Riad Sattouf continue son périple de jeunesse au Moyen-Orient, et son jeune double a maintenant 7 ans, un petit frère, et toujours autant de soucis à l'école. On retrouve avec plaisir la petite famille des Sattouf dans leur appartement au sein d'un village syrien, et reprendre le fil de cette enfance est bien sympa. Ce troisième tome est sans doute un peu moins passionnant, plus en retrait, je trouve, par rapport aux premiers volumes, la faute à un certain déjà-vu. Mais il faut garder à l'esprit que c'est un récit d'enfance, pas une épopée lyrique!
Cette BD reste en effet cette fenêtre ouverte sur d'autres mœurs, sur cette dictature de l'époque (un Assad, déjà, le papa du boucher actuel), sur un couple qui s'étire dangereusement entre deux cultures. Sattouf s'attaque de plus belle au personnage de son père, avec cette ambiguïté déjà perçue dans les premiers volumes entre la fascination de l'enfant pour ce mystérieux personnage qu'est son papa, et le regard acerbe de l'adulte sur un paternel qui finalement manquait de stature et peut-être de courage. Une scène importante du livre prend place dans le bureau du père, où la réalité fracasse quelque peu le portrait idéal. Bien que la famille syrienne s'efface un peu dans ce livre, la politique continue à s'inviter dans le récit, notamment par le biais d'un "ami" du père, efficace portrait de la corruption en dictature.
Le contraste des cultures françaises et syriennes s'impose de plus en plus, avec ce tiraillement dans le couple, cette fatigue de la maman de Riad face à son environnement syrien. Noël et Ramadan, la dure école syrienne et la petite école bretonne, la présence des chrétiens en Syrie, et le traumatisme d'une circoncision tardive (et une horrible scène de chatons en Bretagne) sont les ingrédients de cette confrontation entre les deux enfances du petit Riad.
Un bon troisième tome donc, plus personnel, car les souvenirs sont plus précis, et les émotions plus réelles que dans la petite enfance. (Sympa la fascination pour Conan, manifestement toujours présente aujourd'hui). Le regard reste très critique sur la Syrie des années 80, exprimant une franche exaspération via la mère de notre héros. Instructif et touchant, une continuation que je vous recommande , guys et guysettes!