Quentin Dupieux, chantre de l'absurde, était attendu sur terrain de la comédie française. À l'instar d'un Michel Gondry, productif (et inspiré outre Atlantique), le réalisateur de Rubber retourne dans sa patrie pour livrer un opus jouissif, un huis clos mettant en scène un Poelvoorde plus connard que jamais en inspecteur de police menant l'interrogatoire de Grégoire Ludig, témoin moustachu (puis auteur moustachu) d'un meurtre. Mr Oizo dynamite littéralement le dispositif qu'il met en place. Il y a le meilleur Woody Allen (celui de La Rose pourpre du Caire) mâtiné de la distanciation brechtienne dans ce film de 73 minutes qui apparemment fait la part belle aux dialogues. Mais tout part en sucette rapidement lorsque les personnages secondaires interviennent arbitrairement dans les flash back du suspect, la temporalité explose et passé, présent et fantasme s'enchevêtrent allègrement et lorsque les digressions dignes d'un autre Quentin célèbre se font jour entre les deux protagonistes sur le mot juste à employer dans le procès-verbal.
Une petite réserve : au moment du dénouement, le réalisateur relance le film avec un debrief par les personnages de leur prestation un peu tiré par les cheveux, voire complètement narcissique. Dupieux dévoile son dispositif et assume une théâtralité qui aurait dû rester suggérée.
Un mot sur des accessoires déjà mythiques : une équerre devient une arme de crime, un bout de Mars (la barre chocolatée) un remède contre la faim dans le monde. Enfin, vous ne mangerez plus d'huîtres de la même façon après avoir vu ce film.