Fin analyste de la bourgeoisie française, Claude Chabrol dissèque le mensonge dans une petite ville du Nord de son pays. La suspicion et l'hypocrisie tiennent le haut de l'affiche.

Comme dans l'un de ses chefs-d'oeuvre, "Que la bête meurt", Chabrol ouvre son film sur la mort d'un enfant. Mais ici, l'accident de voiture est remplacé par un meurtre. On découvre le corps d'une fillette assassinée dans un terrain vague d'une petite ville côtière de Normandie. Comme elle sortait juste d'un cours de dessin avant de croiser la Grande Faucheuse, les soupçons se portent immédiatement sur son professeur. René (Jacques Gamblin), artiste peintre, resté invalide suite à un accident, ne comprend pas bien ce qui lui arrive et réagit avec un détachement et une ironie qui gênent certains habitants. Les rumeurs vont bon train. Sa Femme, Viviane (Sandrine Bonnaire), supportant difficilement cet état d'esprit, se rapproche de leur voisin, Germain-Roland Desmot (Antoine Decaunes), star de la T.V. et auteur à succès ultra médiatisé. L'enquête est menée par une commissaire jeune et inexpérimentée (Valéria Bruni Tedeschi) qui a l'impression que chaque habitant de cette petite ville a quelque chose à se reprocher.
Chabrol construit ce "Au coeur du mensonge" comme une intrigue policière classique où le spectateur n'attend que la découverte de l'assassin. Mais ce n'est pas cela le plus intéressant. On assiste une nouvelle fois à une peinture caustique de la petite bourgeoisie hexagonale. Il offre un rôle magnifique à Jacques Gamblin qui endosse son personnage avec beaucoup de jubilation. Son artiste peintre taciturne représente l'alter ego de Chabrol qui juge avec le recul satirique qu'on lui connaît l'humanité d'aujourd'hui.
Techniquement, le cinéaste effectue une recherche picturale en pensant certaines scènes comme de véritables tableaux. Et comme à son habitude, il reste un bon vivant en parfumant son film d'odeurs de bonne chair.
RemyD
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le 23 oct. 2010

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