Paradise lost.
Ayant passé mes cours d'histoire à griffoner des moutons anthropomorphiques sur mes cahiers d'un oeil endormi, je connaissais surtout Christophe Colomb pour sa découverte accidentelle de Disneyland...
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le 23 févr. 2013
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Avant l’explosion de Gladiator en l’an 2000, Ridley Scott signait déjà sa grande épopée historique et épique au travers de la découverte de l’Amérique dans 1492 : Christophe Colomb. Un choix de titre qui interroge quand le film s’efforce justement à transfigurer le voyage bien connu de cette année-là, le voyage d’un homme… en une grande fresque traitant tout autant des questions existentialistes liées à l'expédition, qu’à ses conséquences sur les Amérindiens et l’Occident. Sans parler de la perte du sous-titre Conquest of Paradise dans notre VF, qui était assez équivoque quant aux intentions du projet.
En bref, le terme « d’épopée » n’est clairement pas usurpé ici. Si on peut faire de nombreux reproches à 1492, sa reconstitution visuelle de la Renaissance est difficilement attaquable. Costumes, décors et lumière nous plongent dans cette époque où se croisent sombres intrigues politiques et rêves d’aventure. Des salles royales d’Espagne aux plages luxuriantes d’Amérique, en passant par les cales suintantes des navires… le long-métrage sait nous faire voyager grâce à ses reconstitutions proprement hallucinantes et qui; à eux seuls, peuvent conférer le caractère « d’épique » au film.
Mais surtout, cette aventure nous est racontée avec un angle : celui des espoirs d’un personnage qui, assoiffé d’aventures et de découvertes, se retrouve débordé par ses propres ambitions – et celles de la monarchie. Ceux qui croient pouvoir conquérir le « Paradis » ne peuvent que se heurter à leur orgueil, et c’est petit à petit que l’on voit naître la soif de pouvoir et de richesse de l’Occident prendre le pas. Leur terre promise ne devient rien d’autre qu’un champ de bataille et de luttes comme les autres. Si le personnage de Colomb reste évidemment romancé (et confronté à d’autres individus ouvertement mauvais pour créer de l’antagonisme facile), il prend aussi part à cette décadence. De ce point de vue, le film ne cherche pas à évincer les sombres aspects de cette période (impérialisme occidental et massacre des Amérindiens) et les inclut dans son récit global, prenant des tournures de rise & fall peu subtil mais efficace.
En revanche, le film est clairement plombé par sa gestion de la narration. Il ne s’agit pas d’une question de longueur : avec déjà 2h30 au compteur, il s’essouffle dans ses 20 dernières minutes alors qu’il ne sait clairement plus quoi raconter… Son problème vient plutôt d’un montage enchaînant les scènes sans identité propre, laissant peu de temps aux situations de prendre de l’ampleur. Prenons pour exemple la première traversée de l’Atlantique, pourtant pivot du récit. Aucun indicateur temporel pour faire peser la longueur du voyage, la montée des doutes, et donc le risque de mutinerie (exposé par de simples dialogues).
1492 : Christophe Colomb est en équilibre constant sur la corde raide, et selon la sensibilité de chacun, il peut facilement basculer du côté de l’ennuyeux ou du ridicule (la performance aléatoire de Depardieu n’aide pas vraiment). Mais pour peu que l’on accepte de plonger dans cette époque et dans l’esprit de ses personnages, il est un bon film d’aventure aux dimensions presque intimistes, le récit tragique de rêves irréalisables et d'une civilisation vouée à la perpétuation de la violence.
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Créée
le 29 juin 2023
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