Darren Aronofsky est un sadique. Non pas parce qu'il met Natalie Portman au supplice, qui souffre d'ailleurs admirablement, mais parce qu'il distille avec constance un malaise des plus éprouvants pour le spectateur. Il ne peut pas plaider non-coupable puisque le bougre est récidiviste : la même atmosphère délétère émanait déjà de "Requiem...", qui avait pourtant été acclamé par de nombreux fans. Masos, donc. Et pourtant, Black Swan est un fascinant moment de cinéma.
D'abord on ne voit pas le temps passer, même sans être un inconditionnel du ballet. On s'offre quelques palpitations sans pour autant être allé voir un film d'épouvante. Le personnage de la mère omniprésente étant de loin l'élément le plus terrifiant du film, tandis que les effets spéciaux (admirables) se cantonnent à la métaphore poétique. Habile.
Ensuite la direction d'acteurs est impressionnante, modelant Natalie Portman en petite chose ravagée, sublimée par sa lutte contre elle-même. Si l'opposition entre la coincée et la délurée est un peu grossière, on retiendra tout de même le duo qu'elle forme avec Mila Kunis.
Enfin reconnaissons à l'auteur un sens aigu de l'esthétique, depuis la perfection fragile du visage de l'actrice jusqu'aux inventions scéniques baroques et aux chairs lacérées.
L'histoire est captivante, et si elle nous emmène parfois sur le terrain de jeux d'Amenabar ou de Shyamalan, elle se cantonne en définitive à la perversion pure, et se conclut sur un magistral sacrifice.
Ce film n'est pas un chef d'oeuvre.
C'est le chef d'oeuvre de Darren Aronofsky. Courrez le voir avant qu'il ne fasse mieux !
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