"Détruire le monde est une chose facile. Cependant, ce n'est pas aussi simple de le reconstruire"

On va commencer de manière claire dès le début, Evangelion 3.0 : You Can (Not) Redo est simplement mauvais. À l'image de la saga Rebuild, il est largement en dessous de la série originale. Mais il est peut-être, et surement, le seul qui montre quelque chose de neuf contrairement aux deux premiers épisodes.

On ne présente donc plus Hideaki Anno quand on en est si avancé dans l'univers Evangelion. De plus l'ayant déjà fait dans ma critique de Ritual, je pense que ça ferait un peu redondant, du coup si vous ne connaissez pas ou très peu Hideaki Anno, je vous invite à vous référez à ma critique ou d'autres critiques de ses œuvres ou encore sa page Wikipédia qui est très complète.

Qu'est ce que Rebuild of Evangelion ?

Nous sommes en 1995, le monde connait la première diffusion du premier épisode de Neon Genesis Evangelion, la première diffusion qui mènera à un premier arc s'étendant jusqu'en 1997, celui-ci étant réputé dans le monde entier et est composé d'une série de 24 épisodes puis de deux films (Neon Genesis Evangelion : Death & Rebirth et The End Of Evangelion). Cet arc aura une vraie fin, l'histoire aura sa conclusion, car comme l'indique le titre du dernier film, c'est la fin de Evangelion, et comme l'a très bien dit @Tanaziof :

Plus qu'un film: un constat. Celui de l'échec du projet Evangelion.

Après le film, Evangelion est terminée, morte. Le message ne passe pas avec *Evangelion donc il partira vers un autre univers pour passer son message, le live movie avec Love & Pop et Shiki-Jitsu.

C'est alors que 12 ans plus tard, en 2009, que sort le premier épisode de Rebuild Of Evangelion : Evangelion 1.0 : You Are (Not) Alone. Celui-ci se contentera de reprendre la série originale, de modifier 2-3 éléments grâce à la magie de l'animation qui permet de changer le sens d'une scène en changeant le montage et les dialogues sans refaire le visuel. Certaines choses sont intéressantes.. D'autres moins.

Neuf mois plus tard, un second épisode du projet Rebuild voit le jour : Evangelion 2.0 : You Can (Not) Advance. La première partie continuera sur la lancée du premier épisode en n'étant qu'un simple montage alternatif de la série originale. Mais la seconde partie sera cependant les premiers éléments de nouveauté dans Rebuild Of Evangelion mais néanmoins aussi longue et ennuyante que l'attente chez le médecin. Elle aura cependant le privilège de se conclure sur une scène magnifique qui nous éloignera définitivement de la série originale.

Les deux premiers épisodes seront donc en somme très peu intéressants à part 2-3 scènes alternatives et la fin du deuxième. L'animé original réputé pour sa psychologie et son message ne deviendra plus qu'un simple animé mécha de base. Puis les Eva, les "robots" du film ne seront plus qu'une simple boite à gadget au lieu d'être cette entité mystérieuse. De plus, ces opus ajouteront une 3D horrible et un nouveau design aux anges ou aux Eva, tantôt inutile, tantôt immonde. L'Eva d'Asuka deviendra particulièrement hideux alors que celui de Rei connaîtra un changement de couleur aussi inutile qu'illogique.

En somme, l'absence d'Hideaki Anno sur ces deux premiers opus se fera drôlement sentir. Mais son retour sur le troisième épisode n'aidera pas à rattraper cette franchise car Hideaki Anno n'a plus rien à dire. Maintenant il a 60 ans et est marié, d'une certaine manière (aussi modérée soit-elle), Hideaki Anno va mieux, il s'est calmé. Comme souvent avec les réalisateurs punks, ils ne veulent plus se battre au fil du temps. A l'image d'un Sion Sono ou d'autres encore, leurs films deviennent de simple source de plaisir, d'expérimentations techniques ou autres, mais les thèmes abordés, les messages sous entendus seront plus modérés voire absents. Hideaki Anno ne veut plus se battre vu qu'il a à chaque fois perdu avec Evangelion, Love & Pop et * Shiki-Jitsu*. Ainsi, le troisième opus sonnera bien creux.

