Loue-moi ton utérus

On a pu dire beaucoup de mal sur ce film et franchement c'est pas forcément génial, mais c'est loin d'être si nul que ça, c'est juste quelconque parce que ça n'arrive pas à insuffler une âme au récit, mais sinon il n'y a pas de réellement déplorable, les intentions ne sont pas mauvaises et le résultat final est pas terrible, mais ça se regarde.

En fait il ne faut pas confondre le sujet dont traite le film et le traitement qu'à le film sur ce même sujet. Oui les jeunes superficiels qui ne savent pas aligner deux mots dans un français correct, qui boivent, fumer et tentent lamentablement de se reproduire c'est assez pathétique, mais voilà, c'est la réalité et on peut le filmer sans qu'on fasse de procès d'intention au film... Ce qui compte ensuite c'est le traitement.

Ici on montre juste le quotidien de trois filles, avec toutes les embrouilles (me ferai-je lyncher en rajoutant : "typiquement féminines" ?) qui vont avec. Après le quotidien aurait pu être plus intéressant en inscrivant les scènes plus en longueur, en variant un peu histoire de créer un peu de beauté dans tout ça et juste des scènes de drame, ou bien montrer comment on passe du rire aux larmes et inversement dans une même séquence, en jouant sur l'ambigüité des émotions.

Oui, parfois c'est un peu trop joué, comme la fille qui reproche à son ancienne de copine de trop se toucher la schneck et où l'autre répond gênée "ouais ouais mais c'est pas si mal", clin d’œil, clin d’œil... t'avais compris toi qu'elle se touchait ? hein hein ? t'as compris ?

Et malheureusement avec ces maladresses, cette mise en scène pas franchement inspirée, ça fait que l'on n'arrive pas au niveau d'autres films sur la jeunesse et sur l'adolescence, je pense au récent Bande de filles (entre autres). D'ailleurs Bande de filles avait réussi à mettre de la joie, des larmes, ce qui forcément permettait de bien plus s'attacher aux personnages, vu qu'on les voit vivre un large panel d'émotions.

Donc oui tout ça est maladroit, mais ça ne juge pas, ça montre juste une réalité possible (bien que je la trouve bien sombre dans les relations avec les adultes... et finalement assez caricaturale). Chez Kechiche on peut voir les gens faire autre chose que chahuter en classe, s'engueuler avec leurs parents...

De même la relation homme/femme est assez uniforme, et un peu caricaturales également, ce qui fait que le film rate l'universalité de son propos... le film ne parvient pas à sortir de ses clichés. J'aurai aimé un peu plus de subtilité dans tout ça histoire que ces situations puissent me parler. Lorsque je vois Roc et Canyon on arrivait mieux à être universel, sans juger, en montrant juste les jeunes être des jeunes, lents, mous, bêtes, libidineux...

Ici ces filles sont toutes dans la rébellion, c'est pénible, il n'y a que ça... avec des parents, beaux-parents, totalement dépassés par la connerie de leur progéniture. Mais le film ne prend pas assez le soin de détailler ce qui pensent les parents, ce qu'ils vivent pour qu'ils puissent apporter quelque chose. Finalement un monde sans adulte aurait été plus intéressant.

Et donc si on peut trouver que la petite révolte adolescente, bien consumériste, idiote, est totalement pénible, reste que c'est malheureusement un passage obligé dans nos sociétés actuelles (sauf pour mes futurs enfants, ma trilogie : Louis, Ferdinand et Céline bien évidemment (j'inverserai d'ailleurs la réflexion nietzschéenne en faisant cette fois de la maternité un hasard, la mère porteuse devant se soumettre à mon plan pour mes rejetons, toi-aussi soumets ta candidature pour faire mère porteuse ! (grâce au libéralisme tout est possible, louer des utérus est enfin réalisable !))) et que le montrer dans un film n'est pas un mal. Le film n'est pas responsable de l'état des lieux qu'il fait.

Bref, c'est pas bien, mais c'est pas nul nul... ça reste bien plus proche de la réalité qu'un film horripilant tant il était à côté de la plaque comme Bang Gang.