On ne présente plus Bob Gray le grippe-sou alias Ça ! Il a perturbé des générations d'ados (adultes aussi il faut le dire) et son évocation éveille bien des souvenirs de terreur. Ça fait partie d'une lignée de monstres horrifiques appelés croque-mitaines qui ont fait les belles heures de la littérature et du cinéma d'épouvante. Seulement voilà, quand ce monstre sort de l'esprit d'un Stephen King, il démultiplie l'horreur sous différentes apparences et dépasse les seules frontières de l'imaginaire populaire pour s'ancrer dans la réalité. Son grand rival étant Freddy Krueger, tout aussi traumatisant, créé par Wes Craven en 1984, soit deux ans avant Ça
Les puristes ont crié à hue et à dia contre cette adaptation, parfois avant même la sortie. Loin de tout esprit partisan, je suis allé le voir. Intrigué par la bande annonce, puis les quelques extraits vus, je pressentais le bon film de genre, et je ne suis pas déçu.
Certes, en dehors de quelques scènes ciblées, la peur n'est pas au rendez-vous. Mais était-ce vraiment l'ambition première d'Andy Muschietti ? Comme jadis, pour les films dits d'épouvante des années 56/60, la suggestion et l'appréhension font plus de ravages sur le palpitant qu'une accumulation de jump scare ! Le tension est permanente au même titre que l'attention, on ne peut décrocher ne serait-ce qu'une minute de l'histoire.
La forme du film est également très plaisante, son habillage très eighties restitue dans le moindre détail, cette période. On repense aux "Goonies" et autres teen movies de ces années là. Le clin d'œil se fait hommage. Le découpage alternant scènes d'action et scènes de découvertes des caractères des ados est pertinente. Peu à peu, on s'attache aux personnages que l'on souhaite voir épargné le plus longtemps possible. Les victimes ne sont pas ici des arguments d'hémoglobine faciles. Leurs peurs respectives sont universelles (maladie, prédateur, portrait effrayant, mort...) et l'ont fini par trembler avec eux à chaque apparition. L'effroi dans le dos !
Plastiquement le film est irréprochable, direction artistique, costumes, musique, montage appuient le contexte. Chung Chung-hoon à la photo fait des merveilles et traduit par ses ambiances empreintes de mystère et de trouble l'étouffement qui pèse sur la ville, sur les enfants.
Mais l'atout exceptionnel du film tient à son casting. Les jeunes acteurs y sont tous d'une grande crédibilité et parfaitement choisis. Ils portent le film sur leurs épaules, et c'est du solide ! On ne doute pas un seul instant qu'on les retrouvera bientôt sur les écrans, notamment Jaeden Lieberher et Jack Dylan Grazer, formidables d'aisance, de naturel et de maturité.
Quand mise en scène maline et respect de l'oeuvre se conjuguent avec une technique audacieuse et une interprétation soignée, ça donne "Ça".