Ben vit avec ses six enfants au fin fond d’une forêt luxuriante du Nord-Ouest des États-Unis. Leur journée est rythmée par des entraînements physiques intensifs et de longues lectures sur des sujets pointus. Vivant en complète autarcie, un drame familial va contraindre la petite troupe à quitter la forêt pour affronter la civilisation.


Jusqu’à présent connu pour ses rôles d’acteur dans Aviator ou American Psycho, l’américain Matt Ross réalise et scénarise avec Captain Fantastic son premier long-métrage à forte visibilité (son premier film, 28 Hotel Rooms n’avait été projeté que dans 5 salles outre-Atlantique). Loin du blockbuster ou de la simple comédie, ce film est une très belle histoire d’une famille déchirée par la perte d’un être cher. Le fait que les membres de cette famille vivent en marge de la société et rejette tous nos codes avec un cynisme provocateur est en quelque sorte la cerise sur le gâteau.


Patriarche charismatique, Ben a éduqué, avec sa femme, ses enfants de la manière qu’ils le souhaitaient. Déscolarisés, les enfants adhèrent à l’autorité paternelle visant à leur donner un esprit sain dans un corps sain. Une philosophie qui heurtera de plein fouet la réalité du monde extérieur. Concernant l'importance du corps sain, il y a cette scène dans la banque où les gamins regardent bouches bées des adultes en surpoids. Pour l’esprit, il y a ce moment où Ben demande à ces neveux ce qu’est un amendement. Les deux adolescents, légèrement abrutis par un excès d’écrans, se montrent incapables de répondre à leur oncle. Ben appelle alors sa fille de 8 ans qui va sans aucun problème expliquer ce qu’est un amendement. Malheureusement, Ben ne se rendait pas compte qu’il a créé des bêtes de foires, incapables de s’intégrer en société car la voyant comme un système perverti qu’il faut, à défaut de combattre, fuir. D’une intelligence remarquable, le pater familias va peu à peu mettre de l’eau dans son vin et comprendre que l’on peut vivre avec des idées à contre-courant des dogmes actuels sans pour autant aller se terrer loin de tout.


Les quelques facilités scénaristiques prises par Ross n’entachent heureusement pas un scénario d’une très grande originalité aux dialogues décapants. Se servant avec délectation de l’abîme séparant les codes sociaux de notre monde à l’éducation de ces enfants, le réalisateur distille un humour rafraichissant. La scène où Bodevan, l’ainé de la fratrie, se retrouve l’espace de quelques heures seul avec une jolie blonde est à tomber par terre.


Les costumes sont géniaux. Faisant fortement penser aux panoplies des enfants perdus du film Hook, l’accoutrement de la famille est aux antipodes des codes vestimentaires. Une démarche en phase avec l’idéologie familiale :



Fuck them



Captain Fantastic est bien plus qu’un simple feel good movie. Les acteurs, petits et grands, donnent vie à cette incroyable famille semblant sortie tout droit du pays imaginaire. Et pour l’anecdote, sachez qu’aux États-Unis on pense que nous, les Français, donnons du vin aux enfants. Bravo la réputation de poivrot !

Vincent-Ruozzi
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le 23 oct. 2016

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