Un moment agréable en dépit de quelques défauts...

  Posons déjà quelques bases ami-lecteur… Nous avons ici un film adaptée d’une pièce de théâtre du même nom, écrite par Alexis Michalik qui est  passé derrière la caméra pour son adaptation au cinéma. J’ai toujours quelques craintes quand on transpose une pièce sur grand écran. L’exercice reste périlleux de ne pas suffisamment travailler la mise en scène et que l’œuvre ne fasse pièce filmée… Pourquoi ce choix malgré mes craintes ? À cause du sujet d’*Edmond*.

Et oui, Edmond nous propose une plongée dans la genèse de la pièce célébrissime de Rostand, Cyrano de Bergerac. Sans mentir, je crois que c’est la pièce de théâtre que j’ai le plus lue et vue dans ma loooongue vie. Adolescente, j’avais une vraie passion pour le personnage de Cyrano, son panache, sa laideur, son amour désespéré pour Roxane. À cause de cette amour un brin déraisonnable, j’ai pris un peu le temps de me renseigner sur le film de monsieur Michalik avant de le visionner. Bien m’en a pris… J’ai ainsi appris qu’avant d’être un film historique c’était une comédie. Pour profiter d’Edmond, je savais donc qu’il me fallait oublier les vérités de l’Histoire. Ce n’est PAS une reconstitution fidèle, c’est un hommage à une œuvre et à une époque. Je m’installais donc dans le canapé avec cette bonne résolution en tête, juste prête à profiter d’un bon moment de cinéma… Mais qu’en est-il au terme de ce visionnage ?


  Soyons clair, ami-lecteur, heureusement que j’avais compris qu’Edmond était une œuvre à part entière et qu’il ne fallait pas chercher à vérifier la véracité des faits. Je pense que ceux qui auront attendu un film historique, dans le sens strict du terme, ont été déçus. Ça va plus loin que quelques libertés avec la biographie de monsieur Rostand, tout semble fantasmé dans le paris de 1897 que nous dépeint monsieur Michalik… L’histoire qui nous est racontée est légère, enlevée, pleine de la verve que l’auteur doit admirer dans Cyrano de Bergerac. Je pense que c’est la raison pour laquelle mes enfants (10 et 12 ans) ont beaucoup aimé Edmond. Ils ont ri et ils étaient complètement absorbés par les difficultés du personnage de Rostand. À la fin du film, ils m’ont même demandé si on pouvait, à l’occasion, voir l’adaptation avec Depardieu, *Cyrano*, dont je leur ai parlé. Carton plein du côté des mômes… Et moi ?
Et bien l’histoire m’a plu, vraiment, et j’ai passé un assez bon moment. Quelques éléments ont néanmoins tempéré mon avis sur le film.
Le choix des comédiens tout d’abord. Thomas Solivérès, dans le rôle d’Edmond Rostand, ainsi que Tom Leeb, qui campe Leo Volny, livrent une prestation tout à fait convenable, sans pour autant être renversante. Par contre j’ai particulièrement aimé le personnage de Coquelin, joué par le brillant Olivier Gourmet.
Oui, les choix de casting sont assez bons. Sauf pour un personnage même si c’est une question de ressenti personnel. Dans le rôle de Sarah Bernhardt, la célèbre comédienne si charismatique, Michalik a choisi Clémentine Célarié. Alors comment dire ? Je n’ai rien contre cette actrice mais elle est à mille lieux de ce que j’imagine de Sarah Bernhardt. Du coup je ne suis pas parvenue à y croire une seconde.
Heureusement le reste de la distribution ne m’a pas donné cette impression…
Enfin, il nous faut aborder la question de l’adaptation d’une pièce. La réalisation, bien que soignée, reste dans la sphère du théâtre filmé pour 90 % du film. Des décors superficiels et en nombre limités. Une seule scène échappe à cette faille : celle de la fin de la pièce de Rostand, qui est mise en scène en extérieur pour, sans doute, symboliser la réussite de la représentation. Ce côté « pièce sur grand écran » m’a beaucoup moins gênée que je le craignais et ne m’a pas empêchée de passer un chouette moment.
Pourquoi alors, me demanderas-tu peut-être, une note aussi tiède ? À cause des dialogues. S’ils sont enlevés et souvent piquants, j’ai trouvé qu’ils restaient un brin ampoulés. Comme si Edmond n’était pas un auteur mais un de ses personnages qui ne sait s’exprimer qu’avec des manières d’alexandrins. Cette « maladie » touche presque tous les dialogues du film (et donc, je suppose, de la pièce d’origine). C’est un choix qui peut se défendre, bien entendu, pourtant j’ai trouvé un peu dommage que l’auteur d’*Edmond* ne fasse pas le choix de marquer plus la différence entre le théâtre et la « vraie vie » de son héros : en lutte pour écrire, en lutte pour faire vivre sa famille, en lutte pour que son talent soit reconnu.
Pour conclure, je dirais qu’*Edmond* est un film sympathique, sans ambition démesurée, qui cherche seulement à nous faire passer un moment agréable en rendant hommage à l’œuvre magistrale qu’est *Cyrano de Bergerac*…
CulturoVoraces
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le 6 avr. 2021

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