Pas de pitié pour les ripoux
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Désincarnés, automatisés, glacés, ensanglantés, les ripoux se suivent et se ressemblent, leurs destinées s’annulent sous les balles et laissent des veuves éplorées sur le rivage ou violées sur le canapé puis éventrées. S’observe, dans Bronx, la vieillesse d’un savoir-tuer et d’un savoir-mourir, son extinction à petit feu, refroidie par la destruction massive d’un nouvel âge de la mafia. Le cœur battant du long métrage est tiraillé par une rivalité de générations, Olivier Marchal plaçant d’entrée de jeu Paul Maranzano – interprété par Gérard Lanvin – comme le garant et le gardien d’une dignité à disparaître, de la même façon qu’Ange Leonetti (Jean Reno) s’affirme tel un père protecteur et incorruptible qui finira sur le ventre au milieu de sa piscine. Pourtant, cette opposition générationnelle reste de surface, et le réalisateur déplace aussitôt son intérêt vers les règlements de comptes primaires et violents de sa brigade à grands renforts d’armes à feu, de coups de couteau et d’explosions.
La tragédie à l’œuvre mute aussitôt vers un ébranlement de la virilité ou, plutôt, une révélation de son inertie : tout dans le slip, rien dans la tête, les personnages sont constamment tendus vers un ailleurs, lancés dans une mission qui les pousse aux marges de Marseille, dans des zones irradiées par le soleil mais dépourvues de vie. Les cérémonies officielles sont perturbées par des sursauts de fragilité, l’alcoolisme comme le désir de vengeance, et chacun apparaît parvenu au faîte même de son existence. Le mafieux ne coule plus de vieux jours mais devient un bourreau, celui d’une famille comme le sien propre. Le regard porté par Marchal sur son petit monde ne doit cependant pas occulter la complaisance qu’il manifeste à le voir disparaître dans la douleur, filmant les exécutions avec froideur et cruauté – comprenons, goût du sang. Seule une scène, magnifique au demeurant, contredit cela : voir Maranzano venir au chevet de son épouse pour lui dire adieu et la délivrer.
L’humain, dans Bronx, n’est bon qu’à souffrir, faire souffrir et donner la mort. Fallait-il pour autant concevoir un film aussi machinal et désincarné – à l’image des situations et des personnages, certes ? Telle est la question. Mettre en scène l’autodestruction des êtres, au risque de court-circuiter son geste artistique.
Créée
le 12 déc. 2020
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