Chappie... Tellement de mauvais jeux de mots me passent par la tête alors que j'écris ces quelques lignes... Chappie, c'est un peu le film que j'ai toujours voulu voir à propos de l'IA (oui, comme un youtubeur que je ne nommerai pas ici). Faut dire que même si j'aime beaucoup le travail d'Isaac Asimov, il m'a toujours semblé que son œuvre avait fait énormément avancer la SF tout en la jetant dans une impasse.


Tous les films de ce siècle qui parlent d'IA ont quasiment tous le même schéma et le même personnage doté d'une raison artificielle qui nous parle avec la même voix monocorde de sa programmation qui l'interdit de faire ça et ça et qu'il ne peut pas ressentir d'émotions mais en fait si et on se rend compte qu'il est supérieur à l'Homme et que, du coup, il met notre société en danger etc... Bref, ce genre de films commencent à m'insupporter et je craignais sincèrement que Chappie poursuive cette tradition.
Heureusement, Neil Blomkamp est un original. Totalement surdoué (mais un peu paresseux), il débarque dans cette lignée de films stagnants avec une compréhension parfaite de ces codes et une forte volonté de faire un peu bouger ce sous-genre de la SF. Pour cela : fini les Lois de la Robotique. Certes, elles sont utiles et réalistes, mais elles bloquent aussi la plupart des récits. Exit aussi les environnements propres et l'éducation aseptisée du gentil robot. Cette fois-ci, on est dans un film Blomkamp et on va avoir droit à du lourd et à du sale ma gueule !


Premier truc un peu étrange du film, c'est la présence du groupe Die Antwoord. Ils jouent la famille dysfonctionnelle dans laquelle Chappie débarque, mais plus encore, ils jouent leur propre rôle. Sous leur nom de scène, avec des t-shirt du groupe et une tendance bizarre à écouter leurs propres productions à la radio. Sur le principe, je suis contre ce genre de démarche super méta, mais là, dans ce film précis, j'avoue que j'ai pas grand chose à en dire. Déjà, pour avoir maté quelques-uns de leur clips, il faut bien reconnaitre que leur univers graphique et déjanté correspond à 200% avec celui du réalisateur. Ils sont tellement à leur place qu'on les remarque à peine.
Le plus gros soucis étant surtout de l'ordre de l'empathie puisque que Ninja joue le rôle d'un parfait gros con. Mais à part ça, je trouve quand même qu'ils apportent quelque chose de positif au film. Déjà, Ninja et Yo-Landi partagent une alchimie atypique mais vraiment cool à regarder. En suite, ils ont fourni un travail un peu déstabilisant au début mais très agréable pour la BO et j'adore du fond de mon cœur l'idée de faire porter à Yo-Landi un t-shirt promotionnel pour le FILM Chappie. Ça ajoute une dose d'absurde tout en mettant en évidence son amour pour le mignon petit robot.


D'ailleurs, mignon, parlons-en. Je n'arrive toujours pas à croire que c'est Sharlto Copley (le méchant tout à fait hideux d'Elysium et le héros totalement pourrit de District 9) qui incarne Chappie. J'ignore s'il a aussi fait la performance capture, mais son travail vocal est touchant, charmant, mignon et, à la fin, je ne doute pas un seul instant de son existence. Enfin un métrage qui traite l'intelligence artificielle comme une vraie intelligence, une forme de vie sensible et aimante, tourmenté par sa différence, influencé par son environnement et capable de tenir n'importe quelle conversation sans jamais faire allusion à son aspect mécanique. Le scénario n'évite jamais le sujet et il n'y a pas de suspense : Chappie a une conscience.
Et cette conscience, mine de rien, on arrive à la percevoir à partir de quasiment rien. Des oreilles qui bougent à la manière d'un félin, des yeux fixes et deux barre de métal sur son visage plat. Pourtant, malgré ça, il a l'air vivant.


Après, je parlerai pas du reste du casting parce qu'ils jouent tous bien et Hugh Jackman nous offre une performance fun et surprenante.


Mais bref, passons aux reproches : Déjà, Neil a une tendance un peu lourde au fil de filmographie, c'est le méchant unidimensionnel. Le méchant qui est né méchant pour être méchant parce qu'il est méchant. C'est pénible quand on voit le travail qu'il apporte à ces héros et autres persos secondaires...
Mais le film aussi a une fâcheuse tendance à forcer les émotions. Je pense à une moment où Ninja envoi Chappie dans le "vrai monde" afin de l'endurcir. Ce moment aurait pu être beau sauf que la musique, les ralentis, les supplications de notre héros et tout ça font que cette scène est beaucoup trop clichée pour être touchante. Je me suis réellement senti manipulé par ce passage où j'entendais presque la voix du réal me dire "T'es triste, hein ? Ca te fait de la peine ? Tout ça juste parce qu'il est différent, tu te rends compte ?"...


Et puis la fin, surtout le 4eme acte, qui transforme un événement hyper important en une simple péripétie pour forcer le happy-ending. On aurait pu avoir en plus un discourt sur le transhumanisme, sur la conscience et tout, mais en le calant à la fin entre la poire et le fromage, ça marche pas.


Mais voilà, Chappie a quelques défauts, des maladresses, principalement dues au fait que Blomkamp est incapable de se concentrer sur un seul projet à la fois (quand il travaillait sur District 9, il commençait à penser à Elysium, pour Elysium, il a commencé à écrire Chappie pendant le tournage et pour Chappie, il parlait Alien 5 avec Sigourney). Et ça se sent dans le film que le jeune réal a l'esprit un peu éparse et pourtant, le tout est très agréable à regarder. Je vous le conseille vraiment tout comme je vous conseille le reste de sa filmographie. C'est un mec maladroit qui accouche de séries-B surpuissantes et survolté avec une sensibilité hors du commun... Même Elysium, en VO il vaut le coup pour Sharlto Copley.

GrenKopun
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le 9 juin 2015

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