Presque 25 ans après Bernie que Terry Gilliam considère comme un Chaplin sous acide , Albert Dupontel signe avec Adieu Les cons son huitième film en tant que réalisateur. Une filmographie riche de petites perles cinématographiques dans lesquels le réalisateur, acteur et scénariste a toujours rendu un hommage vibrant aux univers qu'il affectionne allant de Chaplin à Keaton en passant par Chuck Jones ou Tex Avery. Je suis depuis toujours très client des films de Dupontel et de son intégrité artistique à ne jamais transiger la moindre concession avec l'outil cinématographique. J'attendais donc Adieu Les Cons (Quel titre magnifique) avec une grande impatience, je m'attendais forcément à me marrer mais jamais je n'aurai penser ressortir à ce point ému et bouleverser de la salle.


Adieu Les Cons c'est l'histoire d'une jeune femme condamnée par une maladie rare et qui décide de retrouver le fils qu'elle avait été contrainte d'abandonner à l'âge de quinze ans. Elle embarque dans son aventure un informaticien suicidaire et un aveugle oublié dans les sous sols d'une administration...


Adieu Les Cons est pour moi une pure merveille comme si d'un coup Albert Dupontel avait tombé le masque pour nous exposer sans fard l'humanité profonde qui pouvait ne faire que transparaitre de ses précédents films. Comme les personnages du film qui doivent se libérer du poids de leurs blocages intimes pour exprimer leurs sentiments j'ai la sensation que Dupontel nous offre ici son film le plus humaniste, le plus beau, le plus sincère et le plus touchant. Sans jamais être cynique, démonstratif et encore moins moralisateur Albert Dupontel dresse ainsi par petite touche le portrait d'un monde connecté, procédurier, mécanique, froid et qui surtout manque cruellement d'humanité. Le film n'a jamais besoin de grand discours, pas besoin de surligner ses intentions; la grâce et l'efficacité de la mise en scène suffit le plus souvent comme lorsque le personnage interprété par Nicolas Marié décrit une rue à l'image des souvenirs qu'il en garde ou qu'un chauffeur de taxi réclame le paiement de sa course en brisant la magie de douces et tendres retrouvailles. Albert Dupontel épingle sans fustiger lourdement les violences policières, les psychologues aux théories fumeuses, les patrons sans scrupules, les entreprises froides, les vieux qu'on oublie, les administrations procédurières, l'urbanisation déshumanisé; tout un monde résumé en une brillante phrase de dialogue "Être bien intégrer dans un monde de cons je ne sais pas si on peut appeler ça une réussite".


Je pensais passer 90 minutes le rire aux lèvres et j'ai au final la sensation d'avoir passé 90 minutes les larmes au yeux tant le film est parvenu à me toucher avec la sincérité et la simplicité d'une fable contemporaine. Il faut saluer la magnifique performance de Virginie Effira qui est absolument sublime durant tout le film. Ses grands sourires triste, les très beaux dialogues qu'Albert Dupontel lui offre, sa présence solaire d'un astre en voix de s'éteindre tout me bouleverse au point que cinq, dix, douze fois la comédienne m'aura ému aux larmes. Albert Dupontel s'offre un rôle plus en retrait, bien moins exubérant qu'à son habitude mais il est une nouvelle fois parfait. Dans un registre plus de pur comédie , Nicolas Marié incarne un génial aveugle hostile à toute présence policière et la scène durant laquelle il fait le gué est à ce titre un très grand moment de comédie. Car si je n'arrives pas à me détacher de l'émotion et du profond spleen mélancolique qui me colle à la peau depuis la fin du film, Adieu Les Cons reste aussi une belle comédie enlevée, inventive, bien écrite et donc drôlement touchante. Albert Dupontel garde cette grandeur d'âme de ne jamais nous imposer le pathos autrement qu'avec le sourire. Il y-a définitivement chez Albert Dupontel la touchante poésie humaniste d'un Chaplin dans cette manière si particulière de décrire des personnages un peu marginaux et perdus en marge de la masse car pétris d'humanité dans un monde qui n'en fait plus guère preuve.


Merci Albert de continuer de faire des comédies françaises d'une telle qualité, merci Albert pour avoir maintenu la sortie en salles du film en cette période de sinistrose absolue, merci Albert pour l'humanisme de tes personnages pour leurs quêtes de bonheur et d'amour, Merci Albert d'oser être sentimentale et poétique dans un monde cynique et mercantile , merci Albert de donner envie de hurler Adieu Les Cons à la face des abrutis avant de s'éloigner les deux majeures tendus en l'air, merci Albert de m'avoir fait sourire, rire, pleurer et réfléchir sur ce monde de cons, merci Albert même si je sais que cette fin va me hanter longtemps encore.... MERCI

freddyK
9
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le 21 oct. 2020

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Freddy K

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