Asphalte
5.8
Asphalte

Film de Denis Amar (1980)

Asphalte appartient à cette catégorie de film produits de temps en temps dans la France des années 80. Des polars anxiogènes, périurbains, exposant une modernité inquiétante (influence des films catastrophe américains ?), y avait Les chiens d'A. Jesua, Le prix du danger de Boisset, La traque de S. Leroy, et dans une moindre mesure Buffet froid de B.B.  Souvent de bonnes surprises, presque toujours de grands acteurs et au moins un thème plus ou moins original ou inédit en France.


Au premier abord Asphalte semble s'inscrire dans cette veine, un drame sur l'autoroute où des personnages se croisent. Disons-le d'emblée, c'est moins réussi que Le grand embouteillage de Comencini. Et le thème central est évident : la sécurité routière, grand enjeu politique de l'époque. Les questions de l'alcoolisme, de la ceinture de sécurité, des révisions techniques, sont omniprésentes.


Les comportements négligents qui vont prêter à conséquence sont péniblement exposés comme dans un volet de Destination finale. Le segment avec Jean-Pierre Marielle est symbolique, puisqu'il s'agit d'un véritable cumul de toutes les conneries possibles : contrôle technique défaillant , picole à table, les chiards qui joue sans surveillance. Tout ça pour se terminer au milieu du film avec un drame prévisible.


Bref, Asphalte est un long spot de prévention, seulement aéré de temps en temps par la très pénible ligne narrative autour du personnage incarné par Carole Laure, dont le jeu est constitué à 98% de minauderie horripilante. Femme au cœur brisée, elle erre sur l'autoroute, poursuivie par l'improbable René Bouloc aka "le cousu", créature cauchemardesque grand brûlé (dans un accident of course) qui poursuit en rampant la belle Juliette à travers les airs de repos.


L'insupportable connasse sera sauvée par Jean-Yanne - on se demande ce qu'il fout là, enfin pas vraiment, crédit de la baraque à rembourser vraisemblablement. Leur romance occupe le dernier tiers du film, pour notre plus grande indifférence. On en vient presque à souhaiter assister à un nouveau carambolage sanglant signé Rémy Julienne, histoire d'éviter le jeu de paupière de la canadienne que l'on préférait mutique dans Préparez vos mouchoirs.


À noter également la présence d'Etienne Chicot en patron d'une casse, qui vient recueillir le père d'une victime de la route (Louis Seigner), et de Jaegger (Philippe Ogouz) qui s'extirpe de sa voiture après un carambolage avec un éclat de pare brise dans la jugulaire et dont la journée va se limiter à faire du stop entre deux propos obscures. Des personnages très très peu creusés. Des fantômes servant à poser une énième couche de gravité. 


Le film se conclut sur un accident (si !), avec la voiture de Jean Yanne en feu, et son chien qui tente de le dévorer. On déconne pas, la route c'est très très dangereux, toutes les pires galères improbables peuvent s'y produire. Le cabot est abattu, et Yanne transporté à l'hosto, il y sera certainement soigné par George Wilson, le médecin qui fume sous la douche - littéralement, c'est pas une vanne sur son pif - et qui fait de son mieux pour sauver les fous qui s'engagent sur ce Styx de bitume que l'on appelle route nationale.


Vous l'aurez compris, c'est pas joyeux tout ça. On est dans le grave. A la fin du film, quiconque opte pour autre chose qu'un bus Macron ou Easyjet afin se rendre en weekend à Concarneau est un fou dangereux irresponsable. En exagérant un brin, c'est d'ailleurs ma spécialité, on y trouve un effet répulsif à la Requiem for a dream. Drame terrifiant qui s'est chargé de la drogue d'une façon semblable.

Negreanu
4
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le 3 sept. 2021

Critique lue 397 fois

2 j'aime

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