Cop
6.2
Cop

Film de James B. Harris (1988)

Je n'ai pas lu Lune sanglante, je ne sais même pas qui l'a écrit, je ne connais pas non plus ce fameux James Wood qui n'a pas l'air de faire l'unanimité... Mais je trouve ce film quand même moins bête que ce que j'en vois dire.

Cop ce n'est pas super joli à regarder ; ça suinte les années 80 et c'est plein de ces clichés du genre policier qui nous font saigner par les yeux : on suit un héros trop hard boiled qui demande à ses collègues de manipuler l'espace-temps, qui sort de nouvelles armes à feu de toutes les poches cachées de ses vêtements, qui a un pote bien haut placé pour justifier que son enquête ne soit jamais entravée malgré les nombreux obstacles, légitimes ou non, que le policier écarte d'une pichenette, et qui a une morale dure comme une poutre d'acier que personne ne comprend sauf lui parce qu'il a de l'expérience et que ça le travaille. C'est un peu comme NCIS, quoi, mais sans les ordinateurs et les téléphones portables (mais ça prend autant de temps visiblement d'analyser une tâche de sang en 1988 qu'en 2010 : Abby Sciuto est vraiment incompétente en fait !)

Je crois que le sujet du film, justement, c'est cette question du mec incompris : c'est normal, le héros est un psychopathe, et personne n'essaie de nous convaincre du contraire. Pas même le principal concerné. Dans le film, tout le monde lui dit qu'il est fou et obsédé, et, je sais pas vous mais moi, quand on me dit ça je me pose des questions. J'aurais un caractère comme le sien, je ne serais pas sagement revenue vers mon enquête qui avance mal après m'être rendu compte que ma femme s'était barrée avec ma fille en me reprochant la méthode d'éducation que je revendique comme étant la meilleure. Je l'aurais traitée de kidnappeuse et j'aurais fait quelque chose pour retrouver ma fille avant que sa mère ne lui lobotomise le cerveau contre moi.
Or le héros est effectivement maladivement obsédé d'après ce comportement : ce que sa femme n'aime pas, c'est qu'il raconte des histoires de son travail à sa fille au lieu de Boucles d'Or pour lui forger le caractère parce qu'il considère qu'on élève les petites filles à croire que le monde est un endroit sain et favorable au bonheur que connaissent les princesses de contes de fées. Il y a un dialogue que j'ai bien aimé mais que je me rappelle pas très bien mais que je vais quand même essayer de vous transcrire :
- Con du cul ! Ce n'est qu'une petite fille, d'où tu lui racontes tes histoires glauques ?
- C'est toi la con du cul ! Je te signale qu'une camée qui se taille les veines c'est aussi une petite fille ; que la pute que je vais baiser demain c'est aussi une petite fille ; que la meuf que j'ai retrouvée égorgée et pendue aujourd'hui c'est aussi une petite fille. Faut arrêter avec ce mythe du prince charmant parce que c'est pas les désillusions qui vont rendre notre fille heureuse !
Après quoi la femme dit au policier qu'il est obsédé par les cas de femmes assassinées, que c'est pas bien et que si c'est comme ça elle dormira sur le canapé. Ben il se trouve qu'elle a raison (ce sera même pas la seule à le dire) parce que entre protéger sa fille de la mère qui l'a enlevée alors qu'ils sont pas d'accord sur la façon de l'élever, et repartir à la recherche du coupable d'un assassinat de femmes alors qu'il a aucune piste, il donne la priorité à la seconde solution.
Avec ça donc, on le voit tuer des gens comme un dégénéré de la gâchette à plusieurs reprises dans le film. Tirer une fois ça lui suffit jamais, il doit être un peu maniaque sur les bords parce que c'est jamais moins de trois coups.
Même le serial killer à la fin, il a l'air d'un psychopathe de seconde zone à côté du héros (je m'attendais à ce qu'on découvre qu'il est schyzo et que c'était lui le tueur) ; vraiment, le serial killer est à moitié ridicule, on dirait un mime-ninja ; il est habillé en noir, et il fait des galipettes pour esquiver les balles (sans compter qu'il est poète et amoureux de la même femme depuis 20 ans et qu'il lui envoie des fleurs à chaque fois qu'il tue quelqu'un), et quand il comprend qu'il va se faire tuer alors qu'il s'est rendu, il fait une tête exactement comme ce smiley tourné vers la droite : D8 A ce moment-là, le héros lui a dit "ben ouais je suis pas censé te tuer, en tant que flic je devrais t'arrêter et t'emmener au poste. Mais bon, j'ai été suspendu donc j'ai plus le droit de te tuer que d'habitude."
Oh zut je suis fatiguée j'ai envie d'abréger cette critique.

Enfin bon tout ça pour dire que l'intérêt du film, je trouve, c'est pas tant de nous montrer une enquête cohérente et dans les règles de l'art parce l'idée ce serait plutôt de montrer que le héros qui mène cette enquête est fou, et qu'il fait vraiment beaucoup plus peur que le méchant officiel. Du coup je sais pas ce que raconte le livre (il parait que l'adaptation en est "hérétique") mais si c'est comme ça que le réalisateur a compris l'histoire, why not ?
Aphimorv
7
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le 25 janv. 2014

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3 j'aime

Aphimorv

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