Un merveilleux quatrième tome.
À revenir un peu sur les toutes premières pages pour sonder le chemin parcouru, on se dit que plus le propos de Riad Sattouf gagne en gravité plus son dessin gagne en simplicité et en pureté.
Quelques lignes, quelques traits fluides, quelques points suffisent à dire l'étonnement, la sidération du garçon face à la figure changeante de son père. L'apparente simplicité du récit, son aspect facile parfois et la reposante légèreté de certains passages n'occultent pas un dévoilement, une mise à nu que l'on ressent puissante, plus encore peut-être dans ce tome-ci que dans les précédents.
"L'arabe du futur" est à ce titre tout l'inverse de ce que Roald Dahl disait de l'autobiographie, "livre qu'on écrit pour raconter sa vie et qui déborde, en général, de toutes sortes de détails fastidieux". Les dangers de l’œuvre-fleuve sont balayés par le plaisir de saisir les préoccupations de l'enfant, qui s'affinent et gagnent en densité dans une merveille de dessin simple, aérien et limpide. Autour du jeune homme, les questions de notre culture multiple, éclatée, et de la construction de notre identité d'aujourd'hui sont exposées avec éclat et tendresse. Quant aux détails fastidieux, ce sont ici souvent les plus marquants : taureau sur la télé, cousins étranges, coiffure à la Tome Crouze, frelons et fantômes, mimiques d'un père gêné, mouvant, maladroit, dur, fuyant, doux parfois.