Un film noir, rafraichissant, intelligent et beau.


Une histoire de vampire ? Disons que c'est la lecture ultra premier degré et basique qu'on peut en faire, mais c'est vrai, il y a du vampire. Et pour une fois, le vampire, ce n'est pas l'homme immortel et inaccessible qui perd la tête, ce n'est pas un mec ultra-hot qui se bouffe une brochette de vierges tous les jours, ce n'est pas le riche dans son super château. C'est la femme, torturée. Par moment, on croit sentir ses instincts qui s'empoignent, hésitant entre interactions banales et carnage à coup de canines. Même si le propos suit régulièrement un autre personnage, masculin, c'est définitivement Elle qui est au centre de ce monde.


Juste une histoire de vampire, donc ? Je soutiens que non: c'est limite un prétexte, ou alors un écho à ce que représente le vampire dans la culture commune.
Ces champs de pompes à pétrole... ce pétrole qui coule, qu'on suce comme le sang de la Terre. La pute qui s'est fait piéger et qui s'est perdue. Le mac/dealer, le drogué qui glisse au fond, la drogue, l'opportunisme, le confort dans le viseur... Ces réalités qui constituent la part sombre du monde.
Elle, elle n'est que le monstre enfanté dans la ruelle sordide du monde, qui participe à l'amoncellement de crasse et de cadavres, et quelques fois, pour revenir à la raison, à un souvenir d'humanité.
Sur-analyse ? Peut-être. Mais il serait bien pire de croire que toutes ces images sont choisies au hasard.


L'émotion est bien communiquée, certaines scènes sont d'une grande sensualité. Il y a un côté presque drôle, quand le voile noir devient cape virevoltante sur le skate-board au milieu de la rue.
La photographie est superbe, les plans travaillés et rien n'est laissé au hasard.


Le scenario est selon moi digne d'une tragédie grecque, avec la sagesse de refuser la folie pour embrasser le sort. Au final, on ne sait pas trop si les protagonistes continuent de s'enfoncer dans la nuit, ou si au contraire l'acceptation enfantera une espèce d'espoir.


Je ne sais pas du tout ce qui se fait au moyen-orient en termes de musique et si c'est (en quelque sorte) représentatif de quoique ce soit, mais la qualité de la bande son est indiscutable.


Au final, je pense qu'il peut y avoir pas mal d'analyses et j'ai du rater pas mal de clés de lecture. Par exemple, il est évident que des lectures type "émancipation de la femme" ou "politique" seraient pertinentes mais ce n'est pas ce qui m'a touché en premier lieu. La poésie du film me semblait suffisante.


Je vous conseille évidemment ce film, mais prenez-vous le temps et attendez le bon moment pour le regarder, sinon vous gâcherez de le voir pour la première fois.

Azelm
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le 25 mai 2015

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Azelm

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