Ecole buissonnière

Un shonen qui a tout d'un seinen derrière ses graphismes innocents, le décalage est volontaire pour jouer un peu plus sur l'impact horrifique de cette initiation à la dure. Pour des premiers pas dans le manga l'auteur développe un savoir-faire redoutable d'efficacité et de maîtrise, j'ai rarement vu un scénario aussi bien ficelé et qui ne se délie pas sur la durée. Les premiers tomes carcéraux gèrent le huis clos et la mise en place de l'univers avec une tension omniprésente et toujours plus de rebondissements remarquablement bien amenés et distillés. Par la suite le manga se renouvelle sans problème, en passant du truc d'évasion au survival puis à l'horrifique ou au post-apocalyptique et en imbriquant le tout avec cohérence et pertinence.
Les partis pris de l'auteur à travers son inversion des rôles homme/animal amènent à des questionnements sociétaux qui ont le mérite d'être savoureusement dérangeants et d'instaurer une réflexion absente de la plupart des shonen grand public. Les héros sont assez classiques mais d'autant efficaces et leur intelligence hors norme les rend plein de ressources, mais c'est surtout les méchants inquiétants à souhait qui font tout le sel de l'aventure. Les "mamans" par exemple que l'auteur a malicieusement détourné de leur fonction première pour les rendre encore plus dérangeantes. Seuls les enfants en bas âge de la bande ont essentiellement un rôle de "boulets scénaristiques", ils servent avant tout à corser encore un peu plus la tâche des héros. Bref une réussite que la rigueur scénaristique place très nettement au dessus de la production grand public actuelle.

P.S : Après avoir lu les derniers tomes décevants je modère mes éloges, le final donne l'impression d'avoir été bâclé comme si l'auteur avait perdu l'inspiration et le goût de la chose. On tombe dans le truc rushé qui sacrifie la cohérence de l'oeuvre à un happy-end larmoyant assez grossier, vraiment dommage.