Bien qu’il soit le fruit d’une intelligence artificielle, Chappie n’en reste pas moins un robot assez touchant et attachant. Le long-métrage réalisé par Neill Blomkamp prend le parti pris de le traiter comme un enfant apprenant peu à peu sur le monde et forgeant sa propre personnalité au gré de ses expériences. Toute une partie du film est ainsi dédiée à son éducation, apportant une réflexion intéressante sur le conditionnement, la sociabilité syncrétique et l’influence des déterminismes en fonction des milieux dans lesquels on évolue, même s’il faut bien reconnaître que ce thème n'est guère original. Il aurait pu être ici bien plus poussé.
Ceci dit, le film nous délivre plusieurs scènes réellement marquantes, telle celle où Chappie se voit pour la première fois confronté à la violence du monde extérieur, à la cruauté humaine et au rejet.
Alors que bon nombre de films de science-fiction ont fait de l’intelligence artificielle une invention nécessairement néfaste qui finirait par se retourner contre ses créateurs et ainsi causer notre perte, ce n’est pas vraiment dans cette optique que s’inscrit ici Neill Blomkamp, qui insiste plutôt sur la responsabilité humaine dans les problèmes ayant trait à un monde contemporain essentiellement dépeint comme déliquescent. Le fait que l’histoire, à l’instar de "District 9", prenne place à Johannesburg, ville en proie à la criminalité et à la ségrégation raciale et sociale, n’est en rien anodin.
Certes, le film est loin d'être exempt de reproches, entre des personnages trop caricaturaux, notamment au niveau des bad guys, et quelques raccourcis scénaristiques qui font parfois sacrément tache.
De plus, on peut penser qu’à force de vouloir brasser en un seul film tous les thèmes touchant de près ou de loin à l’intelligence artificielle, Neill Blomkamp s’est quelque peu emmêlé les pinceaux, notamment vers la fin. L’idée de perpétuer sa conscience par delà la mort en la transférant vers un corps artificiel n’est pas mauvaise en soi et a déjà été plutôt bien traitée dans d’autres œuvres, mais elle est ici amenée de façon trop abrupte et peu crédible, à travers une sorte de quatrième acte venant s’ajouter à une intrigue qui se suffisait déjà à elle-même.
Ajoutons à cela les influences évidentes (à la limite du repompage) de films tels que "Robocop" ou de mangas comme "Appleseed", qui a fortement inspiré le design de Chappie. Ce n'est d'ailleurs pas le premier manga duquel Neill Blomkamp tire une bonne partie de son inspiration, comme en atteste son précédent film, "Elysium", dont le scénario et l'univers semblaient tout droit sortis de "Gunnm", avec la dichotomie entre d'une part la cité des cieux Zalem / station spatiale Elysium et d'autre part la Terre / Décharge.
Mais malgré ces défauts, "Chappie" n’en reste pas moins un film de science-fiction intéressant et sympathique qui, sans égaler l’excellente surprise qu’avait été "District 9", nous fait vite oublier la déception passée d’ "Elysium".