Dernier film en date d'Albert Dupontel, Adieu les cons propose au spectateur post COVID une nouvelle histoire autour des obsessions de l'acteur réalisateur. Une fois encore, il observe la société au travers de certains de ses membres singuliers qui mettent en relief les aspérités du monde.


Le limogeage d'un brillant informaticien qui a le tort de ne plus être très jeune provoque un sentiment d'injustice tel chez lui que celui-ci décide de mettre fin à ses jours. Mais il est infiniment plus doué pour jouer du clavier informatique que de la gâchette. Et tout part en vrille...


Albert Dupontel incarne à nouveau, pour notre plus grand plaisir, un névrosé qui se heurte à l'hostilité du monde. Il y croise aussi le désespoir, l'agressivité mais aussi l'espoir, celui d'une femme en quête d'amour pour tenter d'apaiser, un peu, une plaie béante qui la déchire depuis trop longtemps. Virginie Efira habite son personnage et lui dessine une profonde simplicité. Ces deux êtres qui se mêlent forment un magnifique duo qui oscille entre souffrance et grâce. La galerie des personnages secondaires mis en scène par le réalisateur s'avère une fois encore jubilatoire : le savoureux Nicolas Marié (jadis un avocat bègue dans 9 mois ferme) campe un aveugle truculent qui accompagne ce couple improbable. Jacky Berroyer apporte à son tour une touche d'émotion subtile qui pourra vous tirer des larmes de compassion.
En effet, plus encore que dans ses précédentes œuvres où Albert Dupontel délivre un message grinçant pétri d'humour noir, celle-ci abrite en plus un trésor de poésie, de tendresse et d'amour. Ces éléments, déjà parfois présents par le passé, sont ici présentés par petites touches successives qui emportent l'adhésion émue du spectateur.
Outre la dureté du monde et de certains de ses individus, c'est le temps qui passe qui est suscité et l'approche de la faucheuse convoqué. Que faire du temps qui nous reste quand tout paraît vain ? L'espoir d'être aimé mérite t'il d'encourager la petite flamme vitale à résister aux bourrasques glacées ?
Le réalisateur sait souffler le chaud et le froid. Du rire aux larmes, il n'y a que quelques pas... jusqu'au final, véritable coup de poing dans l'estomac.


Privilège rare, j'ai pu écouter l'auteur, présent ce soir-là dans la salle, expliquer à l'issue de la séance ce qu'il avait voulu offrir aux spectateurs de son œuvre. Connaître une partie des coulisses m'a fait plus encore apprécier ce moment. La salle a été stupéfaite d'apprendre que la plupart des décors ont été créés en images de synthèse. En effet, le réalisateur, selon ses propres mots, voulait se concentrer sur le jeu des acteurs sans être parasité par les éléments extérieurs. C'est réussi, l'émotion incroyable qui transparaît dans les scènes intimistes pourra en bouleverser plus d'un(e). Avec ce film, monsieur Dupontel a bien mérité la longue ovation de la salle, qui au terme de la séance, s'est levée pour acclamer avec force applaudissements ce talent rare.

Apostille
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le 22 sept. 2020

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