En plein milieu de cet été cinéma, sûr que Dunkerque représente The Plage to Be, fréquentée par un Christopher Nolan érigé comme le roi de l'entertainment meta qui transforme en or tout ce qu'il filme. En effet, le plus fou est à sa portée. Le plus viscéral et exigeant aussi, sans parler, naturellement, du plus spectaculaire et décomplexé.
Son film de guerre fantasmé partait donc autant avec nombre d'a priori favorables qu'une sacrée pression, tant Dunkerque ne pouvait, à coup sûr, qu'être un nouveau chef d'oeuvre. Un de plus dans la filmographie du bonhomme.
D'une certaine façon, l'oeuvre touche à ce but. A l'évidence. La caméra colle de près aux pas de ses protagonistes, au plus près d'une action que la musique de Hans Zimmer exalte et que chaque son habite et rend incroyablement réaliste. Cette dernière secoue, choque, constante, sans un instant de répit. Rendant palpable l'urgence de la situation malgré le statisme des plans côtiers.
La ligne temporelle est morcelée, comme montée sur différents niveaux. Comme les rêves imbriqués de son Inception. Comme la terre, l'air et la mer, autant d'aspects d'une évacuation entre débâcle et miracle. Chaque photogramme, lui, est terrassant de beauté et de cinétique. Dunkerque n'est plus à proprement parler un film de guerre, mais un film tendance survival de Christopher Nolan où il ne sera pas rare de pousser des "Wouah !" admiratifs et de penser que le prix de la place sera très vite rentabilisé. Beaucoup en ressortiront même avec la conviction d'avoir assisté à un nouveau haut fait d'armes.
Mais...
Le spectacle est au rendez-vous, cela ne fait aucun doute. Le huis clos claustro et menaçant est convoqué en plus d'une occasion. Et puis, de toute façon, c'est Nolan, merde ! On se tait et on apprécie ce qu'il nous offre !
Mais il sera cependant permis au spectateur de, longtemps, ne pas se sentir concerné, malheureusement. Comme si l'on était, malgré tous les artifices convoqués par le réalisateur, étranger au conflit qui fait pourtant rage. En effet, Dunkerque, toute somme peut-il être des qualités techniques du cinéma de Nolan, n'est pas parvenu, ce coup-ci, à faire vivre de l'intérieur son formidable film de guerre, à plonger le masqué dans ce qu'il fait vivre à ses protagonistes. Comme il l'avait pourtant fait dans beaucoup de ses oeuvres précédentes.
C'est que Behind s'était perdu dans les méandres fascinants d'Inception, avait vécu de la première à la dernière minutes The Dark Knight comme un des films de super héros ultimes, sombres et torturés. Il avait succombé à la magie et à l'art de la mystification déployée par Le Prestige. Il était enfin parti avec Matthew loin, très loin, sur Interstellar et avait été soufflé par les émotions convoquées.
Rien de cela sur la plage de Dunkerque, dans son ciel d'un bleu soutenu ou sur ses bateaux. Pendant longtemps. Même si le plaisir est là, à l'évidence. L'oeuvre ne l'a emporté que par légers à-coups, à l'occasion de certaines destinées sacrifiées par une humanité pas très glorieuse. Pour véritablement exploser dans le dernier quart, lors du sauvetage, carrefour des trois lignes de temps. Là où certaines situations apparaissent sans issue, où le spectaculaire devient débridé. Et où le film se hisse à ce niveau, enfin, des émotions suscitées et les atmosphères baignant les précédents opus de Nolan. Celles qui terrassaient le public de la première à la dernière image.
Peut être que le masqué, et bien, faudrait songer à l'appeler le blasé, dorénavant. Car même si Dunkerque, il a quand même bien kiffé, rassurez-vous, il a été un poil déçu de ne retrouver, seulement, que sa caméra virtuose, son goût pour la superbe composition de ses images, ainsi que son attirance pour les projets autres qui parsèment sa filmographie. Oui, c'est déjà beaucoup. C'est déjà (très) satisfaisant. Mais il manque, tout simplement, le coeur de Christopher Nolan.
Et ça procure, mine de rien, une drôle d'impression.
Behind_the_Mask, son of a beach.