coréen. Elle évoque également, bien que trop brièvement à mon goût, la carrière télévisuelle d’Henri de Turenne. En particulier, elle revient sur la série documentaire Les Grandes Batailles, une référence pour les passionnés d’histoire militaire (voir ma critique à ce sujet : https://www.senscritique.com/serie/les_grandes_batailles/10556372 ). J’ai beaucoup apprécié que Rafael Ortiz, le dessinateur (déjà auteur d'autres bd à traits biographiques et historiques dont l'une était consacrée à Mao Zedong), ait pris le soin de reproduire certaines images marquantes de la série, comme la bataille de Stalingrad ou le portrait d’un pilote de Stuka, bombardier en piqué allemand de la Seconde Guerre mondiale.
Sur le plan graphique, le travail de Rafael Ortiz est efficace et immersif. Son trait, précis et nerveux, capte bien l’intensité des combats et l’angoisse permanente qui pèse sur les reporters. L’utilisation des couleurs renforce l’atmosphère pesante du récit, avec des tons parfois froids et désaturés pour refléter la dureté du conflit. On ressent une vraie recherche documentaire dans les uniformes, les décors et l’armement, ce qui apporte une authenticité supplémentaire à l’ensemble.
En conclusion, cette bande dessinée est une lecture captivante, à la fois instructive et prenante. Elle permet de (re)découvrir un épisode méconnu de l’histoire, tout en mettant en lumière le rôle essentiel – mais souvent dangereux – des journalistes de guerre. Une œuvre que je recommande aux amateurs d’histoire, de journalisme et de bande dessinée ou tout simplement aux curieux !