Ca a failli être très bien

Black Panther a des comptes à régler par milliers. Avec l'histoire, avec l'occident colonialiste, avec l'industrie du cinéma, avec les Avengers... Et ça commence bien, avec un Wakanda rêvé, ultra tech et pétri de traditions, mélange superbe et futuriste que la direction artistique rend crédible, ample et, pour le quasi ignare que je suis du sujet, peut-être respectueux des conventions visuelles de certains arts africains. Ca m'évoque les United African Nations d'Aeon Trinity. Au delà de ce pays qui fait la synthèse de récits primordiaux incarnés dans sa société et d'un avancement technique proprement extra-terrestre, nous avons un fond pas idiot qui ne cherche pas à redresser les torts ni à jouer la carte d'un mea culpa larmoyant et tonitruant. Le Wakanda est une nation repliée sur soi, ultra protectionniste du fait de son inexistence supposée, certes pied de nez total à l'endroit de l'arrogance occidentale mais également complice passif de l'asservissement du continent afin de ne pas s'attirer d'embrouilles.

Une Suisse africaine invisible peaceful et gentiment cynique qui refuse de s'associer au monde et, finalement, ne se reconnaît pas de parenté ni de familiarité avec la cause noire.

L'opposition entre un traître au Wakanda qui veut se venger d'un monde raciste au nom d'un peuple opprimé qui dépasse largement ses frontières et une royauté réticente à la violence et agrippée à ses traditions, finalement exclusives et aveugles aux souffrances de ses voisins, équilibre bien les enjeux. On se met bien dans les baskets des deux factions, c'est cohérent, pas manichéen et les gentils putatifs puent l'hypocrisie. On échappe heureusement au laius occidental sur la pureté et la beauté incomprise du bon sauvage dont on a temps à apprendre. Presque...
Ca joue pas mal, c'est tragique, étrange, drôle. Tout le monde est beau à sa manière, il y a une vraie coolitude graphique...

Quelle tristesse qu'un propos aussi décent et presque nuancé soit résolu dans une vilaine bagarre entre deux bozos en armure dont tous les plans semblent avoir déjà été tournés il y a quelques années. Là où on pouvait s'attendre à une explosion du dilemme wakandais à la face du monde et que la révélation de son existence soit au coeur du drama, précipitant les protagonistes dans une incontrôlable spirale, non. Les mecs se frittent dans le confort secret d'une mine de vibranium, versent leur larme en se reconnaissant des mérites mutuels et seul l'épilogue conduit à une réelle évolution contrôlée de la situation du Wakanda.

Scénaristiquement, c'est moche. Car même sans tout ce foin, le Warmonger, etc, le roi, de toute manière progressiste, aurait pu délivrer exactement la même conclusion. La barre est placée haut lors de l'installation du film, à la différence de beaucoup de ses cousins Marvel, mais son développement le rend assez vain et beaucoup trop classique, en plus d'être mal exécutée techniquement.

J'aurais mis 7 mais cette déception au regard de la force de la situation initiale et de son évolution petit bras me contraint au 6. Et ce point en moins, je suis certain que le CA de Marvel va en parler un moment.