Evangelion 3.0 : You Can (Not) Redo

Tout à changé dans cet épisode, en particulier la situation des personnages. Cela pourrait permettre justement à explorer plus profondément leur personnalité mais hélas.. non. Les personnages sont ratés. Nous avons les nouveaux qui sont des clichés de l'animation (les assistants de Misato ou largement inexploités (la sœur de Toji). Dans les personnages qui existaient déjà, Misato et Ritsuko sont méconnaissables mais cela se justifie plus ou moins avec l'histoire. Shinji quand à lui a son caractère qui est poussé l'extrême si bien qu'on ne ressent plus aucune sympathie pour lui, ni de pitié. Asuka perd tout ce qui rendait son personnage intéressant puisque le trait de caractère qui la définissait est totalement raté ; elle, qui n'aurait jamais avoué qu'elle a besoin des autres, et affirmant sans arrêt qu'elle n'avait rien à prouver à personne, se retrouve alors à réclamer ouvertement l'aide de Shinji. Rei est le seul personnage qui est resté un tant soit peu intéressant puisque poussée dans l'excès devient encore plus intéressante par les questions qu'elle soulève et bien plus attachante.

L'histoire du film est, elle aussi, scandaleuse puisqu'elle ne mène nul part et n'avance absolument pas.

Mais non seulement d'être vaine, cette histoire est pour la majeure partie du temps incompréhensible, et cela dès la scène d'ouverture où l'on ne comprend strictement R-I-E-N !

Mais cette scène d'ouverture a tout de même le mérite d'annoncer dès le début le programme du film, une animation à la fois jolie et affreusement laide ! La partie laide est encore due aux parties en 3D d'une laideur extrême. Sinon le reste est très bien réalisé.. Un peu trop. Vous me direz "De quoi il se plaint ? C'est bien un film quand il est bien réalisé!", et généralement je suis d'accord. Mais souvenez-vous, la force d'Evangelion ne s'est jamais située dans la réalisation. En 1995, Neon Genesis Evangelion était bien dix ans en retard niveau animation par rapport à Ghost In The Shell de Mamoru Oshii. La force d'Evangelion se situe justement dans les propos et pas la réalisation. C'est pourquoi, cette belle réalisation accompagnée de propos un peu trop léger nous rappelle d'un côté que nous ne regardons pas Evangelion.

Enfin, la dernière raison de pourquoi ce film n'est pas bien, c'est parce que le message, la morale qui est propre à Evangelion est ratée, elle est ni renouvelée ni modifiée. On pouvait se plaindre de son absence dans les deux premiers épisodes, mais ici le retour de Hideaki Anno a occasionné le retour du message. Mais Hideaki Anno ne doit plus être aussi convaincu, ou il ne doit plus vouloir le passer avec autant de désir, je ne sais pas. Mais au final, le message sonne faux, forcé. Il ne passe pas.

Cependant, après la fin du film (plus ou moins incompréhensible) qui nous laisse déçus de ce qu'est devenu Evangelion, il y a un élément réconfortant bien qu'insignifiant pour sauver cette saga. Cet élément, c'est le générique ! Absurde mais vrai. Utada Hikaru nous avait déjà servi l'entêtante Beautiful World dans les premiers épisodes, elle revient ici avec Sakura Nagashi (Je vous invite d'ailleurs à aller voir le clip, réalisé par Naomi Kawase et qui n'a rien à voir avec Evangelion mais qui est sublime : Utada Hikaru - Sakura Nagashi). Mais le plaisir ne dure pas longtemps, en tout cas pas assez.. Puisque on réattaque sans préavis avec le teasing du quatrième et dernier épisode de Rebuild Of Evangelion. Au programme nous aurons une animation 3D encore plus laide que celle des trois premiers et du combat basique de méchas.. Soit tout sauf du Evangelion. Et ce permettre de remettre la blague du "Encore plus de fan service" me semble vraiment limite puisque quand on voit que le fan service de Rebuild est odieux et qu'il ne sonne plus comme du "troll" mais simplement comme un code de l'animé d'aujourd'hui. Surtout quand on regarde les nouvelles tenues de Rei et Asuka ...

Au final, on peut résumé cet épisode en se contentant de dire que même si le retour de Hideaki Anno aux commandes se fait sentir, cela n'améliore en rien la qualité de cette série de film.

Détruire le monde est une chose facile. Cependant, ce n'est pas aussi simple de le reconstruire.

Cette phrase issue du film caractérise assez bien la saga Rebuild Of Evangelion. La destruction fut aisée avec The End Of Evangelion, c'était la fin du projet, la conclusion. Et pourtant, un projet est né pour le reconstruire. Que ce projet de reconstruire soit bien ou mal, peu importe. A la fin, il ne nous reste qu'un projet qui a du mal à refonctionner aussi bien qu'avant, cette reconstruction est bien compliquée. The End Of Evangelion était notre Troisième Impact, Rebuild Of Evangelion tenta quelque part d'être notre Quatrième Impact mais échoua lamentablement.