J'irai danser du côté de chez Swan.
Black Swan est l'expression juste du sentiment de la souffrance, la souffrance fulgurante, incommensurable et insupportable.
C'est la remise en question de Nina (petite en espagnol), de ses relations avec sa mère, de sa danse et d'elle-même. La perfection au delà de tout, l'ultime bonheur.
Natalie Portman délivre une poignante prestation, elle laisse mourir définitivement son coeur d'enfant avec l'interprétation, douloureuse, de cette ballerine de 19 ans.
Darren Aronofsky, après Requiem For A Dream, renoue avec son thème fétiche : la douleur.
Black Swan brouille les pistes.
Le blanc, le noir :est-ce le bien, le mal ? Où s'arrête l'un, l'autre ?
Avec Aronofsky, on ne sait jamais. Est-ce un conte, une tragédie ? On vascille entre morbide sensualité et beauté extrême.
Le cygne blanc est-il le symbole du bien ? Nina incarne ce cygne pur : elle danse à la perfection jusqu'à la douleur, vit sobre, calme. Mais où est son âme ? Enfermée dans le rêve de sa mère, ballerine ratée, elle végète. Pour incarner le cygne noir elle sombre, se relève ? En tout cas elle se libère.
La souffrance de l'exigence, Nina l'oublie, l'intègre à son être psychique.
La souffrance dans l'amour.
Parce que Nina elle aime : sa mère, Thomas, le metteur en scène, Lily sa rivale.
Les trois l'enferment dans son corps qui devient l'objet de leur plaisir intellectuel, sexuel, pervers.
Sa mère l'ausculte sans cesse, contemple le corps chétif d'enfant et la contre, la torture. Thomas la dévore des yeux, des mains, de la bouche. Il lui fait mal, entre dans sa sphère privée, sensuelle, sans lui laisser le choix. Elle est son cygne blanc. Llily est l'incarnation du cygne noir. Elle détache Nina de son corps avec des drogues, la fait jouir, l'abandonne.
Abandonnée, Nina ?
Oui, mais elle se bat dans ses hallucinations parce que, en vrai, son ennemi c'est elle-même. Nous sommes souvent nos prorpes ennemis, surtout lorsque l'Amour est en jeu. L'être rationnel, censé, travailleur disparait brutalement.
Black Swan est la mise en abime de l'amour noir. L'histoire du Lac des Cygnes est digne d'un conte, d'un contre noir. La princesse transformée en cygne et séduite par le prince qui peut la délivrer. Mais la soeur, perfide, jumelle, cygne noir, la lui vole, le prince et son amour.
Et le cygne blanc courbe l'échine et se tue. Ici le cygne blanc, Nina, aime Thomas. Nina souffre, s'abandonne puisqu'elle doit être à la fois le blanc et le noir. Elle se déchire, lutte et le veille de la première, Lily le lui vole. Alors, Nina meurt mais avant elle s'élève.
De cette trahison brutale elle tire la plus belle interprétation du Cygne noir, elle séduit et rend les armes : la perfection à un près.
Conte ou tragédie ?
J'irai danser du côté de chez Swan ! Parce que j'ai souffert avec elle : mes ongles se sont brisés, am peau arrachée, mon coeur perforé avec le bijou d'Aronofsky.
Trois grand bravos s'imposent : à lui, à Natalie Portman et à Tchaikowsky. Merci pour le Lac des Cygnes, danse sensuelle de l'amour morbide.
P.A.B