Germain enseigne le français dans un lycée qui a fait le choix de revenir à l'uniforme. Il tente d'intéresser ses élèves de seconde à la littérature, mais son job est un sacerdoce au quotidien. Seul Claude se hisse au-dessus du lot et parvient à attirer son attention dès les premiers cours : le gamin, par le truchement d'une rédaction enlevée, lui révèle comment il est parvenu à s'introduire dans la maison d'un de ses camarades de classe après les avoir espionnés tout l'été.


Le style est bon. Le vocabulaire est riche. Germain, très agréablement surpris par cette copie. Et après la lecture de nombreux devoirs indigestes, il tend le devoir à sa femme. Celle-ci est troublée. Mal à l'aise. Car au-delà de la forme, le fond est profondément dérangeant. Pourtant, Germain ne fera à l'adolescent qu'un commentaire lointain sur le voyeurisme de son devoir. Au contraire, il va le pousser à poursuivre ses efforts littéraires et, par voie de conséquence, à réitérer ses déambulations clandestines dans la maison.


Bientôt, le prof et son épouse attendent les copies de Claude. Impatients de connaître la suite, ils deviennent complices et par ses conseils Germain influence le cours des événements. L'écrivain qu'il n'a pas réussi à devenir se repaît de cette carrière par procuration. Et sous le prétexte fallacieux de la matière première de l'écrivain, l'indiscrétion et l'impudeur augmentent à chaque nouveau devoir.


Le métier de prof n'a rien d'une sinécure. Las de corriger des copies médiocres, Germain tait l'inacceptable. Mieux, il l'encourage. Car il est évident dès le début qu'il ne s'agit pas de la fiction d'un romancier en herbe particulièrement imaginatif. L'auteur est contemplatif et ne parvient à écrire que ce qu'il a sous les yeux. Pour relater une scène, il doit d'abord la vivre. Et au besoin, la provoquer.


L'exercice finit par totalement échapper à l'enseignant. La folie guette...


Lucchini dans le rôle du passionné de littérature est totalement convaincant. Et lorsqu'il nous parle de Flaubert, de Dostoïevski, de Tolstoï ou qu'il déclame du Jean de la Fontaine, il ne joue pas un personnage mais est véritablement lui-même : l'amoureux des mots, des vers, des rimes. La sauce prend aisément et le spectateur, même s'il est persuadé que lui aurait immédiatement cessé ce petit jeu, attend avec la même impatience la suite de l'histoire.

BibliOrnitho
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le 15 juin 2015

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