fev 2011:

Aouch! J'aimais bien ce film quand j'estois môme et je le trouve extrêmement vieilli maintenant. Franchement, à bien y réfléchir, je ne pense pas que le fait d'avoir revu la trilogie du parrain dernièrement ait une quelconque relation avec cette désaffection.

Non, le film souffre plutôt d'une certaine artificialité. La mise en scène de Jacques Deray me parait très mécanique et simpliste, cherchant systématiquement à mettre en valeur ses deux stars. J'ai le sentiment qu'il se laisse dépasser -ce qui est humainement compréhensible- par l'évènement, cette incroyable rencontre au sommet du box-office. Comme les deux plus grandes vedettes du cinéma français de l'époque sont sur la même affiche, le producteur Alain Delon s'octroie le plus gros budget et s'adjoint la participation de la Paramount. Difficile par conséquent pour Jacques Deray d'imposer quoique ce soit de personnel ou d'intime.

Tout est axé sur la fantasmagorie pectorale autour des deux mâles dominants. Le film testostéroné à outrance se contente de faire rouler les mécaniques à Belmondo et Delon, ce qui signifie que les décors, les costumes, les personnages et l'histoire se mettent entièrement au service des deux mythes vivants, pour mieux les alimenter.

Donc, un peu trop primaire, le film accompagne un grave déséquilibre sans jamais donner à penser vouloir le modifier. C'est vraiment dommage car le cadre se prêtait magnifiquement à une belle reconstitution historique de la belle Marseille des années 30, colorée, vivante.

La distribution autour de Jean-Paul Belmondo et Alain Delon est attirante. Il découle alors de sa faible exploitation une certaine frustration. Quelle horreur de passer à côté de Julien Guiomar, Michel Bouquet ou Corinne Marchand!

Quand aux deux géants, leurs outrances scéniques, démonstratives, cette espèce de course puérile à celui qui sera le plus flamboyant, le plus égal à l'image qu'il veut qu'on lui attribue donne un concours d'effets de manche, de mimiques laborieuses, disproportionnées la plupart du temps, des poses diverses, une compétition qui s'ingénie à démonter inexorablement et inconsciemment le peu de naturel que le film aurait pu dégager. Compte tenu de l'affection que j'ai pour ces deux comédiens qui ont participé qu'on le veuille ou non à l'histoire du cinéma français, le ridicule par moments de cette mise en scène produit un spectacle assez pitoyable.
Je suppose qu'il faut impérativement mettre le film dans une catégorie, très particulière : un cinéma symboliste, clin d'œil perpétuel où ces deux icônes passent leur temps à rendre hommage au polar et à leur propre image, un genre pas très sérieux, où le réalisme n'a pas vraiment sa place, une sorte de comédie qui exclue tout esprit critique. L'idolâtrie est de mise pour passer un bon moment.

Quand j'étais petit, j'aimais bien ce film, juste parce qu'il y avait Bébel et Delon, de l'action et c'est tout. Je ne vois rien d'autre.

Un dernier point, un bon, la musique entêtante de Claude Bolling!
Alligator
5
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le 16 avr. 2013

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Alligator

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