A l'opposé de beaucoup de ses compatriotes cinéastes, Lee Chang-dong, d'Oasis à Poetry, en passant par Secret Sunshine, est un conteur à combustion lente, peu porté sur la pyrotechnie, qui oeuvre en subtilité et en délicatesse. La première heure de Burning est presque anodine, proche d'un marivaudage à la Jules et Jim, volontairement sans éclat, mais qui met déjà en scène les motifs d'un futur embrasement. Le film se tient loin de toute dramatisation et monte progressivement vers son acmé. Allumer le feu, Lee sait aussi faire mais ce ne sera pas avant d'avoir vicié peu à peu l'atmosphère et surtout d'avoir laissé l'imaginaire contaminer la réalité à moins que ce ne soit le contraire. Ce n'est pas un hasard si le principal personnage de Burning est un écrivain en devenir, ce qui permet de brouiller in fine quelques pistes et en même temps de rendre hommage à Haruki Murakami, auteur de la nouvelle dont est inspiré le film. La dernière heure est d'ailleurs très proche des ambiances favorites du romancier japonais, ce goût de l'étrange mélangé à un quotidien qui autrement serait d'une grande banalité. C'est assez rare au cinéma de voir un récit aussi maîtrisé à partir d'aussi peu d'éléments narratifs saillants, si ce n'est en son dénouement. Burning ne suscite sans doute pas autant d'émoi que Poetry, il reste un peu froid en définitive, mais il constitue une nouvelle preuve de la valeur d'un cinéaste qui compte parmi les plus brillants de l'époque.