Taylor Sheridan avait déjà fait sensation avec son scénario de Sicario qui avait été magnifié par Denis Villeneuve. Au point même qu'en l'espace d'une seul scénario il a réussi à se faire un nom. Voilà donc un an après et il voit son deuxième script adapté au cinéma, mais cette fois-ci par le britannique David Mackenzie. Ce dernier à une fascination non dissimulé pour le cinéma américain, il a su avec le temps avoir une filmographie éclectique et maîtrisé où il a pu démontrer tout son talent. Même si il a plus l'étoffe d'un faiseur que d'un véritable auteur, il arrive toujours à tirer le meilleur de ses scénarios. Accompagné en plus d'un casting prestigieux, tout laisse entendre que l'on va assister à un très bon moment de cinéma.


Le scénario écrit par Taylor Sheridan se révèle assez classique au final, pour ne pas dire prévisible. D'une certaine manière, il souffre des mêmes défauts que Sicario qui ne renouvelait pas les codes du genre dans lequel il s'imposait mais se contentait juste de les ré-exploiter avec efficacité. Ici c'est à peu près la même chose, Sheridan utilise les codes du western, du film de braquage et du road movie pour faire avancer un récit pour le moins prévisible. Malgré tout, même si il ne nous prendra jamais par surprise on se laisse bercé par ce dernier car il fait preuve d'une sincérité assez étonnante. Il y a une vraie déclaration d'amour pour le genre à tout les niveaux. Les personnages sont définis avec justesse surtout grâce à un double duo très attachant. La relation entre les deux frères se base beaucoup sur les silences et brosse le portrait de deux individus brisés par la société et la vie, qui décide de se rebeller par esprit de revanche. Leur histoire se montre touchante et distille une mélancolie sur le désenchantement du monde, sur l'ancrage des traditions qui mène les gens à leurs pertes. Tout ceci fait très bien écho à la relation entre le vieux flic et son coéquipier qui représente bien cette stagnation des préjugés dans un univers qui se refuse au changements.


Le film arrive grâce à ça à livrer des moments d'une pure beauté lyrique, comme cette superbe scène où des cowboys tente d'échapper à un incendie avec leurs troupeaux, sans pouvoir compter sur une aide extérieur. Ces moments sont vraiment mis en scène avec grâce par David Mackenzie qui sait à la fois se fait plus posé et poétique dans l'approche de ses personnages mais qui sait aussi retranscrire à merveille l'urgence des situations. Comme à son habitude, il embrasse le récit à la perfection, même si il ne transcende jamais ce qu'on lui donne, il en tire toujours ce qu'il y a de plus efficace. Son travail est inspiré et maîtrisé. Mais ce qui fait vraiment la saveur de l'ensemble c'est la perfection du casting, notamment le trio principal. Jeff Bridges excelle dans le rôle d'un flic vieillissant et bougon, qui transpire l'amertume surtout qu'il arrive à nuancer son jeu de façon assez habile dépassant les stéréotypes de son personnage. Chris Pine est plus en retrait ici, mais c'est aussi voulu par l'écriture de son rôle. Il offre une prestation monolithique d'un homme qui s'efface derrière une cause plus importante que lui et se montre impeccable. Néanmoins, la performance du film reviens à Ben Foster qui est absolument incroyable d'intensité. Il brosse son personnage tout en finesse dans une interprétation habité et crève littéralement l'écran.


Hell or High Water est un film d'une efficacité folle et qui s'impose comme une belle réussite. Même si il ne chamboule pas les mécaniques du genre et que le récit est à la fois classique et prévisible, il arrive à porter un regard intéressant sur une époque révolue mais qui persiste à faire son trou dans la société et l'esprit des gens. Mis en scène de manière inspiré et soutenu par un casting incroyable, Ben Foster en tête qui livre un de ses meilleurs rôles, le film emporte le spectateur dans une balade mélancolique et touchante qui ne révolutionnera pas le cinéma mais qui fait passer un bon moment.

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le 17 sept. 2016

Critique lue 771 fois

7 j'aime

Flaw 70

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