Les profs d'histoire-géo n'ont pas de chance. Ils doivent regarder beaucoup de films à sujet historique, en général déprimants, parfois mauvais (les téléfilms avec Jacquouille sur Napoléon), et ensuite, si ça se justifie, les infliger périodiquement à des enfants peu concernés.


Esclave douze ans (pourquoi n'a-t-on pas traduit en français ?) raconte l'histoire d'un Noir libre, Solomon Northup, qui est saoûlé et enlevé pour être vendu en Louisiane. Il est rebaptisé Platt et "attendri" à coups de battoir.


Au début, il a un maître humain, qui reconnaît ses mérites (Cumberbatch), mais un maître d'oeuvre blanc le défie, et il riposte, aussi est-il vendu au pire des cotonniers, E. Epps (Fassbender), un illuminé sadique. Il assiste à la destruction de Patsey, une fille très travailleuse qui a les faveurs du maître, et sur qui la maîtresse se venge. Il tente de faire passer une lettre à un contremaître blanc, qui le dénonce, mais il arrive à persuader Epps qu'il ne sait pas lire. Un jour, un quaker (B. Pitt) ou apparenté vient travailler sur une annexe en bois, et il accepte, malgré tout le danger que cela implique, de contacter la famille de Solomon. Le shériff vient le chercher alors qu'il avait perdu tout espoir.


La condition libre de Solomon me semble étonnamment privilégiée : à Washington, il dîne avec deux Blancs dans un restaurant sans que cela lui pose problème. A croire que l'Amérique serait devenue plus raciste après la guerre de Sécession ? Je ne sais que penser à ce sujet.


Difficile de se démarquer sur un film humaniste sur l'esclavage. Le traitement est ici fort lisse, et ces esclaves sont fort bien rasés et leur peau bien lavée fait d'autant ressortir leurs bleus et les crevasses de leur dos. Le réalisateur (homonyme d'un acteur de légende) a choisi un rythme contemplatif, avec des plans lents, des nappes de violoncelle, de beaux extérieurs sur la Louisiane, enfin le rythme d'une chronique. Cela sert bien le propos, mais on sait tellement à l'avance ce qui va se passer... Je sais, ce n'est pas un bon argument dans la mesure où c'est tiré d'une histoire vraie, mais dans ce cas pourquoi esthétiser et lisser autant, pourquoi ne pas chercher un peu plus de vérisme, quitte à condenser un peu le tout ?


Oui, je parle du film tel que je l'aurais aimé et non tel qu'il est, mais franchement, je me suis fait suer, et je n'ai pas besoin d'un plan-séquence fixe de plus d'une minute sur un Noir pendu qui se dresse sur la pointe des pieds pour éviter la suffocation pour comprendre que décidément, la société esclavagiste du Sud était assez indifférente au sort des gens de couleur. A la rigueur s'il y avait eu un peu plus de background sur l'aspect mercantile du système, sur l'industrie du coton, etc...


Encore un de ces films lisses, qui passeront bien auprès des collégiens et feront soupirer d'ennui leur professeur.

zardoz6704
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Ces films flingués par une bande son complètement passe-partout. et Good old Dixie

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le 26 oct. 2015

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zardoz6704

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