Sous la direction des frères Coen, dont on reconnait très vite l'apport au scénario, Bienvenue à Suburbicon aurait peut-être atteint les sommets mais rien n'est moins sûr car il leur est arrivé aussi de faire des films moyens. La mise en scène de Clooney est ici relativement pâle et se contente d'illustrer une histoire qui se donne des airs de film noir, saturé d'un humour de la même teinte, sans qu'il s'en dégage une véritable atmosphère. Les violences racistes qui ont lieu dans cette banlieue tranquille en apparence servent de toile de fond mais ne sont rien d'autre et sont là pour rappeler, si tant est qu'il en soit besoin, que l'Amérique a un lourd passif en la matière. Le film pousse assez loin le curseur dans la cruauté mais quand les cadavres s'accumulent, il en perd un peu de sa crédibilité pour s'enfoncer dans un jeu de massacre macabre pas totalement maîtrisé dans le dosage tragédie/comédie, moins en tous cas que dans certains célèbres films britanniques (avec Alec Guinness) qui pourraient faire office de modèle dans l'amoralité la plus décomplexée. Ceci posé, il faut reconnaître à Clooney, et ce n'est pas nouveau, l'excellence de sa direction d'acteurs. Matt Damon et Oscar Isaac sont parfaits mais le mot est faible pour qualifier la prestation de Julianne Moore. Elle aurait un Oscar d'interprétation chaque année que cela n'apparaitrait absolument pas comme une hérésie.