C'est sans même regarder le synopsis, sans même savoir que c'était Dennis Villeneuve que je me suis lancé là-dedans, donc sans à priori, à part Gylenhaal qui ne m'a jamais déçu. Il m'avait fallu un deuxième visionnage de Prisoners pour complètement apprécier, seul film du réalisateur que j'avais regardé jusqu'alors.


Plutôt délicat de s'avancer dans une critique ferme et définitive tant il m'a été difficile de comprendre où était la piste d'atterrissage. Il y en a des films où on ne comprend pas trop ce qu'il se passe, où il est vain de tenter d'apporter des réponses, des films qui s'apprécient sans qu'on sache trop pourquoi. J'ai eu le sentiment que celui-là n'en faisait pas partie, le sentiment qu'il y avait quelque chose à comprendre et que je n'ai pas su saisir. Immédiatement après visionnage, j'essaye de trouver des explications sur le net, et effectivement les choses se sont éclaircies.


Formellement c'est plutôt propre, épuré, et très jaune, un jaune désert. C'est d'ailleurs quelque chose de vraiment notable, ce côté désertique, on se sent seul avec le peu de personnages présents dans le film, la ville a l'air entièrement vide. La musique est elle aussi très réussie, intimiste à l'image de l'ambiance générale, elle maintient continuellement une tension, un sentiment de curiosité et d'éveil qui aurait pu vite s'assoupir tant on patauge au fil du récit.
Narrativement parlant, ça marche aussi, du moins ça nous fait rester jusqu'au bout. Je ne cache pas une certaine frustration tout de même, quand à un certain moment les choses semblent s'éclaircir, et la séquence d'après on retourne au point mort, en attendant d'avoir une réponse ou deux. En étant vigilant, et après coup, il y a quand même pas mal d'indices subtilement calés ça et là.
Mais une fois passée la scène finale, extrêmement sèche, limite acerbe, personnellement j'ai soupiré. T'attends quoi de moi monsieur Villeneuve ?


Alors pour conclure, et après quelques recherches d'explications, j'en retiens un film qui en fait un peu des pompes pour nous plonger dans le subconscient d'un homme infidèle, qui a peur de s'engager, qui se sent piégé dans une toile et qui culpabilise à mort. Pendant tout le film la partie inconsciente du héros essaie de faire le ménage et régler un conflit intérieur, entre pulsions de liberté sexuelle et professionnelle, entre autre, et sagesse et maturité d'un homme de famille. Pourquoi pas ? Mais Villeneuve nous parle dans un langage un peu trop sophistiqué pour le propos à mon goût, maladroitement condescendant tant il essaie de rendre son film intelligent et se souci trop peu de le rendre intelligible. C'est subtil quand même, mais il m'en reste le sentiment que le réal' veut nous épater en nous noyant dans son désert un tantinet confus, et très jaune. Bon allez je le dis, je trouve tout ça un peu fumeux et hautain, et ça a tendance à m'énerver.


Je garde quand même mes distances et me dédouane totalement en précisant que ce n'est que mon avis et qu'il est même probable que je sois simplement passé à côté, qu'il m'ai manqué des outils pour l'apprécier, comme le bon vin - sauf que le vin je l'apprécie presque systématiquement, symptômatiquement aussi -.


Sinon, une fois de plus, un Gylenhaal impeccable et crédible dans ses deux rôles, vraiment.


Gerwin

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le 26 oct. 2015

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Gerwin

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