Black Panther par Bastral

On est passé pas loin d'un film exceptionnel et novateur, mais malheureusement j'ai juste trouvé le film "pas mal". Black Panther nous fait découvrir l'Afrique sous un jour nouveau, bien que fictif, avec le Wakanda, sorte d'El Dorado ou d'Atlantis caché et technologiquement hyper avancé. Signe particulier : son Roi se ballade parfois en collants noirs pour casser du méchant et protéger sa patrie sous le nom de "Black Panther".

Ce Marvel ose un peu plus que se prédécesseurs, avec sa distribution quasiment exclusivement Afro-Américaine, jusqu'à son réalisateur, le talentueux Ryan Coogler (Creed), une représentation africaine novatrice, des choix esthétiques intéressants, un méchant qui a des motivations profondes (et qui, ironiquement, est le vrai hériter spirituel des Black Panthers historiques américains comparé au héros éponyme). Alors que Civil War m'avait déçu par son inhabilité à trancher le dilemme moral autour duquel tournait l'histoire (faut-il réglementer les super-héros), celui-ci va de l'avant sur le sien : la position et les responsabilités du Wakanda dans le monde.

Mais le film n'est pas le chef d'oeuvre qu'il aurait pu être. Car, s'il y avait bien un film "origin story" à faire, c'était celui-là. Et pourtant, il est traité comme si le public connaissait déjà Black Panther, héros Marvel plutôt secondaire. Des personnages, on n'apprendra pas grand chose. Comme on n'a aucun aperçu de l'enfance du héros, de sa révélation en tant que Black Panther (ses super-pouvoirs sont présentés de manière presque banale), de sa relation avec son ex, ou même de ses défauts et de son caractère, on est face à un personnage très lisse, même s'il sera heureusement amené à évoluer. Idem pour le méchant, auquel au s'identifie facilement tant ses motivations paraissent justes au premier abord. Malheureusement quasiment tout son background est évoqué sans être montré et l'empathie est loin d'être aussi forte qu'elle aurait pu être.

Même problème pour le Wakanda et sa culture. On sait vaguement qu'il existe 5 tribus, mais l'organisation de la société est très floue. Et si les costumes et les armes sont très inventives, la plupart des décors, bâtiments et vaisseaux de Wakanda sont très génériques et décevants. Et le vibranium fait office de McGuffin miracle : matériau indestructible ou presque, dont le moindre gramme vaut une fortune, source d'énergie illimitée ou presque, catalyseur de technologie, il permet également de soigner presque tout et est la source des pouvoirs de Black Panther... ça va, c'est bon ? Il permettrait pas aussi de donner la vie éternelle pendant qu'on y est ?

Mais alors, à quoi avons-nous droit, à la place de tout ce développement ? Une première scène d'exposition en CGI terriblement bâclée qui raconte l'histoire du Wakanda en 30 secondes montre en main, nous faisant avaler une pilule de la taille d'un ballon de rugby. Un premier méchant ridicule, qui fait partie d'un arc narratif quasiment inutile —pourquoi nous bassiner avec les 10 grammes de vibranium qu'il vole et dont tout le monde finit par oublier l'existence ?—. Et Martin Freeman, qui joue un américain —wait, what ?— agent de la CIA complètement inutile à l'intrigue, qui semble être là juste pour rappeler au spectateur que les USA existent, pour raconter l'histoire du méchant au lieu de la montrer et qui semble vraiment être le résultat d'un "quota blanc". Quoique ce dernier point est finalement assez cocasse et méta en étant le négatif du cliché hollywoodien habituel.

Bref, du changement, de l'inventivité, de l'audace... Mais pas trop quand même, ou pas suffisamment bien fait. Malgré tout, dans la litanie toujours plus longue et monotone des films ultra-calibrés de Marvel, Black Panther vaut le détour.