Après le nanar L'Empreinte de Frankenstein, la Hammer décide de revenir aux basiques. Terence Fisher est à la caméra, James Bernard à la musique, et le scénario repart vers l'univers de la Revanche de Frankenstein. Néanmoins en 1967, les choses ont bien changé depuis le début de la franchise, dix ans plus tôt ! Le baron, toujours en lutte avec Dieu pour le secret de la vie, décide de le défier désormais sur le champ de la métaphysique, en capturant les âmes. Une tragédie conduisant à la mort de deux amants, permet au savant fou de mettre l'âme de l'homme dans le corps de sa compagne. Sauf que cette créature va encore lui échapper, car le scientifique oublie toujours les passions humaines.


Peter Cushing, fidèle au poste, reprend son interprétation de l'aristocrate froid, obsédé par son ambition prométhéenne. Cependant, le poids des ans se fait sentir et le savant fou en porte la marque. Notamment, suite à une probable expérience ratée, il a les mains brûlées, et ne peut plus opérer lui-même. Pour cela, il a besoin d'assistants envoûtés par son génie, montrant bien toute la fascination maléfique qui émane de lui.


Pourtant, Frankenstein n'est pas le personnage principal, il est d'ailleurs secondaire. L'histoire est surtout celle de l'un de ses assistants, accusé à tort, du meurtre du père de sa dulcinée, qui se suicidera par la suite. Les deux amoureux réunis ensemble dans le même corps chercheront à se venger d'une société de castes intolérante. Même dans l'Empreinte de Frankenstein, il y a une caricature des notables, mais elle est à mille lieux de la férocité de ce film. On ressent bien la patte de Fischer, avec ces nobles cruels et leurs amères victimes.


Cet opus se distingue avec son aspect SF, faisant sortir la saga du fantastique. Cependant, cela fonctionne assez bien grâce au sérieux de Cushing et aux belles images de Fischer. Mais, c'est vite laissé de côté pour s'intéresser à la vengeance de la créature aux charmes vénéneux. On sent le changement des années 60, avec cette création façon Bardot, jouée par Susan Denberg, la Hammer souhaitant mettre un peu plus de « chair » dans ses productions. Néanmoins, si le côté mortifère de la double présence des amants dans ce corps est montré, rien n'est fait sur l'ambiguïté sexuelle. A l'image, des affiches présentant Denberg en petite tenue, mais rien de tout cela dans le film, l'époque ne permettait pas encore tout.


Frankenstein créa La Femme fait partie des bonnes productions sur le savant fou, une variante originale de l'histoire de Shelley. On a ce qu'on cherche aussi dans les Hammer, les belles couleurs, le gothique, et l'horreur. Cependant, il n'arrive pas au niveau de la Revanche de Frankenstein, avec un scénario entre deux chaises. D'un côté, le baron et sa capture d'âmes sont trop mis de côté, et de l'autre la vengeance est très vite expédiée, amenant à un manque d'exploitation de la créature et à des incohérences.

Paul_Rigaud
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le 19 avr. 2015

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