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La façon qu’a Dany Boon de raccorder des individus séparés et en conflit les uns avec les autres, de relier telle une rue huit personnes à leur humanité profonde – d’où le titre du film, 8 rue de l’Humanité – finit par emporter l’adhésion, et ce malgré les longueurs et la lourdeur de certains dispositifs comiques. Nous retrouvons d’ailleurs une construction narrative similaire à celle de ses précédents longs métrages : des cellules en crise qui tirent de l’effort qu’elles font pour composer les unes avec les autres un remède à la morosité ambiante et aux difficultés du quotidien.


Le vaccin recherché par les scientifiques et par le professeur Frankenstein de la cour – que campe un Yvan Attal frapadingue on ne peut plus délectable – devient aussitôt la métaphore d’un art de vivre ensemble capable de sauver des vies et de les améliorer. Il va de soi que la clausule, par ailleurs magnifique, en laissera plus d’un sur le banc de touche en raison des bons sentiments qui s’expriment sans retenue, qui débordent des appartements et envahissent l’écran sous la forme d’une ébauche de comédie musicale à peine entonnée, mais qui suffit à nous emporter. Ce cœur projeté par la fenêtre improvisée de la cabane en cartons et qui s’anime en suivant le mouvement de la lampe sur le point de s’éteindre, les jeux de lumières et d’ombres qui le prolongent un temps prouvent que la magie véritable naît de pas grand-chose, d’une simplicité permise justement par la crise sanitaire en ce qu’elle rappelle la fragilité congénitale de l’homme et dépouille ce dernier de ses apparats.


L’intérêt du film réside également dans l’éclatement de sa structure en petites saynètes qui interagissent les unes avec les autres et se répondent comme les voix et les bruits résonnent dans une cour d’immeuble et montent jusqu’au ciel. Boon emprunte ici un format qui correspond aux programmes sériels diffusés en soirée et regardés par des millions de téléspectateurs, il pense sa mise en scène comme mimétique desdits programmes, sans jugement ni critique, il se met au diapason du confinement, opère un repli esthétique qui ne saurait cependant atteindre la virtuosité des grands cinéastes – pensons par exemple à la gestion de l’espace clos de l’appartement dans Sans Témoins (1983) de Nikita Mikhalkov.


Car l’intelligence du propos et la qualité du scénario ne suffisent pas à rattraper répétitions et ventre mou qui étirent inutilement ce conte à la fois ancré dans une époque et hors du temps courant – un temps suspendu par le confinement – qui vaut davantage comme mélodrame teinté d’humour que comme comédie.

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le 24 oct. 2021

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